De la société du spectacle en milieu militant
Un événement de cette semaine m'a poussé à écrire cette contribution. Jeudi a lieu une fête de soutien (collectif dont je tairais le nom, chacun se reconnaîtra dans l'histoire). Il vient notamment un groupe de rap aux chansons engagées qui demande un fort cachet de 1200 euros + chambres à l'hôtel. J'ai alors sursauté en apprenant cela et décidé de boycotter la soirée en n'y allant pas, je donne mon soutien à un collectif, à des actions et non à une société du spectacle. Que je sache, ce groupe n'est en rien lié à la thématique et leur payer une chambre d'hôtel ne changera rien à la problèmatique soulevée par le collectif.
Ce dont je voudrais parler ici n'est pas de me focaliser sur un groupe de rap qui fait du commerce sur un fond militant mais de revenir sur un processus de spectacularisation du monde militant. Le danger est énorme et donne un moyen très conséquent à des structures institutionnelles que l'on combat de nous bouffer de l'intérieur.
Cette spectacularisation va d'abord dans un sens de perdre les objectifs premiers d'une lutte. A qui veut-on donner du soutien, et quel type de soutien ? Créer un spectacle incite t-il une appropriation personnelle des consommateurs du spectacle ? Ici, je parle de consommateur car tout dans le processus pousse à une distinction entre un collectif professionnel de lutte et un client qui consomme de la fête agrée "militante". Un peu comme le phénomène de la malbouffe où le label "bio" permet au consommateur d'oublier les problèmes de fond de ce phénomène tout en achetant une bonne conscience. Résultat des courses : récupération politique du concept mais aussi par les agro-alimentaires (maintenant les OGM sont déclarés bio, et ne parlons pas des animaux qui en bouffent depuis longtemps !)
Ce principe de société du spectacle qui vit de soirée estampillée militante tient du même pincipe que cette société allemande qui, pour un prix fixé au préalable, vous fournit sono, militants et moyens logistiques. (voir le dernier CQFD) On crée du médiatique, du tape à l'oeil pour sensibliser, mettre en avant. Seulement, comment le faire est sans doute aussi important que de parvenir à le faire. On parle souvent de la forme de la lutte qui interfère dans la lutte elle-même.
Comme dernier mot, j'entends souvent des critiques concernant des institutions gèrant la misère des autres car vivant de salaires concernant le traitement de cette misère. Ici, c'est encore plus grave car on parle seulement d'événementiel, il n'y a qu'une société du spectacle qui vit du label de "militant contre la misère humaine".