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  • : Le blog du laboratoire anarchiste est un blog actif a propos de l'actualité sociale
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Le laboratoire Anarchiste
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le mercredi de  16h30 - 19h

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vendredi toutes les deux semaines

de  17h30à19h

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sur radio Mega
99.2FM
lundi en direct
18h15 - 19h
rediffusion:
jeudi de 9h à  9h 45
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04 75 44 16 15

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La tyrannie la plus redoutable n'est pas celle qui prend figure d'arbitraire, c'est celle qui nous vient couverte du masque de la légalité." Albert Libertad

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le blog du laboratoire anarchiste

File:Wooden Shoe.svg
13 décembre 2012 4 13 /12 /décembre /2012 13:54

Cyril s’est fait condamner en comparution immédiate fin novembre après s’être fait arrêter sur la zad par des gendarmes infiltrés sur une barricade (’y a déjà eu des articles publiés là-dessus).

Il nous répond et nous envoie une chanson qu’il nous demande de publier. pour lui écrire :

centre pénitentiaire quartier maison d’arrêt Cyril n°d’écrou 57360 rue de la Mainguais 44300 nantes

Mes chers camarades,

Un très grand merci pour votre soutien et celui des autres camarades zadistes. Pas une journée ne se passe sans que je pense à vous tous. Merci pour ces infos non muselées que tu m’apportes, cela renforce encore plus mes convictions déjà fortes et ne me désespère pas pour notre cause qui est juste, elle. Nous ne sommes peut-etre qu’une épine dans le pied de ce gouvernement mais elle est assez profonde pour qu’il puisse la retirer. Remplie d’un venin qui se mourit d’amour et de solidarité, elle envenime ceux qui sont pour la destruction, la repression violente et les constructions capitalistes inutiles pour une population pacifiste mais resistante qui ne demande que de vivre en paix et en harmonie avec la mère nature. Ils ne sont pas à leur premier coup d’essai. Mais la resistance est toujours là. Nous faisons partie de la nouvelle et de l’ancienne génération qui lutte depuis tant d’années contre ces multiples projets inutiles. Ils depassent les bornes. Ces souffrances qu’ils infligent à nous et à la mère nature sont malheureusement irreversibles et nous ne les oublieront jamais. Qui sont-ils pour penser que la valeur de l’argent est plus importante que celle de l’être humain et de son environnement. Pour moi c’est un devoir envers les miens de crier mon opposition à tout celà. La destruction massive de notre mère la terre doit cesser car les conséquences en sont désastreuses. Que laisserons-nous à nos enfants ? Une chose est sûre, nous ne sommes pas des lâches. Nous nous battons pour des valeurs sûres, justes et ils en seront fiers. L’Etat ne peut en dire autant, car il en est pas à sa première erreur. Mes grands parents et mon père ont subis les memes erreurs à un’échelle differente et leur etait reproché à l’epoque le simple fait d’etre juifs et de vouloir protéger cette terre qui est la nôtre. Refusant de partir de leur terre pendant la guerre, ils en ont payé le prix fort. Fusillés par les collabos de l’époque devant mon père qui n’avait que 5 ans. Certaines choses ont changés mais le gouvernement lâche et hypocrite reste ferme devant les cris et les pleurs de ses enfants qu’il dit capricieux. Je pense que le caprice vient d’eux et que la Raison vient de notre passion et de notre amour pour ces nombreuses causes justes et défendables. Ils ne l’entendent pas de même et nous poussent dans l’illegalité et la rébellion. Ma peine est celle d’un être humain qui ne se soumet pas. Comme la vôtre. Faut-il pourtant subir ? Ma réponse est Non. Nous ne lâcherons rien. Car peu importe le temps , ce qui compte ce sont les messages et le résultat ainsi que les erreurs flagrantes que le peuple voit. Ne changez rien, reste comme vous êtes, libres ! Mes bottes me manquent, vous me manquez camarades et ami-e-s et je continue la lutte d’une autre manière. Grace à vous j’ai assez de contacts à l’exterieur pour me faire entendre. Cela fait plus de dix ans que je me bas pour differents causes. Je suis originaire de cette région et je le resterais malgré mon interdiction de séjourner dans le 44 pendant 2 ans. Sauf Avessac où j’ai acheté un petit corps de ferme que je rénove pour tous ceux qui aiment la nature et la liberté. Je suis tailleur de pierre et cela me plait. Ma lutte se fait aussi dans la musique depuis 12 années et passera ces messages grace à l’aide exterieure, étant à l’heure actuelle prisonnier. Je suis sur le projet d’un nouveau CD destiné à notre cause. Car il me semble nécessaire de faire passer ces messages. Je vous fais donc part du premier jet de la première chanson que je vous offre en espèrant votre participation future d’une verité qu’on nous demande de cacher. J’aimerais si possible que cette lettre ainsi que cette chanson soient mises sur Indymedia. Merci. Je compte sur vous et vous remercie tous pour le soutient que vous m’apportez et surtout pour cette cause juste. La terre de nos parents est la future terre de nos enfants, ne l’oublions pas. V.D.R et S

Je vous embrasse,

Cyril n°ecrou 57360 prison de Nantes

Cette chanson se fredonne comme un chant de pirate

ZAD PACIFISTE MAIS RESISTANTE

Refrain :

Nous ne sommes pas des criminelles, nous sommes des enfants Nous nous battons pour la terre et non pour l’argent Que laisserons-nous derrière pour tous ces enfants ? Surement pas une terre meurtrie depuis trop longtemps.

Nous ne pouvons plus nous taire car l’erreur est flagrante L’Etat reflète notre misère et en est conscient. Pousse l’humain à bout de nerfà cause des dirigeants. Dans une atmosphère austère et si méprisante.

Nous nous battons pour cette terre que nous aimons tant. Pour combattre cette misère nous restons devants. L’égalité sur cette terre n’est pas si flagrante. Regarder autour mes frères l’ampleur est dégradante.

Pour nos soeurs et pour nos frères même pour nos enfants. Le reflet d’une misère crée par tous ces gens. De finance et de guerre nous ’nous laisserons pas faire. En avant tous ensemble.

refrain

Que laisserons-nous derridère si ce n’est le temps de réparer cette terre qui nous offre tant. Nous ne sommes pas des criminels nous sommes des enfants tous issus de la même terre celle de nos parents .

N’ayons plus peur de nosu taire devant toute cette violence. Envers nous envers la mère qui nous rend vivant. Des cultures si diférents et enrichissantes. Pour combattre la misère qui est juste devant.

Allons marchons mes frères unis tous ensemble. Montrons leur ni peur ni souffrance car nous nous sommes fiers. De combattre vaillement mais pas pour la guerre. Pour un futur rayonnant résistons mes frères.

Que laisserons-nous à nos enfants sûrement pas la misère. Que le ministère comprenne que l’on ne peut se taire devant toute cette violence gratuite et volontaire nous ne pouvons nous taire.

Merci pout tout et continuez à vivre

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13 décembre 2012 4 13 /12 /décembre /2012 13:43

reçu de Taënia solium le 13 décembre

Le squat du Great-A a été expulsé aujourd'hui...
 V.
l'aventure continue :

- Vendredi 14 Décembre à la BAF : concert et resto : Delacave (new wave,
crest) + swamps (garage, Lyon) + Taulard (new wave, Grenoble)

-Vendredi 14 décembre au 102 : Madmoizel (freak new wave, Toulouse) + EDH
(darlelectropop, Paris) orga dalidark + resto vegan
one
 - Mardi 18 décembre: lokal autogéré : soirée Taenia Solium :
Taenia solium et quelques complices vous invitent au le Mardi 18 décembre
2012 au lokal autogéré (7 rue Pierre Dupont à Grenoble).
Pour un Apéro pour la sortie du cd des Derniers Sur Le Rap, pour la sortie
du premier numéro du fanzine collectif "Maximum Cuvette", et pour la
sortie du numéro 19 du nanozine (Le disque de Taulard sortira plus tard,
en janvier).
Supporte ta locale scène, viens à 19h pétantes.
Gratuit, miam-miam, glou-glou et concert des Derniers Sur Le Rap.
On pourra se procurer ces objets sur place.

- Mercr 19 déc: Antigone : fabrique du futur

- Mercr 19 déc : La BAF : proj New York 97

- Jeudi 20 déc : soirée sur la gentrification à Marseille à la BAF

- Vendr 21 déc : soirée fin du monde à Antigone

- Lundi 24 déc : Food Not Christ quelque part en ville et permanence
féministe + écoute radio + boom non mixte à la BAF

- vendredi 29 déc concert Great-A hors les murs quelque part !

En gros, le meilleur moyen d'être au courant de la vie anarchiste, c'est
grenoble.indymedia.org

- le lokal autogéré c'est au 7 rue pierre dupont à Grenoble.
www.lustucrust.org/localautogere_presentation.html

- Antigone c'est au 22 rue des violettes, à Grenoble
www.bibliothequeantigone.org/

- La BAF, 2 chemin des alpins, 38100 grenoble http://labaf.org

- le 102 / 102 rue d'alembert / grenoble le102.net/

- taenia solium est un label DIY : http://taenia-solium.net

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12 décembre 2012 3 12 /12 /décembre /2012 13:47
a lire aussi sur informa- azione
Turin : Solidarités, bananes et évasions

 

Il y a deux jours, un compagnon turinois a eu une plainte contre lui pour port d’armes et armes par destination et pour incitation à délinquance car dans les fruits (des bananes) qu’il amenait aux prisonniers du centre ont été découvertes de petites scies.


Les enquêteurs sont convaincus que cela devait servir à des évasions. Certains journaux précisent qu’il s’agirait d’un geste de solidarité (quelle perspicacité !) et ils évoquent une précédente évasion qui avait eu lieu en septembre et où les retenus avaient pu scier leurs barreaux. (…)

Toujours il y a deux jours, des compagnons sont allés perturber une conférence sur les droits humains dans les centres de rétention. La quarantaine de personnes a fort opportunément fait irruption pendant que s’exprimait le colonel de la Croix rouge militaire qui est en même temps responsable du CIE de Turin, Antonio Baldacci. (…)


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12 décembre 2012 3 12 /12 /décembre /2012 10:01

lu sur mondialisme.org

Comme tou­­jours, quand un cycle révolu­­tion­­naire atteint ses limi­­tes, c’est sur ces limi­­tes que prospère le cycle sui­­vant, qu’il s’agisse d’un cycle contre-révolu­­tion­­naire comme celui des années 1920-1930 succédant aux révolu­­tions russes et alle­­man­­des ou qu’il s’agisse d’un cycle de res­truc­­tu­­ra­­tion comme celui qui succède aux années 1960-1970. Dans les deux cas il procède par retour­­ne­­ment de ces limi­­tes à son profit.

La cri­­ti­­que et le mou­­ve­­ment de refus du tra­­vail ont ainsi été retournés au profit du capi­­tal. L’absentéisme et le turn over sont deve­­nus flexi­­bi­­lité et précarité. Les OS ont été en partie rem­­placés par des robots et les gran­­des for­­te­­res­­ses ouvrières ont été démantelées. La res­truc­­tu­­ra­­tion s’est faite à partir d’une orga­­ni­­sa­­tion en réseau qui mêle quel­­ques cen­­tres pro­­duc­­tifs « dégraissés » (reen­­ge­­ring). On est passé d’un tissu indus­­triel usi­­nier à l’entre­­prise-réseau.

La société du tra­­vail est arrivée à sa fin… et il n’y a pas à le regret­­ter, mais le rap­­port social capi­­ta­­liste n’a pas dit son der­­nier mot. Il essaie de com­­pen­­ser toute la masse de tra­­vail vivant devenu inu­­tile en trans­­for­­mant toute acti­­vité, y com­­pris celles qui res­­taient à sa marge, en emplois utiles (dévelop­­pe­­ment du tra­­vail « domes­­ti­­que » rétribué, de la garde d’enfants, du sec­­teur social, etc.). Il ne faut donc pas confon­­dre ines­­sen­­tia­­li­­sa­­tion de la force de tra­­vail et fin du tra­­vail.

La société capi­­ta­­lisée com­­bine ten­­dance à la valo­­ri­­sa­­tion sans le tra­­vail et main­­tien du tra­­vail comme dis­­ci­­pline, élément de domi­­na­­tion plus que d’exploi­­ta­­tion.

Qu’est-ce que le travail ?

Le tra­­vail est une acti­­vité séparée des autres acti­­vités humai­­nes. Elle n’est plus l’acti­­vité vitale qui exprime un cer­­tain rap­­port au monde en s’y incluant, mais un rap­­port à une nature deve­­nue extérieure. Cette acti­­vité tra­­vail mêle donc le double caractère d’être ten­­dance à la domi­­na­­tion sur cette nature et en même temps d’être l’expres­­sion d’une domi­­na­­tion des hommes sur d’autres hommes. Ce cadre est bien antérieur à l’exploi­­ta­­tion capi­­ta­­liste. La domi­­na­­tion, c’est ce qui est commun à toutes les for­­ma­­tions socia­­les y com­­pris celle du capi­­tal. Mais cette domi­­na­­tion prend la forme par­­ti­­culière de l’exploi­­ta­­tion de la force de tra­­vail libre dans le système capi­­ta­­liste et tout par­­ti­­culièrement dans la phase de domi­­na­­tion for­­melle du capi­­tal (de la première révolu­­tion indus­­trielle à 1914) et dans la première phase de la domi­­na­­tion réelle1 (années 1920/30). Ce n’est que dans ce cadre que le tra­­vail est placé au cœur des rap­­ports sociaux et que l’on a affaire à un « mode de pro­­duc­­tion », alors que dans les systèmes pré-capi­­ta­­lis­­tes, même si la majo­­rité de la popu­­la­­tion tra­­vaille, que le capi­­tal s’accu­­mule de façon pri­­mi­­tive et que la valeur se déploie, le tra­­vail se trouve encore inclus dans un ensem­­ble plus large de rap­­ports définis par des liens de dépen­­dance per­­son­­nels. Comme le disait Marx : les rap­­ports entre les hommes sont médiés par les choses, alors que le capi­­ta­­lisme se définit par des rap­­ports entre les choses médiés par des hommes. Il s’ensuit que la dis­­pa­­ri­­tion de la figure du bour­­geois ou même du capi­­ta­­liste moderne ne conduit pas auto­­ma­­ti­­que­­ment à la dis­­pa­­ri­­tion du tra­­vail comme l’ont montré a contra­­rio les exem­­ples de la révolu­­tion russe et de la guerre civile espa­­gnole d’un côté et l’avènement de la « société capi­­ta­­lisée » de l’autre.

Il ne s’agit donc pas de « libérer » le tra­­vail de son carcan capi­­ta­­liste, ce qui revien­­drait à ne cri­­ti­­quer le tra­­vail que sous sa forme de tra­­vail salarié et donc à faire du concept de tra­­vail (le « tra­­vail en général »), l’expres­­sion unique de son métabo­­lisme avec la nature2.

L’acti­­vité ne se cache pas non plus sous le tra­­vail dans la mesure où l’acti­­vité est aujourd’hui présente par­­tout en tant qu’acti­­vité en crise et acti­­vité de crise. Dans cette crise, les rap­­ports entre tra­­vail et acti­­vité se ren­­ver­­sent sans cesse : toute acti­­vité semble être trans­­formée en tra­­vail car rien ne doit échap­­per à la société capi­­ta­­lisée, mais le tra­­vail reste une oppor­­tu­­nité pour l’acti­­vité (per­­ru­­que, savoir-faire, inno­­va­­tions, inven­­tions, rela­­tions socia­­les) malgré le caractère d’aliénation propre au rap­­port social capi­­ta­­liste.

Si la crise de repro­­duc­­tion des rap­­ports sociaux est deve­­nue à ce point pro­­fonde, c’est que c’est le capi­­tal lui-même qui est aujourd’hui à la pointe de la remise en cause de la cen­­tra­­lité du tra­­vail. Sa pra­­ti­­que ne passe pas par une abo­­li­­tion cons­­ciente et totale du tra­­vail, mais par des trans­­for­­ma­­tions concrètes du procès de pro­­duc­­tion qui pro­­dui­­sent une ten­­dance à l’ines­­sen­­tia­­li­­sa­­tion de la force de tra­­vail, une ten­­dance à la valeur sans le tra­­vail par sub­s­ti­­tu­­tion du tra­­vail mort (capi­­tal fixe) au tra­­vail vivant (capi­­tal varia­­ble). Le tra­­vail n’étant plus au centre du procès de valo­­ri­­sa­­tion, il ne peut plus être cen­­tral au sein de la société capi­­ta­­lisée et ses reven­­di­­ca­­tions s’en trou­­vent délégitimées. Mais il la struc­­ture encore à tra­­vers les catégories du sala­­riat et ses valeurs telle la « valeur-tra­­vail » comme disent les diri­­geants poli­­ti­­ques qui confon­­dent le tra­­vail comme valeur idéolo­­gi­­que avec le tra­­vail comme pro­­duc­­teur de valeur matérielle. Comme dans toutes les périodes tran­­si­­toi­­res, gros­­ses de bou­­le­­ver­­se­­ments, l’ancien côtoie le nou­­veau.

Pour nous, le tra­­vail est pro­­duit his­­to­­ri­­que­­ment par la prédomi­­nance de la pro­­duc­­tion matérielle qu’impose, pour repren­­dre une for­­mule d’Adorno, un rap­­port de domi­­na­­tion à la nature extérieure et non pas un simple échange de sub­s­tance avec la nature. Cette acti­­vité prin­­ci­­pale centrée sur une prédomi­­nance de la pro­­duc­­tion matérielle induit la sépara­­tion d’avec les autres acti­­vités et la pos­­si­­bi­­lité de l’accu­­mu­­la­­tion d’un sur­­pro­­duit au-delà des besoins col­­lec­­tifs de la com­­mu­­nauté d’ori­­gine. C’est sur cette base que pro­­gres­­si­­ve­­ment l’acti­­vité tra­­vail va deve­­nir écono­­mie de la société et que les théories sur la valeur-tra­­vail et le tra­­vail pro­­duc­­tif s’élabo­­re­­ront au sein de ce que Marx a appelé la « domi­­na­­tion for­­melle du capi­­tal ». Dans cette phase, on peut dire que le tra­­vail vivant est vérita­­ble­­ment au centre des rap­­ports sociaux, même si évidem­­ment, il ne trouve son emploi que dans l’exis­­tence et la média­­tion de l’autre pôle du rap­­port social, à savoir la part du capi­­tal cons­­titué par le tra­­vail mort. Mais avec le pas­­sage à la « domi­­na­­tion réelle du capi­­tal » (dès 1933 aux États-Unis et à partir de 1945 en Europe, puis plei­­ne­­ment à partir de la fin des années 1960-70), le procès de valo­­ri­­sa­­tion tend à s’auto­­no­­mi­­ser du procès de tra­­vail. C’est sur cette base que la cri­­ti­­que du tra­­vail va pren­­dre une telle impor­­tance avec par exem­­ple les thèses situa­­tion­­nis­­tes et celles de la revue Socialisme ou Barbarie au niveau théorique, le mai 1968 français et le mou­­ve­­ment ita­­lien de refus du tra­­vail dans les gran­­des usines du nord de 1969 à 1973. Mais la théorie cri­­ti­­que n’étant jamais sus­­pen­­due en l’air, ce thème de la cri­­ti­­que du tra­­vail en général — et non pas sim­­ple­­ment du tra­­vail salarié — présup­­pose que le tra­­vail concret, le tra­­vail vivant, n’est plus la source essen­­tielle de valo­­ri­­sa­­tion.

Toutefois, cette angle d’atta­­que qu’a cons­­titué la cri­­ti­­que du tra­­vail ne doit pas faire oublier que ce qui est fon­­da­­men­­tal, en der­­nier res­­sort, c’est la cri­­ti­­que du capi­­tal en tant que tota­­lité, d’autant que la res­truc­­tu­­ra­­tion qui s’opère dans les entre­­pri­­ses à ce moment là comme le phénomène parallèle de glo­­ba­­li­­sa­­tion/mon­­dia­­li­­sa­­tion, mar­­quent une avancée dans un pro­­ces­­sus de tota­­li­­sa­­tion que nous per­­ce­­vions mal à l’époque.

Travail et pratiques anti-travail

Aujourd’hui, la pra­­ti­­que anti-tra­­vail est l’expres­­sion d’une sub­­jec­­ti­­vité par­­ti­­culière qui, en tant que telle, n’a pas plus d’effet sur les rap­­ports sociaux qu’une pra­­ti­­que condui­­sant, malgré tout, à essayer de bien faire son tra­­vail, au moins dans les périodes qui n’offrent pas de pos­­si­­bi­­lité de passer à autre chose. Cette contra­­dic­­tion est présente dès le début du mou­­ve­­ment révolu­­tion­­naire comme on peut le voir dans l’oppo­­si­­tion entre anar­­chis­­tes indi­­vi­­dua­­lis­­tes et anar­­cho-syn­­di­­ca­­lis­­tes. Mais la posi­­tion anti-tra­­vail d’indi­­vi­­dus comme Darien ou Libertad reste mino­­ri­­taire car elle s’affirme à contre cou­­rant his­­to­­ri­­que du pro­­ces­­sus qui trans­­forme les prolétaires des « clas­­ses dan­­ge­­reu­­ses » en ouvriers. Cette cri­­ti­­que est donc énoncée de l’extérieur du rap­­port social capi­­ta­­liste tel qu’il est en train de s’affir­­mer à l’époque sur la base du rap­­port de dépen­­dance entre capi­­tal et tra­­vail. C’est ce qui en fera la radi­­ca­­lité tout en en limi­­tant la portée pra­­ti­­que. C’est cette même extériorité qui caractérise la cri­­ti­­que anti-tra­­vail que mène l’Internationale Situationniste dans les années 1960. Critique externe parce qu’elle ne surgit direc­­te­­ment ni de la théorie com­­mu­­niste, ni des pra­­ti­­ques de lutte de clas­­ses de l’époque. Elle les anti­­cipe par une ana­­lyse plus large des contra­­dic­­tions du capi­­tal et de rap­­ports sociaux en train d’être révolu­­tionnés par l’uti­­li­­sa­­tion des techno-scien­­ces, de la com­­mu­­ni­­ca­­tion etc.

Si cette cri­­ti­­que rede­­vient pos­­si­­ble et audi­­ble après plus d’un demi-siècle d’idéologie marxiste forcenée du tra­­vail, ce n’est pas prin­­ci­­pa­­le­­ment du fait qu’elle trouve un écho dans une petite frange de la jeu­­nesse ouvrière ou étudiante de l’époque, mais parce que le rap­­port social capi­­ta­­liste a com­­mencé sa propre cri­­ti­­que du tra­­vail. La cri­­ti­­que sub­­jec­­tive trouve ici ses condi­­tions objec­­ti­­ves. On voit donc resur­­gir, parallèlement, même si c’est un peu plus tar­­di­­ve­­ment, Lafargue et son Droit à la paresse et l’utopie d’une auto­­ma­­tion totale, rendue pos­­si­­ble par un haut degré d’accu­­mu­­la­­tion, prémisse d’une fin du tra­­vail en tant qu’acti­­vité aliénée. La posi­­tion de l’IS à cet égard n’est pas différente de celle des autres cou­­rants marxis­­tes de l’époque : le progrès tech­­ni­­que est glo­­rifié parce que nous sommes tou­­jours dans la croyance en la libération ou la désaliénation par le Progrès. L’idéologie de l’auto­­ma­­tion de l’IS est fondée là-dessus3.

Dans les grou­­pes infor­­mels aux­­quels je par­­ti­­cipe à l’époque4, la cri­­ti­­que anti-tra­­vail est rat­­tachée aux pra­­ti­­ques prolétarien­­nes (absentéisme et sabo­­ta­­ges, grèves dures sans reven­­di­­ca­­tions par­­ti­­culières qui sont cou­­ran­­tes dans la première moitié des années 1970). De plus, cette cri­­ti­­que est reliée, au niveau théorique, à l’idée d’auto-négation du prolétariat. C’est la ten­­ta­­tive la plus avancée, à l’époque, pour essayer de résoudre, au moins au niveau théorique, la fameuse contra­­dic­­tion dans laquelle Debord et l’IS sont tombés, à savoir d’un côté porter la cri­­ti­­que du tra­­vail à son plus haut niveau (« Ne tra­­vaillez jamais ») et de l’autre faire l’apo­­lo­­gie des conseils ouvriers.

Comprendre la pro­­duc­­tion du capi­­tal comme rap­­port social contra­­dic­­toire impli­­que de refu­­ser une démarche du type ou/ou (tra­­vail ou paresse par exem­­ple) car le tra­­vail étant une com­­po­­sante du rap­­port social capi­­ta­­liste, affir­­ma­­tion et négation coexis­­tent dans le même indi­­vidu prolétaire.

Le refus du tra­­vail ne peut donc être une ligne de démar­­ca­­tion car ce n’est ni une posi­­tion (c’est l’expres­­sion d’une sub­­jec­­ti­­vité), ni une reven­­di­­ca­­tion, ni une action précise (comme l’abo­­li­­tion du tra­­vail dans la révolu­­tion). C’est un mou­­ve­­ment de révolte his­­to­­ri­­que­­ment situé, une forme concrète de lutte de clas­­ses, mais conjonc­­tu­­relle. C’est la radi­­ca­­li­­sa­­tion de ce mou­­ve­­ment qui seule aurait pu créer les condi­­tions révolu­­tion­­nai­­res et l’auto-négation du prolétariat vers la com­­mu­­nauté humaine (une « révolu­­tion à titre humain5 »). En son absence, le mou­­ve­­ment va refluer rapi­­de­­ment parce que ce n’est pas une posi­­tion col­­lec­­tive tena­­ble.

Le refus du tra­­vail n’est pas un élément de la cons­­cience de classe, car celle-ci com­­prend l’affir­­ma­­tion du tra­­vail comme puis­­sance poten­­tielle de la classe pro­­duc­­tive, capa­­cité à trans­­for­­mer le monde. Le refus du tra­­vail en tant que négation est rup­­ture avec ce pro­­ces­­sus d’affir­­ma­­tion et ne se développe que dans les moments de crise de la repro­­duc­­tion des rap­­ports sociaux. C’est pour cela que la contro­­verse de l’époque entre J. Zerzan (le refus du tra­­vail comme désir radi­­cal) et Ch. Reeves (le refus du tra­­vail comme expres­­sion d’un rap­­port de force favo­­ra­­ble) reste vaine si on ne saisit l’oppo­­si­­tion qu’au niveau théorique, alors qu’elle expri­­mait un point de bas­­cu­­le­­ment de l’Histoire : vers l’abo­­li­­tion du capi­­tal et du tra­­vail par les prolétaires ou vers la fin de la cen­­tra­­lité du tra­­vail pour le capi­­tal6.

Nous savons aujourd’hui qui a gagné, au moins pro­­vi­­soi­­re­­ment, mais comme à toute chose mal­­heur est bon, il y a au moins un avan­­tage à la situa­­tion actuelle, c’est que le tra­­vail ne peut plus s’y affir­­mer, ni en tant que porté par une classe ni en tant qu’essence ou mesure de la valeur. L’ancienne contra­­dic­­tion, interne au prolétariat, entre affir­­ma­­tion et négation devient cadu­­que. L’affir­­ma­­tion du tra­­vail qui cons­­ti­­tuait en partie la classe ouvrière s’est dis­­soute dans la désin­­dus­­tria­­li­­sa­­tion, les luttes pour la retraite, la résigna­­tion au tra­­vail-revenu cons­­ti­­tu­­tive de l’indi­­vidu-salarié indifférencié. Il n’y a plus de place pour une vision mes­­sia­­niste du prolétariat comme classe à qui il aurait été attribué la double tache d’une indus­­tria­­li­­sa­­tion pro­­gres­­siste en col­­la­­bo­­ra­­tion avec la bour­­geoi­­sie et d’une révolu­­tion prolétarienne anta­­go­­ni­­que au capi­­tal.

Il n’y a donc plus d’iden­­ti­­fi­­ca­­tion abso­­lue à un tra­­vail qui aurait une posi­­ti­­vité en soi, mais prise de dis­­tance et c’est ce qui est poten­­tiel­­le­­ment sub­­ver­­sif. Cette mise à dis­­tance qui dépasse la ques­­tion du tra­­vail (salarié ou non) et qui fait que l’indi­­vidu ne se confond jamais avec l’objet de son acti­­vité est jus­­te­­ment ce qui définit l’humain et fait sa spécifi­­cité, mais elle n’apparaît pas en continu. Cette propriété de l’humain est aussi ce qui permet de com­­pren­­dre le mystère de la par­­ti­­ci­­pa­­tion au tra­­vail. Le tra­­vail n’est pas que domi­­na­­tion et exploi­­ta­­tion ; s’il est bien défini par le fait d’être une acti­­vité aux ordres, il est aussi expérimen­­ta­­tion, savoir-faire et par­­fois même pas­­sion de l’acti­­vité. Bien sûr, plus on s’éloigne du tra­­vail de type arti­­sa­­nal et pour tout dire des formes concrètes du tra­­vail, plus cet aspect devient secondaire ou dis­­paraît, même s’il per­­dure dans la cons­­cience ouvrière d’une œuvre col­­lec­­tive.

Du point de vue de la clarté du lan­­gage il vau­­drait mieux faire la dis­­tinc­­tion entre la valeur-tra­­vail (ou exac­­te­­ment la théorie de la valeur-tra­­vail) et l’idéologie du tra­­vail comme valeur, sinon on occulte l’aspect écono­­mi­­que et objec­­tif de la chose et on ne peut com­­pren­­dre que l’une ne va pas sans l’autre, qu’il ne s’agit pas d’un masque. Obnubilé par la représen­­ta­­tion (le fétichisme) et le résultat sur le marché (la mar­­chan­­dise), cer­­tains centrés sur la forme-valeur et le tra­­vail abs­­trait qui en serait le contenu, oublient que le point de départ, c’est l’acti­­vité de trans­­for­­ma­­tion de la nature extérieure à tra­­vers la pro­­duc­­tion matérielle, mais pas seu­­le­­ment des condi­­tions moder­­nes d’exis­­tence, au sein de rap­­ports sociaux déterminés qui ne font l’objet que d’une contes­­ta­­tion idéolo­­gi­­que. Sinon on ne com­­pren­­drait pas pour­­quoi le tra­­vailleur libre du capi­­ta­­lisme conti­­nue­­rait à tra­­vailler si le tra­­vail n’est que tri­­pa­­lium. Le salaire ne représente en effet qu’une dimen­­sion de l’affaire et quand les tra­­vailleurs de Continental, Arcilor-Mittal et d’ailleurs, avan­­cent que pour­­tant ils sont encore pro­­duc­­tifs et utiles, ce n’est pas essen­­tiel­­le­­ment parce qu’ils espèrent convain­­cre leurs patrons ou l’État, mais parce qu’ils croient encore en la théorie de la valeur-tra­­vail (ce sont eux qui pro­­dui­­raient tou­­jours et dans les mêmes pro­­por­­tions, la richesse sociale) et au tra­­vail comme valeur par rap­­port à la spécula­­tion, à l’abo­­mi­­na­­ble finance etc. Ils n’ont pas saisi la racine du procès d’ines­­sen­­tia­­li­­sa­­tion de la force de tra­­vail. Néanmoins, ils ne peu­­vent plus affir­­mer le tra­­vail et c’est pour cela qu’ils hésitent moins à employer des méthodes de lutte en rap­­port avec leur déses­­poir. Un déses­­poir de tra­­vailleurs qui se définis­­sent encore prin­­ci­­pa­­le­­ment par leur tra­­vail alors qu’ils sont amenés à ne plus tra­­vailler ou pour cer­­tains, à occu­­per un emploi qui ne leur apparaît plus comme un tra­­vail, mais comme une simple acti­­vité de survie ou un job7.

Poser un au-delà du tra­­vail qui s’appuie seu­­le­­ment sur la force de la négation c’est repar­­tir sur les mêmes bases que dans la période précédente. C’est encore buter sur la ques­­tion de l’acti­­vité, des rap­­ports sociaux, toutes choses qui ne se posent pas uni­­que­­ment en terme de négation comme le montre le dévelop­­pe­­ment actuel de pra­­ti­­ques alter­­na­­ti­­ves les­­quel­­les ne se rédui­­sent pas à du pur réfor­­misme.

On ne peut sauver la place cen­­trale des pro­­duc­­teurs dans le pro­­gramme prolétarien en appe­­lant à une unité entre pro­­duc­­teurs et consom­­ma­­teurs. Cela cor­­res­­pond peut être à un pro­­gramme révolu­­tion­­naire qui a ins­­crit à son fron­­ton théorique : « abo­­li­­tion de toutes les sépara­­tions », mais qu’est-ce que cela peut bien vou­­loir dire si on est d’accord pour reconnaître jus­­te­­ment que le capi­­tal a, en ten­­dance, sup­­primé les pro­­duc­­teurs et uni­­fier son pro­­ces­­sus ? Là encore on ne peut pas pla­­quer les recet­­tes du pro­­gramme prolétarien sur une situa­­tion qui n’est plus celle de la lutte des clas­­ses entre tra­­vail et capi­­tal. C’est la thèse de l’auto-négation du prolétariat qui est cadu­­que. Cette thèse, fon­­da­­men­­ta­­le­­ment a-clas­­siste et donc impos­­si­­ble à tenir à partir d’un dis­­cours clas­­siste, le devient encore plus à partir du moment où le capi­­tal a englobé l’anta­­go­­nisme entre les clas­­ses, à partir du moment où c’est lui qui cher­­che à nier la dépen­­dance récipro­­que entre les deux pôles du rap­­port social, bref, à s’auto-présup­­po­­ser comme le montre aujourd’hui le rôle du capi­­tal fictif8 comme auto-présup­­po­­si­­tion du profit (A-A’ tend à se réaliser sans passer par A-M-A’).

Il y a problème dès qu’on pro­­jette un pro­­gramme sans tenir compte des chan­­ge­­ments et donc des condi­­tions dont il faut partir. On retrouve ce problème quand cer­­tains posent la ques­­tion de l’appro­­pria­­tion de la richesse pro­­duite. La société capi­­ta­­lisée ne se caractérise plus par ce que Marx appe­­lait une gigan­­tes­­que accu­­mu­­la­­tion de mar­­chan­­di­­ses. Aujourd’hui ce qui s’accu­­mule, ce sont de plus en plus des choses non appro­­pria­­bles qui posent la ques­­tion de leur usage. C’est parce que nous ne sommes plus dans le cadre de la prédomi­­nance de la pro­­duc­­tion matérielle et le schéma de la dia­­lec­­ti­­que des clas­­ses, que « l’expro­­pria­­tion des expro­­pria­­teurs » et le « Rien n’est à eux tout est à nous » ne sont que des slo­­gans pour révolu­­tion­­nai­­res pro­­fes­­sion­­nels et non pas des outils d’inter­­ven­­tion poli­­ti­­que. Ainsi, la réacti­­va­­tion du mot d’ordre de « prise sur le tas », n’a littérale­­ment aucun sens en dehors de celui d’une ponc­­tuelle action de pillage dans une révolte spon­­tanée. Ce n’est qu’action et non pas praxis.

Sur cette base on ne peut que retom­­ber sur une des ques­­tions parmi les plus obs­­cu­­res de la théorie de Marx : celle des besoins et in fine celle de l’utilité sociale. Je ne dévelop­­pe­­rai pas ici ce que pour­­rait être une dia­­lec­­ti­­que besoins/désirs, mais le débat est ouvert avec les immen­­ses ques­­tions qu’il porte aussi bien quant aux rap­­ports avec la nature extérieure qu’avec la nature intérieure. D’ailleurs, beau­­coup de choses qui n’étaient utiles que par rap­­port à la logi­­que du capi­­tal dis­­paraîtront contrai­­re­­ment à ce sem­­blent penser le cou­­rant « com­­mu­­ni­­sa­­teur ». La ques­­tion se pose pour l’acti­­vité humaine sous toutes ses formes. 

La crise du travail

La crise du tra­­vail est double :

– elle est crise de la loi de la valeur, c’est-à-dire cadu­­cité de la mesure de la valeur par le temps de tra­­vail, quand le tra­­vail vivant devient ines­­sen­­tiel dans le pro­­ces­­sus d’ensem­­ble de la création de valeur. C’est un mou­­ve­­ment que Marx avait déjà lar­­ge­­ment anti­­cipé dans les Grundrisse et par­­ti­­culièrement dans son « Fragment sur les machi­­nes  ». Toutefois, cette anti­­ci­­pa­­tion entrant en contra­­dic­­tion avec tout son dévelop­­pe­­ment sur le « néces­­saire » accrois­­se­­ment de ce même tra­­vail pro­­duc­­tif au sein du capi­­tal et sur son poten­­tiel objec­­ti­­ve­­ment révolu­­tion­­naire, Marx enterra cette vision et en revînt à la théorie ricar­­dienne de la valeur-tra­­vail.

– elle est crise du tra­­vail comme valeur. Elle s’expri­­mait dans les années 1967-1973 par des luttes et pra­­ti­­ques de refus du tra­­vail, dans un cycle de luttes révolu­­tion­­nai­­res concer­­nant l’ensem­­ble des pays occi­­den­­taux. Mais depuis le retour­­ne­­ment de ce cycle dans la crise qui s’amorce au milieu des années 1970, ce sont les res­truc­­tu­­ra­­tions indus­­triel­­les et leurs conséquen­­ces sur les rap­­ports sociaux qui pro­­dui­­sent une vérita­­ble cri­­ti­­que pra­­ti­­que du tra­­vail. Elle s’accom­­pa­­gne d’un mou­­ve­­ment contra­­dic­­toire : en ten­­dance le tra­­vail n’est plus au centre de la société capi­­ta­­lisée, mais sous la forme de l’emploi, il reste ce qui définit les sta­­tuts et les droits des indi­­vi­­dus. Cette contra­­dic­­tion est bien rendue par plu­­sieurs phénomènes tels que : l’ambiguïté du slogan d’Agir contre le chômage (AC) : « Le tra­­vail est un droit, le revenu est un dû ». La décla­­ra­­tion de Jospin contre l’assis­­ta­­nat pen­­dant la lutte des chômeurs de 1998 en France, la vogue de l’idéologie blai­­riste au sein de la social-démocra­­tie européenne, les décla­­ra­­tions de Sarkozy et Royal pen­­dant les présiden­­tiel­­les de 2007 visant à remet­­tre le tra­­vail comme valeur au centre de la société expri­­ment une ten­­dance forte à main­­te­­nir le tra­­vail comme idéologie et valeur en l’absence de toute résolu­­tion pra­­ti­­que de la ques­­tion. Simulation de situa­­tions de tra­­vail, trai­­te­­ment social du chômage, retour au tra­­vail forcé par la sup­­pres­­sion ou la dégres­­si­­vité de diver­­ses allo­­ca­­tions sont les moyens employés pour réaliser ce tour de force du main­­tien d’une société du tra­­vail sans tra­­vailleurs comme H. Arendt le signa­­lait déjà.

Dans ce contexte qui est à la fois déréali­­sa­­tion du tra­­vail vivant concret dans des emplois où triom­­phent acti­­vités vir­­tuel­­les et idéologie du tra­­vail afin de jus­­ti­­fier une repro­­duc­­tion en l’état des rap­­ports sociaux, il devient dif­­fi­­cile de conti­­nuer à parler en termes de rap­­ports de force pour signi­­fier que per­­dure la lutte des clas­­ses. En effet il y a des rap­­ports de force qui révèlent un anta­­go­­nisme his­­to­­ri­­que­­ment irréduc­­ti­­ble entre les clas­­ses et des rap­­ports de force autour des­­quels se tis­­sent des modes de régula­­tion, se pas­­sent des com­­pro­­mis his­­to­­ri­­ques. Déjà à l’époque des Trente glo­­rieu­­ses, la crois­­sance et le progrès social qui lui était associé, repo­­sait bien sur l’exploi­­ta­­tion forcenée des ouvriers spécialisés peu qua­­lifiés (OS d’ori­­gine pay­­sanne ou immigrée), mais aussi sur un accès généralisé à la consom­­ma­­tion. Le mode de régula­­tion for­­diste consis­­tait en un échange de haus­­ses de pro­­duc­­ti­­vité contre des haus­­ses du pou­­voir d’achat dans le cadre du par­­tage de la valeur ajoutée, échange ponctué de négocia­­tions et même de conflits contrôlés par les syn­­di­­cats pour des ajus­­te­­ments néces­­sai­­res au moment des renou­­vel­­le­­ments de conven­­tions col­­lec­­ti­­ves ou pour l’échelle mobile des salai­­res. Ce com­­pro­­mis d’ordre global n’a pas empêché que se dévelop­­pent de gran­­des luttes d’OS dans tous les pays indus­­tria­­lisés occi­­den­­taux.

Ces rap­­ports de force por­­teurs d’anta­­go­­nis­­mes fon­­da­­men­­taux ou le plus sou­­vent de com­­pro­­mis méritaient encore le voca­­ble « rap­­ports de force » car ces forces étaient concentrées et peu ou prou agis­­san­­tes, mais les précaires d’aujourd’hui ne sont pas les OS d’hier et les luttes d’hier ne sont pas celles d’aujourd’hui. Le contexte général est plus favo­­ra­­ble aux entre­­pri­­ses, mais c’est sur­­tout le caractère anta­­go­­ni­­que qui a du mal à s’expri­­mer à partir du moment où jus­­te­­ment la crise du tra­­vail et l’ines­­sen­­tia­­li­­sa­­tion de la force de tra­­vail met­­tent à mal l’ancien anta­­go­­nisme des clas­­ses et la lutte des clas­­ses elle-même. « L’épreuve de force » n’est plus envi­­sagée que de manière loca­­liste, désespérée, par exem­­ple au niveau d’une usine menacée de fer­­me­­ture. C’est une résis­­tance qui peut être forte comme chez Continental et d’autant plus forte qu’elle ne s’illu­­sionne pas sur les pos­­si­­bi­­lités de sauver l’emploi. En effet, la lutte se concen­­tre sur le fait de mon­­nayer la valeur d’une force de tra­­vail deve­­nue inem­­ploya­­ble. Mais c’est une résis­­tance isolée.

Cette crise du tra­­vail est reportée en pre­­mier lieu sur une partie de la force de tra­­vail, celle qui est rendue surnuméraire de façon abso­­lue soit par la déqua­­li­­fi­­ca­­tion et la dévalo­­ri­­sa­­tion par le progrès tech­­ni­­que des ancien­­nes qua­­li­­fi­­ca­­tions définies par le col­­lec­­tif de tra­­vail (la com­­mu­­nauté des clas­­ses dans le tra­­vail qui liait tra­­vail vivant et capi­­tal tech­­ni­­que) au profit de nou­­vel­­les compétences déterminées par le seul patro­­nat ou l’État et attribuées à titre indi­­vi­­duel, alors qu’une autre partie, jugée essen­­tielle — mais pour com­­bien de temps ? — parce que mieux formée et plus poly­­va­­lente est peu ou prou assi­­milée à du capi­­tal en tant que « res­­source humaine ». En second lieu, elle est reportée aussi sur le capi­­tal global dont le représen­­tant au niveau natio­­nal est l’État, chargé de redis­­tri­­buer les riches­­ses. C’est 1a façon qu’à l’État, de répondre à la reven­­di­­ca­­tion de « par­­tage de riches­­ses » et d’arbi­­trer entre différentes solu­­tions qui toutes doi­­vent tenir compte du fait que le revenu se détache de plus en plus du tra­­vail réel effectué. Dans cette mesure, le « salaire mini­­mum » n’est plus depuis long­­temps, le prix de la repro­­duc­­tion de la force de tra­­vail. Seillères, l’ex patron du MEDEF, le déclare sans fio­­ri­­ture : « Les employeurs paient les salai­­res que le marché impose ; si 1a société estime que ce n’est pas assez pour vivre, qu’elle complète ! ». La « prime pour l’emploi » va dans ce sens car elle s’oppose à la fois au crédit d’impôt de la droite liber­­ta­­rienne appliqué aux États-Unis et à la reven­­di­­ca­­tion d’un revenu mini­­mum uni­­ver­­sel reven­­diqué par les gau­­ches alter­­na­­ti­­ves. Elle n’est donc pas une ten­­ta­­tive de mobi­­li­­sa­­tion pro­­duc­­tive (de sur­­va­­leur) des chômeurs ten­­dant à dis­­sou­­dre le précariat dans le work­­fare. L’échec du RSA va dans le même sens : s’il joue son rôle d’assis­­tance avec l’aug­­men­­ta­­tion du nombre d’allo­­ca­­tai­­res, il ne joue pas son rôle d’inci­­ta­­tion au tra­­vail parce que 60% des per­­son­­nes qui pour­­raient le faire jouer en complément d’un tra­­vail précaire n’effec­­tuent pas les for­­ma­­lités pour en bénéficier.

Crise du travail et précariat

La notion fourre-tout de « précaire » prend une dimen­­sion de plus en plus idéolo­­gi­­que, comme on peut le voir avec l’idée d’une cen­­tra­­lité du précariat9. Cela se mani­­feste de deux façons :

– premièrement, les chif­­fres sta­­tis­­ti­­ques des flux de main d’œuvre (entrants et sor­­tants) sont privilégiés par rap­­port à ceux des stocks (fixes-garan­­tis)), pour­­tant ces der­­niers sont net­­te­­ment plus nom­­breux en valeur abso­­lue. Sous prétexte que les flux seraient aujourd’hui majo­­ri­­tai­­re­­ment précarisés, il en décou­­le­­rait que ce mou­­ve­­ment est irréduc­­ti­­ble et donc qu’à terme, c’est toute la force de tra­­vail qui se retrou­­ve­­rait dans cette situa­­tion, indi­­quant par là une nou­­velle régula­­tion des rap­­ports de tra­­vail et une nou­­velle uni­­fi­­ca­­tion des sta­­tuts par le bas. Cela conduit aussi à assi­­mi­­ler les jeunes, les femmes et les immigrés à une figure majeure de la popu­­la­­tion dont la caractéris­­ti­­que serait d’être précaire. C’est igno­­rer que les jeunes diplômés même s’ils met­­tent aujourd’hui plus de temps à trou­­ver un tra­­vail stable et cor­­res­­pon­­dant à leur niveau d’études qu’hier, ne peu­­vent être confon­­dus avec les 20% de jeunes qui sor­­tent sans aucun diplôme ou qua­­li­­fi­­ca­­tion du système sco­­laire ; c’est oublier aussi que le niveau de diplôme et de qua­­li­­fi­­ca­­tion des femmes aug­­mente de façon conti­­nue ; c’est oublier enfin que pour les immigrés de seconde ou troisième génération la mobi­­lité sociale ascen­­dante n’est pas un vain mot. Il ne faut pas confon­­dre générali­­sa­­tion du précariat et main­­tien de formes de dis­­cri­­mi­­na­­tion à l’embau­­che.

– deuxièmement cela conduit à asso­­cier abso­­lu­­ment flexi­­bi­­lité et précarité comme s’il s’agis­­sait d’une évolu­­tion unilatérale des sta­­tuts alors que les pra­­ti­­ques d’absentéisme et de turn over dans les années 1960-1970 comme le recours des jeunes au tra­­vail intérimaire et plus générale­­ment à l’inter­­mit­­tence du tra­­vail aujourd’hui prou­­vent que ces formes représen­­tent aussi une résis­­tance au tra­­vail salarié. Certains aspects du mou­­ve­­ment des inter­­mit­­tents du spec­­ta­­cle vont dans ce sens, même s’il ne faut pas le mythi­­fier et en faire le modèle de conquête d’une nou­­velle auto­­no­­mie, celle du salarié du cogni­­ta­­riat comme nou­­velle figure du tra­­vail des années 2000. Du côté patro­­nal les choses ne sont pas fixées non plus. La majo­­rité actuelle du patro­­nat français sou­­haite une « refon­­da­­tion » sociale remet­­tant en cause les types actuels de contrats de tra­­vail en vue d’une meilleure flexi­­bi­­lité, mais ce projet pro­­vient de per­­son­­na­­lités qui ne sont pas issus du monde de l’indus­­trie, mais plutôt de la finance ou des assu­­ran­­ces. À l’inverse, les syn­­di­­cats patro­­naux de la métal­­lur­­gie et de l’indus­­trie lourde cher­­chent plutôt à inves­­tir dans la res­­source humaine, alors que de leur côté, les PME/PMI qui sont pour­­tant les plus gros­­ses consom­­ma­­tri­­ces de main d’œuvre précaire, sou­­hai­­te­­raient atti­­rer dura­­ble­­ment des salariés, sans avoir les moyens (condi­­tions de tra­­vail, sta­­tuts et salai­­res) de les fidéliser.

– enfin, troisièmement, à mas­­quer la divi­­sion objec­­tive qui sépare les salariés, mêmes précaires, des chômeurs et par­­ti­­culièrement des chômeurs de longue durée et des laissés pour compte du sala­­riat. Cette ten­­dance trouve son actua­­li­­sa­­tion dans des slo­­gans tels celui des Occupy de New-York : « Nous sommes les 99 % », comme si une classe d’exploités et de dominés s’était recom­­posée suite à la déstruc­­tu­­ra­­tion et à l’ato­­mi­­sa­­tion de l’ancienne classe ouvrière.

Ces sim­­pli­­fi­­ca­­tions s’accom­­pa­­gnent d’une vision tra­­di­­tion­­nelle et datée de l’État comme simple super­­s­truc­­ture dépen­­dant d’une infra­s­truc­­ture écono­­mi­­que qui lui échap­­pe­­rait de plus en plus dans le cadre de la glo­­ba­­li­­sa­­tion/mon­­dia­­li­­sa­­tion. C’est oublier qu’il n’y a pas que le capi­­tal qui se res­truc­­ture, mais aussi un État-nation qui se mue en État-réseau au sein d’un hyper-capi­­ta­­lisme du sommet10. On retrouve ici notre schéma des 3 niveaux exposé dans le no 15 de Temps cri­­ti­­ques et dans le livre Après la révolu­­tion du capi­­tal. La direc­­tion du MEDEF est le représen­­tant du niveau 1 et ne représente pra­­ti­­que­­ment plus les intérêts du capi­­tal indus­­triel en tant que tel sans pour cela représenter les intérêts d’un capi­­tal finan­­cier « déconnecté » de « l’écono­­mie réelle ». II ne défend les intérêts par­­ti­­cu­­liers d’une frac­­tion du patro­­nat que dans la mesure où ils s’ins­­cri­­vent dans les objec­­tifs de la gou­­ver­­nance stratégique fixée au niveau 1. Ces objec­­tifs ten­­dent vers l’uni­­fi­­ca­­tion glo­­bale du capi­­tal au sein d’une stratégie mon­­diale qui n’empêche pas la concur­­rence tout en fai­­sant la part belle aux oli­­go­­po­­les. Tout doit être fluide, de la mon­­naie jusqu’à la force de tra­­vail puis­­que la pro­­duc­­tion par le tra­­vail vivant n’est plus considérée que comme une prémisse du procès d’ensem­­ble. De 1a même façon qu’on par­­lait avant des « faux frais » de la pro­­duc­­tion on ne parle déjà plus de la pro­­duc­­tion par le tra­­vail vivant que comme d’une acti­­vité comme une autre au sein de « la chaîne de création de valeur ».

L’État et la gestion de la reproduction des rapports sociaux

Les objec­­tifs de l’État sont très glo­­baux : repro­­duc­­tion des rap­­ports sociaux et cohésion sociale d’un côté, assu­­rer les meilleu­­res condi­­tions pos­­si­­bles au dévelop­­pe­­ment écono­­mi­­que et à la compétiti­­vité des entre­­pri­­ses de l’autre. C’est ce qui différencie le représen­­tant du capi­­tal global de chaque capi­­tal par­­ti­­cu­­lier, fut-il une firme mul­­ti­­na­­tio­­nale. En effet, l’État doit mener les deux opérations de front alors que pour­­tant cha­­cune exerce une contrainte sur l’autre. Ce n’est pas le cas de chaque capi­­tal par­­ti­­cu­­lier qui essaie, depuis les res­truc­­tu­­ra­­tions de ces vingt dernières années, de s’éman­­ci­­per de la première contrainte, en la ren­­voyant soit sur ses concur­­rents (la recher­­che de la compétiti­­vité-prix) soit sur l’État (soli­­da­­rité natio­­nale et trai­­te­­ment social du chômage).

Dans cette lec­­ture, la « prime pour l’emploi » n’est pas un cadeau fait aux patrons, comme on peut le lire un peu par­­tout dans les jour­­naux d’extrême gauche. Elle peut effec­­ti­­ve­­ment leur pro­­fi­­ter dans le cas où les chômeurs ne seraient plus pris en charge au sein du système assu­­ran­­ciel lié au sala­­riat (coti­­sa­­tions et char­­ges socia­­les contre pres­­ta­­tions), mais par un système de soli­­da­­rité natio­­nale financé par l’impôt. Toutefois, dans ce cas, elle pro­­fi­­te­­rait aussi aux salariés. Dans les deux cas, l’avan­­tage tiré est bien indi­­rect. Ce n’est pas le but de cette opération. Il s’agit d’une stratégie poli­­ti­­que qui prend en compte la cadu­­cité de la loi de la valeur et les sim­­pli­­fi­­ca­­tions abu­­si­­ves qui se cachent derrière les théories de l’exploi­­ta­­tion. Elle cher­­che donc à diver­­si­­fier ses réponses en fonc­­tion de l’écla­­te­­ment des références et des sta­­tuts pro­­duit par la révolu­­tion du capi­­tal :

– d’un côté, en s’adres­­sant majo­­ri­­tai­­re­­ment à ceux qui sont dans le cir­­cuit du tra­­vail, à un degré ou un autre, cette stratégie s’ins­­crit dans le refus de l’État de cau­­tion­­ner un système d’assis­­tance aux pau­­vres supposés oisifs. Il faut récom­­pen­­ser le salarié-pauvre bien méritant en lui mon­­trant que d’abord il a tout intérêt à conti­­nuer à tra­­vailler et qu’ensuite, de toute façon, il n’a pas le choix.

– d’un autre côté, pour­­tant, cette res­truc­­tu­­ra­­tion n’unifie pas davan­­tage une classe de salariés enfin deve­­nue homogène comme dans l’ancienne pers­­pec­­tive de la « moyen­­ni­­sa­­tion », mais elle redis­­tri­­bue les inégalités aussi bien au niveau ver­­ti­­cal et hiérar­­chi­­que de la propriété et du tra­­vail (ce qui prévaut n’est plus forcément l’oppo­­si­­tion propriétaire des moyens de pro­­duc­­tion/non-propriétaires mais plutôt l’oppo­­si­­tion diri­­geants/exécutants11) qu’au niveau hori­­zon­­tal (inclus/exclus du tra­­vail, du loge­­ment, des papiers, des échan­­ges). C’est aussi la manière qu’à la société capi­­ta­­lisée, d’expri­­mer la fin d’une société de clas­­ses dont le modèle d’ori­­gine fondé sur l’oppo­­si­­tion entre deux blocs mono­­li­­thi­­ques fina­­le­­ment ras­­su­­rant quand ces blocs-clas­­ses pra­­ti­­quent la coexis­­tence paci­­fi­­que, laisse place à la peur d’une nou­­velle « ques­­tion sociale ». Il n’est donc pas éton­­nant que le Pouvoir y réponde par l’antienne de remet­­tre le tra­­vail au centre de la société, mais d’un tra­­vail qui ne gar­­de­­rait que sa fonc­­tion de dis­­ci­­pline ou de compétition et non plus sa fonc­­tion pro­­duc­­tive qui devient acces­­soire. Les domi­­nants ont bien cons­­cience que tout cela ne peut ren­­trer dans le cadre strict du sala­­riat. La nou­­velle idéologie du tra­­vail se détache donc chaque jour un peu plus de la réalité du tra­­vail salarié comme elle s’était déjà détachée de la figure du tra­­vail pro­­duc­­tif, pour recou­­vrir tout type de tra­­vail et lais­­ser penser que le tra­­vail peut rede­­ve­­nir « libre » dans l’idéal de « monter sa boîte » et la figure du « gagneur ». Le « tra­­vailler plus pour gagner plus » de Sarkozy en est déjà une ver­­sion diluée par les désillu­­sions des vingt années précédentes (l’ère Tapie).

À l’époque où la valo­­ri­­sa­­tion s’effec­­tuait essen­­tiel­­le­­ment par le tra­­vail vivant, la sur­­va­­leur pro­­duite à l’aide de ce der­­nier était fon­­da­­men­­tale et la dimen­­sion « sociale » du système de sala­­riat n’était qu’induite. Pour toute une frange de surnuméraires poten­­tiels, aujourd’hui c’est la situa­­tion inverse qui prédomine : les « for­­te­­res­­ses ouvrières » sur­­vi­­van­­tes (par exem­­ple dans l’auto­­mo­­bile) finis­­sent à peine de dégrais­­ser que les nou­­veaux sec­­teurs (ban­­ques, assu­­ran­­ces et infor­­ma­­ti­­que) licen­­cient déjà à tout va. Pour repro­­duire les rap­­ports sociaux il faut alors créer des emplois dont, il y a quel­­ques temps encore, il ne serait venu à per­­sonne l’idée de les appe­­ler du tra­­vail.

La dis­­ci­­pline du tra­­vail doit s’impo­­ser quand le tra­­vail vivant n’a plus de valeur mesu­­ra­­ble en temps de tra­­vail (com­­ment déter­­mi­­ner sa part dans la création de valeur ?) ou en valeur intrinsèque (quel est le niveau de salaire équi­­va­­lent à la repro­­duc­­tion de la force de tra­­vail aujourd’hui pour rester dans la problémati­­que marxiste ?), quand les iden­­tités de classe et les iden­­tités pro­­fes­­sion­­nel­­les dis­­pa­­rais­­sent et qu’il ne reste plus que la course aux reve­­nus et la résis­­tance à l’ato­­mi­­sa­­tion sociale.

Cette dis­­ci­­pline passe par de nou­­vel­­les règles, dont le pacte pour un retour à l’emploi (PARE) nous four­­nit un exem­­ple. Mais ces règles doi­­vent rester poli­­ti­­que­­ment com­­pa­­ti­­bles avec l’idée de bien commun, de cohésion sociale et autres bali­­ver­­nes consen­­suel­­les. Il en va du dévelop­­pe­­ment de cette nou­­velle forme de capi­­ta­­lisme qui donne l’impres­­sion de vou­­loir s’éman­­ci­­per de toute contrainte, mais qui en même temps ne le peut pas car elle doit conti­­nuer à se présenter sous l’appa­­rence d’une légiti­­mité supérieure requérant l’adhésion active ou pas­­sive du plus grand nombre à l’idéologie de l’entre­­prise-société protégée par l’exis­­tence, en der­­nier recours, de l’État.

Il y a bien une ten­­ta­­tive de « refon­­da­­tion sociale », mais à l’état de projet, sans rien de défini­­tif. C’est la différence avec l’époque des clas­­ses. Il n’y a plus de projet au sens fort, c’est-à-dire s’accom­­pa­­gnant d’une cer­­taine Weltanschauung (pour la bour­­geoi­­sie) ou d’un sens millénariste (pour le prolétariat). Il ne faut donc pas élabo­­rer des fic­­tions sur un grand ordon­­na­­teur qui tire­­rait les ficel­­les à partir d’un « plan du capi­­tal », ce qui ne veut pas dire non plus qu’il fau­­drait alors se réfugier dans une vision struc­­tu­­ra­­liste fai­­sant la part belle au « capi­­tal-auto­­mate ».

Tout cela doit nous amener à être très modeste quant à la vérité et à la portée heu­­ris­­ti­­que de nos ana­­ly­­ses12.

La ques­­tion de la dis­­ci­­pline du tra­­vail et par le tra­­vail n’est pas, comme je l’ai dit précédem­­ment, une réponse directe aux pra­­ti­­ques anti-tra­­vail. Cette dimen­­sion répres­­sive du tra­­vail n’était cepen­­dant pas absente pen­­dant et immédia­­te­­ment après la période des années 1960-1970. Mais la défaite du der­­nier assaut prolétarien ainsi que le pro­­ces­­sus d’ines­­sen­­tia­­li­­sa­­tion de la force de tra­­vail13 qui s’est ren­­forcé dans la période ultérieure des res­truc­­tu­­ra­­tions, don­­nent un autre sens à la crise actuelle du tra­­vail. Comme le disait Marx, « le mort saisit le vif », avec une ten­­dance à la domi­­na­­tion du tra­­vail mort sur le tra­­vail vivant et un pro­­ces­­sus de sub­s­ti­­tu­­tion capi­­tal/tra­­vail qui n’a pris toute son ampleur que depuis la fin du XXème siècle. Mais que le tra­­vail vivant ne soit plus vrai­­ment au cœur de la pro­­duc­­tion, cela ne signi­­fie pas que le tra­­vail en tant que valeur soit mort. En tout cas, dans le doute beau­­coup veu­­lent le rani­­mer. C’est là qu’on retrouve la dimen­­sion dis­­ci­­pli­­naire dans la variété des posi­­tions tra­­vaillis­­tes, que ce soit celles de Blair et Brown, du PS ou de la CFDT. Aujourd’hui, tout le dis­­cours qui prétend remet­­tre le tra­­vail au centre de la société vise à dis­­ci­­pli­­ner la force de tra­­vail poten­­tiel­­le­­ment sans emploi et celle dont le tra­­vail n’est jus­­te­­ment qu’un emploi, un job. Il vise aussi à une remo­­ra­­li­­sa­­tion des salariés alors que tous les signaux envoyés par la société capi­­ta­­lisée met­­tent en lumière non pas une société du tra­­vail, mais générali­­sa­­tion des pra­­ti­­ques de prédation, de cap­­tage et de rente.

Pour conclure

On est passé d’un mou­­ve­­ment de cri­­ti­­que du tra­­vail a des com­­por­­te­­ments indi­­vi­­duels de refus qui peu­­vent s’expli­­quer par le peu d’intérêt (dans tous les sens du terme) que représente le fait de tra­­vailler ; la dif­­fi­­culté qu’il y a à trou­­ver un tra­­vail quand on ne cor­­res­­pond pas au modèle de l’employa­­bi­­lité. Malgré des posi­­tions plus radi­­ca­­les et plus théorisées telles celles du groupe CARGO en France ou celles des Chômeurs heu­­reux en Allemagne, ce qui prédomine, c’est une cri­­ti­­que pas­­sive ou des actions ponc­­tuel­­les comme celles des comités de chômeurs en France en 1998, comme le montre encore la ten­­dance domi­­nante à désamor­­cer des conflits pos­­si­­bles par plans sociaux suc­­ces­­sifs (aujourd’hui encore en Italie par exem­­ple avec des plans de pré-retrai­­tes négociés avant l’arrivée au pou­­voir du gou­­ver­­ne­­ment d’experts de M. Monti).

La limite des pra­­ti­­ques anti-tra­­vail des années 1960-1970 et les erreurs d’interprétation qui s’en sont sui­­vies, c’est de n’avoir appréhendé le tra­­vail que comme aliénation (la « cri­­ti­­que artiste » dont par­­lent Boltanski et Chiapello) et exploi­­ta­­tion (la cri­­ti­­que ouvrière marxiste) et non pas comme une contra­­dic­­tion de l’acti­­vité humaine (le tra­­vail en général comme contra­­dic­­tion de l’acti­­vité générique14). Nous n’avons donc perçu le déclin de ces pra­­ti­­ques que comme retour­­ne­­ment contre-révolu­­tion­­naire d’un cycle révolu­­tion­­naire qui s’ache­­vait, sans tenir compte du fait que la situa­­tion antérieure ne se repro­­dui­­rait plus. En effet, les cycles analysés par Marx où révolu­­tion et contre-révolu­­tion se succédaient sont aujourd’hui inopérants parce que le rap­­port social capi­­ta­­liste a réussi à englo­­ber ses deux pôles, le capi­­tal et le tra­­vail, en détrui­­sant les sour­­ces ori­­gi­­nel­­les des anta­­go­­nis­­mes de clas­­ses et par­­ti­­culièrement la dépen­­dance récipro­­que entre les deux pôles. La société capi­­ta­­lisée s’auto­­no­­mise de son rap­­port social dans la mesure où son pôle capi­­tal a ten­­dance à s’auto-présup­­po­­ser sans son pôle tra­­vail et cela aussi bien à tra­­vers une anti­­ci­­pa­­tion ex ante du profit15 en fonc­­tion de toute la chaîne de valeur et non plus sim­­ple­­ment de la valeur-tra­­vail ; qu’à tra­­vers sa finan­­cia­­ri­­sa­­tion et l’évanes­­cence de la valeur16.

La cri­­ti­­que du tra­­vail est main­­te­­nant l’œuvre du capi­­tal lui-même. Certes le tra­­vail sub­­siste encore, comme l’entre­­pre­­neur capi­­ta­­liste d’ailleurs, mais à l’état de résidu dont on ne sait quoi faire. Il n’est plus moteur dans la création de la valeur. Il est tra­­vail-fonc­­tion dans un système d’attri­­bu­­tion des reve­­nus. Le stade actuel atteint par la contra­­dic­­tion, c’est que le revenu est de plus en plus socia­­lisé, de moins en moins lié à un tra­­vail concret exercé, mais qu’il doit encore s’ins­­crire dans le sala­­riat sous peine de blo­­cage de sa logi­­que.

 

Jacques Wajnsztejn

 

 

Notes

1 – Sur cette dis­­tinc­­tion, cf. K. Marx : Le sixième cha­­pi­­tre inédit du capi­­tal, éd. Bourgois, coll. « 10/18 ».

2 – C’est toute l’ambiguïté de Marx dans les Manuscrits de 1844 qui représen­­tent à la fois une cri­­ti­­que de l’aliénation dans le tra­­vail et une défini­­tion du tra­­vail comme essence de l’homme en tant qu’acti­­vité générique, au-delà donc de ses formes par­­ti­­culières.

3 – Pour une cri­­ti­­que de cette posi­­tion on peut se référer à J.-P. Mandosio : Dans le chau­­dron du négatif, éd. de l’Encyclopédie des Nuisances, 2003 et D’or et de sable, même éditeur, 2008.

4 – Ils se rat­­ta­­chent de façon cri­­ti­­que aux cou­­rants des gau­­ches com­­mu­­nis­­tes ger­­mano-hol­­lan­­daise ou ita­­lienne, même si cer­­tains indi­­vi­­dus sont plutôt issus de l’anar­­chisme.

5 – Cf. le titre du no 13 de la revue Temps cri­­ti­­ques, 2003.

6 – Le texte de Zerzan : « Un conflit décisif, les orga­­ni­­sa­­tions syn­­di­­ca­­les com­­bat­­tent la révolte contre le tra­­vail » est tra­­duit et repro­­duit dans Échan­­ges de décembre 1975 avec la réponse de Reeves.

7 – Cf. le no 12 de Temps cri­­ti­­ques (hiver 2001) et plus par­­ti­­culièrement mon arti­­cle : « Néo-lud­­disme et résis­­tan­­ces ouvrières », p. 16-26.

8 – Cf. le no 15 de Temps cri­­ti­­ques et Après la révolu­­tion du capi­­tal, éd. L’Harmattan, 2007.

9 – Ce point a été par­­ti­­culièrement développé par le cou­­rant néo-opéraïste autour de Lazzarrato et Negri, dans la revue Futur antérieur. Nous en avons fait une cri­­ti­­que dans « Sur deux méprises à propos des inter­­mit­­tents du spec­­ta­­cle », Temps cri­­ti­­ques, no 14, p. 70-71.

10 – À ce sujet on peut se repor­­ter aux numéros 15 et 16 de Temps cri­­ti­­ques.

11 – Cf. le rôle joué par le dévelop­­pe­­ment des stock-options et des bonus dans ce schéma d’une « désala­­ri­­sa­­tion » par­­tielle par le haut.

12 – Si on prend par exem­­ple l’ana­­lyse de la loi sur les 35 heures, bien malin aujourd’hui qui pour­­rait en lire les effets à moyen terme. Si on regarde ce qui se passe à La Poste, cela a entraîné la création d’un nombre très impor­­tant de CDI, mais avec une aggra­­va­­tion des condi­­tions de tra­­vail pour cer­­tai­­nes catégories (les fac­­teurs et le problème des same­­dis, flexi­­bi­­lité accrue avec semaine de quatre jours ou quatre jours et demi dans les bureaux… mais avec rigi­­dité accrue dans la prise et la fin de poste !). Où est la lisi­­bi­­lité de tout cela ?

13 – II ne s’agit pas de savoir com­­bien il y a de tra­­vailleurs pro­­duc­­tifs, si le nombre baisse ou aug­­mente, en France ou dans le monde, abso­­lu­­ment ou rela­­ti­­ve­­ment, comme il est envi­­sagé dans les dis­­cus­­sions entre marxis­­tes, mais de voir que cette force de tra­­vail devient périphérique dans la pro­­duc­­tion de valeur, ines­­sen­­tielle donc, seule posi­­tion qui peut per­­met­­tre de faire immédia­­te­­ment le lien, au niveau théorique, entre lutte des salariés et luttes des chômeurs.

14 – C’était pour­­tant la voie tracée par Marx dans ses Manuscrits de 1844.

15 – L’exem­­ple le plus sou­­vent cité est celui du taux de retour sur inves­­tis­­se­­ment qui est attendu (autour de 15%) qui contraint les entre­­pri­­ses dont le taux de profit tourne sou­­vent autour de 5%, à faire les efforts néces­­sai­­res pour réduire le différen­­tiel, y com­­pris en licen­­ciant du per­­son­­nel.

16 – Cf. J. Guigou et J. Wajnsztejn, L’évanes­­cence de la valeur, éd. L’Harmattan, 2004.

 

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12 décembre 2012 3 12 /12 /décembre /2012 09:40

lu sur le sitesur le site de la ZAD (zone à défendre). et copié collé

Texte de la prise de parole à la manif NO TAV du 3 décembre à Lyon. Ce texte n’a pu être lu en l’état du fait de la répression que la plupart d’entre nous ont subi ce jour là.

Amis d’ici, amis d’ailleurs

A SARA DURA !!!

L’écho de ce cri de colère et de révolte poussé depuis la vallée a résonné jusqu’au bocage de Notre Dame des Landes.

Pendant les trois ans du mouvement d’occupation, nous étions nombreuses à avoir les yeux braqués sur la vallée, à fantasmer la puissance du mouvement populaire qui s’y déployait.

Aujourd’hui, nous arrivons ici portées par l’énergie folle de sept semaines de résistance sur la ZAD, portées par l’élan d’un mouvement de lutte qui a éclot pendant ces semaines de conflits.

L’aéroport n’est plus un projet, un monstre de papier, c’est une réalité matérielle et humaine : c’est nos maisons détruites, c’est la forêt éventrée par les chenilles des machines, c’est nos amies blessées et emprisonnées. L’idée d’un mouvement contre l’aéroport et son monde n’est plus un rêve porté par quelques habitantes isolées dans le bocage, c’est une vague de résistance en acte qui déferle, nous emporte et nous dépasse.

La ZAD n’a jamais été aussi vivante :

- l es reconstructions fleurissent de toute part
- le ravitaillement spontané opère comme une magie qui nous submerge de bouffe et de matos, précédant nos besoins
- les barricades apparaissent et disparaissent dessinant une mystérieuse et sublime géographie mouvante de l’auto-défense territoriale....

Plus la lutte se renforce et se durcit dans le bocage, et plus elle se répand au delà du territoire. « La valle sulla citta » proclamait le mouvement NOTAV en février dernier alors que la résistance prenait la forme de blocages, d’occupations et de manifs dans dans une flopée de métropoles italiennes...

« ZAD partout » peut-on désormais lire sur les murs de nombreuses ville en France. Plus d’une soixantaine de comités locaux organisent des actions diverses et répandent ainsi le conflit. Les formes sont multiples et sans cesse renouvelées : sabotages solidaires, occupations de mairies, blocage d’un pont sur le periph de Nantes par les paysans et leurs tracteurs, ect...

De nouvelles présences sur la zone dessinent une nouvelle architecture de l’occupation. Présences paysannes et usage défensif des tracteurs, allers-retours de collectifs qui s’organisent depuis leurs villes respectives, implication sans précédent des gens du coin.

Sur son propre terrain, la lutte a déjà vaincu un ennemi bien plus fort que le projet d’aéroport : elle a été capable de réduire les distances entre nous, de subvertir les rôles et d’abolir en partie les frontières entre : gens du coin et gens d’ailleurs, entre association citoyennes et formes d’auto-organisation et d’action directe, entre squatteureuses percues comme marginales et salariées perçues comme respectables.

La lutte c’est des personnes en tout genre qui nous aident à remplir des sacs de projectiles en nous soufflant « Mettrez leur en plein la gueule »  !

La lutte c’est un paysan exproprié qui passe devant les tribunaux pour avoir balancé des bouteilles sur les flics et regrette devant le juge … de ne pas les avoir blessés ! La lutte c’est un gars du bourg qui vient avec sa tronçoneuse sur la barricades, sourire aux lèvres !

La lutte c’est des centaines de personnes qui crient « Vinci dégage résistance et sabotage ! »

La lutte c’est des milliers de personnes qui forment une immense chaine humaine pour constuire des cabanes en forêt !

La lutte c’est des dizaine de tracteurs enchainés les uns aux autres pour protéger un lieu d’organisation collective surgi de terre en quelques jours !

La lutte c’est des élus dépassé par le mouvement et contrains à l’action directe pour se redonner une légitimité...

« Siammo tutti black block » scandait la foule rageuse au Val di Susa. « Il n’y a aucun groupuscule d’anarchiste dangereux, c’est nous tous le groupuscule, les 30 000 personnes que nous sommes, main dans la main.. ; On a pas peur de le dire, nous paysans on va les prendre les pierres et les bâtons » proclame soudain le porte parole de l’ACIPA.

Si nous sommes venus à Lyon aujourd’hui, c’est que LGV et aéroport sont les deux fragments d’un même monde que nous combattons et rêvons d’abolir. Le bocage comme la vallée sont défigurés par la même logique de métropolisation, traversés par les mêmes flux, soumis au même impératif absurde de la Vitesse. Au-de-là de la France et de l’Italie, d’Atenco au Mexique aux luttes contre les projets de mines ou de barrage, au Brésil, ces luttes débordent les frontières de l’Europe ; parce que le pouvoir cherche à imposer partout la logique de métropolisation.

LVG aéroport, tram-train, centrale à gaz, mine de charbon, stade de foot, centrale nucléaire, THT, éoliennes industrielles, lotissement HQE : Contre toutes ces infrastructures qui aménagent nos territoire, contrôle nos vies  !

Comme l’écrivent nos camarades de Milan ces infrastructures « c’est la concrétisation faite de ciment, d’acier et d’uniformes bleus, d’une conception du monde qui nous est absolument étrangère »

Alors que la lutte contre l’aéroport prend une ampleur insoupçonnée, nous voulons que la visibilité qu’elle a acquise et que l’énergie qui s’y déploie rejaillissent sur toutes les luttes contre l’aménagement du territoire... Ces luttes participent de la même révolte contre le pouvoir  ! Ce mouvement qui s’organise à la base, n’est pas soluble dans les tentatives de représentation, de négociation, de pacification et de récupération.

Lutter contre le quadrillage du territoire par les infrastructures, ce n’est pas seulement porter des coups contre la métropole. On se retrouve dans une lutte contre cet aéroport mais immédiatement, on rêve de l’usage collectif de ces terres, on imagine d’autres manière d’habiter cet espace, d’autre manières d’habiter ce monde. Lutter contre l’aéroport, c’est aussi susciter des désirs de sécession, c’est aussi effleurer la possibilité d’espaces autonomes, vivre la possibilité de la Commune.

Au début de l’opération César, la préfecture déclarait « Si la république ne parvient pas à reprendre la zone, alors il faut s’inquiéter pour la république ». Aujourd’hui à Lyon, nous lui répondons :

« Semons la zone pour faire trembler la république »

A SARA DURA, ANCHE IN FRANCIA !!!!

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11 décembre 2012 2 11 /12 /décembre /2012 23:01

photo et video transmise par anar-info

No Tav. Alle reti e sull’autostrada

8 dicembre 2012. A sette anni dalla presa di Venaus il popolo No Tav è ancora in marcia.

 

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11 décembre 2012 2 11 /12 /décembre /2012 09:37

La lutte des no tav i de ce côté des Alpes ne peut cheminer dans les sentiers sans penser à ceux qui luttent ici notament  ceux de la ZAD à notre dame des landes.

Quelques dizaines de personnes en lutte contre les expulsions à Notre-Dame-des-Landes, à Pacé et ailleurs ont interrompu le conseil municipal de Rennes ce lundi 10 décembre. Une personne a lu aux élus l’avis de leur expulsion de l’Hôtel de ville :

Monsieur le Maire,
Monsieur le président de Rennes Métropole
Monsieur le président de l’Assemblée des communautés de France,
Messieurs et Mesdames les élus du Parti Socialiste,

Nous savons combien il est important pour vous d’écouter, d’entendre ce qu’ont à dire les citoyens, nous vous savons soucieux de « concertation citoyenne », de « démocratie participative », nous savons que pour vous il est important pour que la démocratie vive que les gens prennent la parole et s’expriment. La parole nous la prenons et nous aimerions qu’elle soit écoutée. Un peu de calme s’il vous plaît.

Si nous sommes venus ici ce soir dans cet Hôtel de ville, c’est pour vous ordonner de le quitter, de prendre vos affaires et de sortir dans le calme. Les affaires que vous ne pourrez pas emporter avec vous, vous les récupérerez plus tard ou alors vous les trouverez à la déchetterie aux heures d’ouvertures habituelles. Le peuple a pris sa décision et si vous avez des remarques à faire, un bureau des plaintes sera ouvert en temps et en heures voulus.

Vous n’avez plus rien à faire ici.

Comment osez-vous d’ailleurs continuer à faire comme si vous représentiez qui que ce soit, comme si vous représentiez le peuple ? Le peuple, c’est nous. Le peuple, il est à Notre-Dame-des-Landes en train de se faire matraquer, en train de se prendre des éclats de métal dans les jambes, des éclats de métal dans la figure, des tirs à bout portant. Votre camarade de l’Internationale socialiste Ben Ali n’avait pas votre savoir-faire en termes de répression des mouvements populaires.

Et combien Vinci vous paye pour commander ce sale boulot ? Combien ? Et le fric que Vinci vous file, vous le mettez où ? Sur des comptes en Suisse ou à Shanghai ?

Nous sommes le peuple et nous vous demandons de quitter ces lieux dans le calme. Les affaires que vous ne pourrez pas emporter avec vous, vous les récupérerez plus tard ou alors vous les trouverez à la déchetterie aux heures d’ouvertures habituelles.

Le peuple, il vit dans ces squats que vous expulsez au petit matin. Le peuple, ce sont ces étrangers que vous mettez à la rue pendant que vous construisez vos hôtels de luxe à 5 ou 6 étoiles. Le peuple, il est Place Sainte-Anne et vous le virez de là parce que les hommes d’affaires, les chefs d’entreprise, les cadres supérieurs de votre Centre des congrès, ils ne viendront pas s’il y a trop de pauvres place Sainte-Anne. Il faut d’abord nettoyer la place et c’est que vous êtes en train de faire. Dans la grande compétition des métropoles, le peuple fait mauvais genre sur la photo. Alors on l’expulse de là.

Le peuple, ce sont ces sans-papiers qui tentent de survivre et dont vous signez les arrêts de mort, que vous traquez parce que dans ce domaine un Valls vaut bien un Sarkozy.

Le peuple ce sont ces chômeurs et ces précaires que vos milices de la BAC tabassent devant les Champs Libres un soir de décembre.

Le peuple, il vit dans ces squats que vous dévitalisez, comme vous le dites si bien, parce que mieux vaut détruire une maison plutôt que la laisser être habitée par ceux qui en auraient besoin. Comment osez-vous vous dire encore de gauche ? Combien de temps cette mascarade va-t-elle encore durer ? Ainsi donc, c’est vous la gauche et Sarkozy, c’était la droite ? Avez-vous donc l’esprit confus à ce point pour croire à cette mystification ? Dans quel monde vivez-vous donc ? Dans le monde merveilleux de DSK, l’ex-futur candidat de la Gauche ? Les ors de la République vous ont-ils donc rendus aveugles à ce point ?

Pour nous, il ne fait aucun doute qu’un kyste vaut bien un Karcher et ses racailles. Si nous sommes un kyste, qu’êtes-vous donc sinon des parasites qui n’avez rien à faire dans cet Hôtel de ville ? Rendez-le au peuple. Allez donc vivre dans vos hôtels de luxe !

Veuillez quitter ces lieux dans le calme et emporter vos affaires. Celles que vous ne pourrez pas emporter vous les trouverez à la déchetterie aux heures d’ouverture habituelles.

Des personnes en lutte contre les expulsions à Notre-Dame-des Landes, à Pacé et ailleurs…

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11 décembre 2012 2 11 /12 /décembre /2012 09:04

Le laboratoire anarchique de valence lutte pied à pied contre les mensonges qui nous divisent. Soledad reste toujours dans la lutte Ce qui nous permet de remettre en mémoire aux compagnon(ne)sune réalité contre les prisons et son monde. ce texte a été trouvé sur non fidesqui a publié aussi un autre texte très important pour revenir dan la lutte no tav

 

Avec l’édition de la présente brochure, nous avons l’intention de faire connaître la lutte menée récemment par quelques prisonniers anarchistes contre l’État dans diverses parties du monde, en utilisant la grève de la faim, initiative qui a duré du 20 décembre 2009 au 1er janvier 2010 (exceptés Marco Camenish et Gabriel Pombo Da Silva qui ont commencé la grève le 18 décembre en solidarité avec les prisonnières turques et en mémoire de toutes les personnes assassinées dans les geôles de ce pays).


La particularité de cette grève a résidé, d’un côté, en ce qu’il ne s’agissait pas d’une lutte pour obtenir de meilleures conditions de détention ni pour avancer des réclamations légales pour la "liberté" des engeôlés, mais comme l’a très bien exprimé Gabriel :

"Il n’y a pas de points revendicatifs, c’est un appel, un geste d’amour, un appel à la lutte et à continuer de lutter … nous ne voulons pas de prisons avec des barreaux en or, nous voulons détruire les prisons, mais pour détruire les prisons nous avons aussi à détruire le système et la société carcérale… C’est un appel clair à la lutte, à la lutte révolutionnaire, nous ne voulons pas qu’ils nous donnent plus de nourriture ou plus de douches et plus de travail, nous voulons détruire toute cette saloperie… commençons par le petit nombre que nous sommes, essayons de la diffuser à d’autres compagnons ; si nous étions dans la rue il est évident que nous n’utiliserions pas la grève de la faim, nous serions en première ligne, brûlant ou pillant ou que sais-je encore … nous ne perdrions pas notre temps ici, la seule chose qui nous reste maintenant à offrir réside dans un geste digne pour les compagnons qui sont tombés dans la lutte, en particulier Mauricio Morales… et pour tant de personnes qui sont tombées en empruntant ce chemin … pour se souvenir d’elles dignement. Et cela signifie donc avoir un peu faim certes, mais en même temps se sentir partie d’un collectif d’individualités…".

D’une autre part la réponse à l’appel à l’offensive de l’autre côté des murs a été, du moins dans le contexte latino-américain, particulièrement forte, tant dans l’intensité que dans la continuité, compte-tenu surtout du temps pendant lequel la grève s’est déroulée.

Une initiative qui n’était rien de plus qu’un appel à la guerre, à se souvenir des compagnons tombés au combat (Mauricio Morales, Zoé) ou assassinés par l’État dans ses centres d’extermination (Agustín Rueda, Soledad Rosas, Paco Ortiz, Salvador Puig Antich, Xóse Tarrío …), et qui ne pouvait que se diffuser dans les rues sous la forme d’actions directes, qui démontrent la valeur réelle des insurgés aux quatre coins de la planète, et qui maintiennent vivante la possibilité réelle de vivre l’anarchie.

Il revient aux compagnons emprisonnés de faire leur bilan/analyse de ce qu’a signifié cette grève, nous pouvons quand à nous parler de ce que nous sentons dans notre réalité la plus concrète …

À ce qu’il semble, une bonne partie des anarchistes latino-américains ont décidé d’approfondir leurs attaques et d’initier une offensive plus concrète et intense, en sortant de la torpeur des assemblées, des processions de cour martiale encadrées à l’intérieur de la marge du tolérable par le système, et de l’équivoque des logiques de soutien et de distanciation avec les frères et soeurs emprisonnées.

Nous croyons avoir parfaitement démontré l’efficacité de l’organisation informelle entre des individualités partageant une volonté subversive, au-delà de l’utilisation ou non d’acronymes ou de sigles.

Des symboles de l’État, du capital, des intérêts de la police, ont été attaqués, incendiés, criblés de balles. Cela sans aucun comité central ni bureaucratie qui ordonnerait ou pas d’exécuter des actions, qui assignerait des tâches, comme beaucoup de charognards de la presse en rêvent, et en rejetant de la même façon comme obsolètes et dangereuses les structures statiques et formelles (parfois semi-formelles) des vieilles fédérations, pour ne citer qu’un exemple.

Nous désirons que l’on comprenne l’organisation informelle comme moyen de communication et de mise en commun des pratiques entre anarchistes et autres réfractaires, pour porter en avant les actions qui tendent à détruire l’actuel état des choses, qui tendent vers la révolution, sans nécessiter des réunions hebdomadaires ni de grands documents rédigés en commun sous un consentement toujours destructeur de l’individualité, qui reste à nos yeux le moteur principal de la volonté dans la lutte pour la liberté.

Nous entendons l’affinité de la même façon.

Quand la rage, l’amour, la dignité, sont supérieures à la peur et à la certitude que le quotidien nous offre, quand nous ne permettons à aucun charlatan et autre professionnel de l’attente et de la manipulation (dont certains tiennent des discours radicaux) de nous apaiser, et lorsque nous comprenons que l’action est la seule façon pour nous d’ouvrir une brèche dans ce merdier, alors nous sommes capables d’agir comme nous le désirons, d’être une communauté d’individualités libres, solidaires et anti-hiérarchiques.

Dans ce sens la multiplicité des attaques, allant de paire avec la diffusion et la propagande décentralisées, nous permettent d’augurer une perspective satisfaisante pour la pratique insurrectionnelle dans le contexte du cône sud, voir même dans toute l’Amérique latine.

Il est naturel aussi que, dans la mesure où la perspective anarchiste se renforce et prend de l’ampleur dans cette guerre sociale, l’ennemi en fera de même par la répression, ce qui est somme toute une réaction attendue devant laquelle nous devrions éviter d’adopter des postures de victimes (un exemple de cela nous est fourni par ce qui se passe au Chili et au Mexique, où des compagnons sont emprisonnés sous de lourdes charges).

Cela nous invite aussi à nous préparer et à être à la hauteur, en apprenant de situations qui, bien qu’elles se soient produites dans un autre contexte (l’Italie, l’Espagne), nous servent à tirer quelques conclusions, étant donné que les sbires des diverses nations utilisent eux aussi l’internationalisme à l’heure de réprimer la dissidence réelle (l’instruction menée par le bourreau Marini et la collaboration du FBI avec l’État chilien le démontrent suffisamment).

Avec ce rappel, nous incitons à la prudence mais pas à l’inaction, à aiguiser notre projectualité et nos perspectives, pour frapper l’ennemi au visage, et enfin l’abattre. À être préparés et décidés.

Les temps à venir seront sans doute durs, des temps de délation peut-être, de piège et de trahison, mais ce sont des temps qui méritent aussi d’être vécus, et cela vaudra toujours plus que l’attitude de l’énorme masse de zombis qui se promènent devant les vitrines des grandes villes, enfermée dans ses prisons, faisant appel à ses propres bourreaux…

L’affinité réelle, la fraternité entre exploités, se constitue quand d’un côté comme de l’autre nous nous reconnaissons comme prisonniers en guerre (comme des deux côtés il y a aussi les autres, les résignés, les légalistes et autres collaborateurs).

Que jamais ne s’éteignent les feux de la révolte, ni ne cessent les actions vengeresses pour nos frères assassinés ou emprisonnés, telle est notre tâche.

Que nous réussissions aussi à sortir de la spirale action / réaction, c’est notre désir, pour lequel nous donnons tout …

Prisonniers en guerre… Liberté !

Quelques anarchistes.
Buenos Aires, janvier 2010.

Introduction de la brochure La venganza de Prometeo, janvier 2010, traduit de l’espagnol.
PDF - 1.3 Mo
La vengeance de Prométhée
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11 décembre 2012 2 11 /12 /décembre /2012 08:15

lu sur rebelyon.infos on publie en rectifiant un mensonge ( Non Soledad n'est pas été retrouvée morte chez ellemais dans la résidence surveillée( sic) . Je ne supporterais jamais ce mensonge machiste. il existe de très beaux textes écrits en prison par Sole.

 

Rien n’arrête les No-TAV : Après la bataille du lundi 3 décembre  à lyon. La victoire à la pyrus  de  l'état français, nous tous qui lundi 3 décembre à lyon on subit le mépris . Nous sommes capable de dire non à tous ces autoritaires .No  TAV toujours et la lutte continue de ce côté du chantier   Ce n'est pas la police qui nous divisera.!Sara dura!!!

vive l'anarchie!!!

 

« Et ça conti­nue encore et encore... »

Ce samedi 8 décem­bre 2012, avait lieu une jour­née d’action No-TAV du coté ita­lien. Pourquoi ce jour ? Parce que depuis plu­sieurs années, le 8 décem­bre est deve­nue une date emblé­ma­ti­que de la puis­sance que peut déployer le mou­ve­ment No-TAV. Cette date cor­res­pond à l’anni­ver­saire de la reprise du cam­pe­ment de Venaus par des dizai­nes de mil­liers d’habi­tants de la vallée en 2005. « Reprise » car ce camp No-TAV, mis en place à l’époque pour empê­cher le forage d’une pre­mière gale­rie dans la vallée, venait d’être expul­sée vio­lem­ment en pleine nuit un jour plus tôt. Cette nuit-là, la répres­sion fut pour une fois démo­cra­ti­que puis­que jeunes gens et vieillards furent également roués de coups et passés à tabac par les cen­tai­nes de poli­ciers et cara­bi­niers arri­vés sur place.

L’inter­ven­tion de la police et l’expul­sion du pre­si­dio [1] de Venaus et de ses deux cents occu­pants pro­vo­qua un sou­lè­ve­ment popu­laire dans la vallée et bien au-delà. Les réac­tions et les actions de soli­da­rité se mul­ti­pliè­rent dans toute l’Italie [2], allant de grèves sau­va­ges dans des écoles et cer­tai­nes usines, à des blo­ca­ges et des mani­fes­ta­tions de rue. Décision fut prise de réoc­cu­per sans plus atten­dre le cam­pe­ment qui mena­çait de se trans­for­mer en futur chan­tier de la ligne TGV.

« L’ins­tant d’après le vent se déchaîne... »

Le 8 décem­bre 2005, en l’espace de quel­ques heures, les flics sont débor­dés. Des dizai­nes de mil­liers de mani­fes­tants arri­vés par les sen­tiers ennei­gés encer­clent le camp. Partout des gens qui déva­lent la mon­ta­gne. La police n’arrive plus à gérer et à conte­nir la foule. Même les lacry­mos sont peu effi­ca­ces en raison du fort vent. Le camp poli­cier est lit­té­ra­le­ment pris d’assaut et repasse aux mains des No-TAV. Les flics qui ne sont pas enfuis, sont obli­gés de quit­ter le camp en file indienne, entou­rés de chaque coté par des habi­tants de la vallée qui les insul­tent. Immédiatement com­men­cent les tra­vaux pour recons­truire le pre­si­dio et détruire les équipements poli­ciers aban­don­nés sur place. De grosse bar­ri­ca­des avec des arbres sont érigées sur la route pour pré­ve­nir tout retour ennemi. Le Val de Suse vient de rem­por­ter l’une de ses plus gros­ses vic­toi­res sur le ter­rain de l’affron­te­ment brut avec l’État Italien.

Le parti de l'ordre en difficulté face aux manifestants No-TAV (Venaus, 2005). Ci-dessus photo du parti de l’ordre en dif­fi­culté face aux mani­fes­tants No-TAV (Venaus, 2005).

Depuis cette date his­to­ri­que, le mou­ve­ment No-TAV a donc pris l’habi­tude de célé­brer chaque année ce succès, comme il prends le temps, chaque année depuis 1998, de se sou­ve­nir lors de mar­ches aux flam­beaux d’Edoardo Massari et de Maria Soledad, tous deux accu­sés d’être, avec d’autres, les auteurs de mul­ti­ples actes de sabo­tage sur des chan­tiers du TAV et retrou­vés « sui­ci­der », l’un dans la prison de la Valette (Turin), sole a été retrouvé pendu dans la résidence surveillé. Cette année, plu­sieurs rendez-vous avaient été donné par voie de tracts.

Dans le pre­mier, une grosse cen­taine de gens se sont retrou­vés à Chiomonte pour blo­quer l’auto­route Turin/Bardonecchia. Au début un seul sens de la cir­cu­la­tion puis très vite les deux. Même blo­qués dans leurs voi­tu­res, per­sonne ne s’énerve, on sort pour dis­cu­ter, cer­tains auto­mo­bi­lis­tes allant jusqu’à saluer et encou­ra­ger les mani­fes­tants. Avant de partir, une heure plus tard, les armoi­res électriques du tunnel auto­rou­tiers sont toutes incen­diées. On aime déci­dé­ment pas la vitesse dans cette région. Toute au long de l’action, la pré­sence poli­cière est quasi-inexis­tante, une pre­mière voi­ture de cara­bi­niers est chas­sée à coups de mena­ces et de boules de neige avant qu’une deuxième, à la fin, soit chas­sée à coups de pier­res dans les vitres.

Le deuxième ras­sem­ble­ment par­tait de Gialione avec pour objec­tif d’aller jusqu’au chan­tier. Rapidement bloqué par la police, le cor­tège arrive finit par s’intro­duire en fin de jour­née dans le chan­tier mais est repoussé par un canon à eau et des gaz lacry­mo­gè­nes.

« C’est que le début d’accord d’accord... »

La force de la tech­ni­que du blo­cage est d’être réa­li­sa­ble à peu et de pou­voir se répan­dre assez vite en plu­sieurs points d’un ter­ri­toire, là où la bataille de Venaus de 2005 s’était réa­li­sée en un seul point et à l’aide du nombre (plu­sieurs dizai­nes de mil­liers de per­son­nes) ; à chaque fois, le point commun de ces actions, c’est que ce sont les gens qui les déci­dent et les effec­tuent eux-mêmes, sans média­tion, avec la simple intel­li­gence de la situa­tion. Et à chaque fois, c’est la poli­ti­que clas­si­que en état de déla­bre­ment avancé qui se trouve mis à mal, délé­gi­timé [3]. Devant la déter­mi­na­tion du mou­ve­ment et l’enli­se­ment du pays, le Président du Conseil des Ministres et père de la rigueur économique ita­lienne [4], Mario Monti, vient de jeter l’éponge et d’annon­cer sa pro­chaine démis­sion !

Et comme une bonne nou­velle n’arrive jamais seule, les deux der­niers inculpés de la vague d’arres­ta­tions liée aux mani­fes­ta­tions du 3 juillet 2011 dans le Val de Suse, Maurizio et Alessio, vien­nent d’être libé­rés début décem­bre. Ces deux cama­ra­des auront fait pra­ti­que­ment un an de déten­tion pré­ven­tive. Leur procès, comme celui des qua­rante trois autres inculpés, doit se tenir à Turin le 21 jan­vier pro­chain. Une nou­velle occa­sion de se retrou­ver.

Notes

[1] Campement.

[2] Comme après l’expulsion policière du presidio de la Baïta Clarea et la chute de Lucca d’un pylône électrique, le 27 février 2012.

[3] Là-bas comme chez nous, la politique institutionnelle est tellement désavouée que certains politiciens en sont à chercher de « faux militants » pour remplir les salles de leurs meetings

[4] La blague que se font les Italiens en ce moment : que fait Dracula quand il croise Monti ? Réponse : Il fait le signe de croix.

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10 décembre 2012 1 10 /12 /décembre /2012 20:52

 

Nous recevons ce vendredi 14 décembre au Labo, à 19 h, Carine Ntakibirora, étudiante en quatrième année aux Beaux Arts de Valence, qui souhaite témoigner de son expérience personnelle et de son parcours atypique, à travers ses créations artistiques : vidéos, photos, textes et peintures.

Au cours d'un long séjour en clinique psychiatrique, l'activité créative s'est imposée à elle, comme moyen de s'exprimer, et de témoigner.

 

Carine : « Vivre quand on a tout perdu, ou presque tout; mais qu'il y a un petit espoir en vous... Cela est-il possible ? Telle est la question que je me pose.

Anxiété, bipolarité, T.O.C.s, folie peut-être, cyclothymie, etc., l'enfermement est-il une solution ? Sommes-nous vraiment différents des autres ? Sommes-nous dangereux envers vous, ou envers nous-mêmes ? Mon travail traite ce sujet, avec différents médiums.

Pourquoi ce mal-être ? Amour, perte des proches, homosexualité, politique, solitude... ; mon quotidien nourrit mes créations. Il en résulte un travail presque autobiographique, une sorte de miroir qui m'aide à m'exprimer. »

« Vivre dans cet environnement psychiatrique m'a ouvert des portes; encore faut-il savoir quoi en faire... J'ai commencé par prendre des photos - non autorisées par ailleurs - ayant valeur de témoignage. Puis j'ai suivi plus particulièrement une personne au comportement bipolaire, que j'ai filmée pendant deux ans. Le lien d'amitié que j'ai noué avec elle m'a permis d'avoir sa confiance. J'ai pu ainsi réaliser des vidéos où elle se confie, se libère et se met à nu.

 A travers son parcours, son enfermement et les épreuves de sa vie, elle m'apprend beaucoup et vice versa. Notre rencontre, qui s'est avérée nécessaire, nous a permis de partager nos grandes blessures de l'âme. »

 

Pour découvrir quelques unes des vidéos de Carine, dont Les photos de l'hôpital et Madame X, déjà diffusées sur plusieurs festivals, ainsi que ses peintures, et échanger autour de votre vécu de la psychiatrie, venez nous rejoindre ce vendredi 14 décembre à 19 h au Labo, 8 place Saint Jean à Valence.

 

Après la projection – rencontre – discussion, nous finirons la soirée autour d'un verre et d'un buffet partagé.

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