29 mars 2012
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unsyndicaliste nous a fait parvenir pour publication .
La Poste nous vante depuis plusieurs mois l' actionnariat-salarié
dont l' application est différé de 6 mois ( prévue donc en septembre
2012 ) pour cause de suicides chroniques dans l' entreprise depuis
l' année dernière . Pour ceux qui ont la mémoire courte réduite la
plupart du temps à l' épaisseur de leur portefeuille , il est
toujours utile de rappeler des krachs retentissants dans d' autres
secteurs ( ici Alcatel en 1998 ) en défaveur des salariés , dindons
de la farce de cette fumisterie qui est en fait un salaire au crédit
pour alléger les finances de l' entreprise ; les salariés n' ont pas
à être solidaire des résultats et des stratégies compétitives de
leurs entreprise au point d' en devenir les esclaves à vie !
Le 17 septembre 1998, les salariés d'Alcatel prennent un coup au
moral : 35 000 détenteurs d'actions du groupe perdent en quelques heures
38 % de leur épargne. La dégringolade du titre n'est plus la seule
affaire du patron ! Un krach traumatisant pour ces capitalistes
"populaires", au moment où la formule - acclimatée depuis longtemps aux
Etats-Unis ou en Grande Bretagne - commence à se développer en France.
Ce coup de semonce des marchés va-t-il compromettre l'essor de
l'actionnariat salarié ? C'est peu probable, même si, souligne Vincent
Cornet, de Hewitt Associates, "/le niveau élevé des marchés financiers
n'était pas pour rien dans l'engouement des Français/". Avec ou sans
euphorie boursière, le développement des différentes formes
d'actionnariat salarié - plans d'épargne avec fonds communs de
placement, plans d'achat d'actions, stock-options - constitue une
mutation majeure. Fils naturel de la mondialisation et de la
financiarisation de l'économie, l'actionnariat salarié exprime une
tendance lourde : l'investisseur - donc l'actionnaire - prend le pas sur
le salarié. En moins de vingt ans, la désinflation a mis fin à
l'illusion de l'amélioration du pouvoir d'achat par la feuille de paie.
Dans l'univers de la "valeur pour l'actionnaire", la distribution de la
prospérité passe par les gains en capital. Les patrons promeuvent des
systèmes susceptibles d'associer les salariés au partage de la fameuse
"création de valeur". La "participation", chère au général De Gaulle,
s'installe, même si le monde a changé et les motivations aussi ...A la
Société générale, les salariés-actionnaires détiennent 8,3 % du capital,
à la Seita 6,25 %.
L'entreprise a tout à y gagner. En créant un lien entre patrimoine
et revenu, elle responsabilise et motive. Elle cherche à revaloriser
l'ancienneté dans l'entreprise, bien malmenée au cours des dernières
années. Elle fidélise aussi les meilleurs, notamment les cadres et les
spécialistes. Dans certains secteurs, telle la high-tech, l'actionnariat
salarié constitue un élément central de la politique d'embauche et de
rémunération. Des structures le favorisent, comme le MBO. Actions de
l'entreprise en poche, les salariés sont stimulés par des perspectives
de revenus (même différés) plus importantes. Chez France Télécom, comme
dans la plupart des privatisés, peu d'entre eux regrettent d'avoir
investi lors de la privatisation. Ils apprennent aussi à mieux
comprendre les mécanismes économiques et, en "intégrant la complexité",
à dépasser le vieux débat sur l'affrontement capital-travail. Les
esprits évoluent ... même à la CGT.
La mise en place de ce nouveau partenariat suppose quelques
conditions. Pour que l'actionnariat salarié constitue un ciment social
et ne soit pas vécu comme un facteur d'inégalité supplémentaire, il faut
gérer l'équilibre entre l'attribution de plans de stock-options
sélectifs et l'offre d'achats de titres ouverte au plus grand nombre.
"/Il faut bâtir un trépied composé des stock-options, du plan d'épargne
entreprise et du plan d'achat d'actions au niveau mondial/", plaide
Philippe Poincloux, associé chez Towers Perrin.
La crise boursière ne remet pas en cause cette mutation. Mais elle
rappelle opportunément que l'avenir d'un actionnaire est risqué : il y a
des limites à une "flexibilisation" rampante des revenus, au moins pour
le salarié de base. Le retour des grands plans sociaux (Philipps,
Siemens ...) rappelle qu'il peut être difficile pour un salarié
actionnaire de concilier ses intérêts de salarié et ... d'actionnaire.
Ces nouvelles formes d'association capital-travail accentuent le clivage
entre les salariés "stables", en CDI, et ceux en situation précaire, a
fortiori laissés sur le bord de la route. L'actionnariat salarié est par
essence une stratégie d'"insider". La question sociale ne sera pas
résolue parcequ'on aura transformé les salariés en actionnaires. Mais
les relations sociales dans l'entreprise s'en trouvent, d'ores et déjà,
profondément modifiées.