des associations accusent Areva de "négligence fautive" au Gabon et au Niger
AFP - 04.04.07 - Des associations dénoncent une "négligence fautive" dans la
gestion, par une filiale d'Areva, de la mine d'uranium de Mounana (Gabon) et
demandent au groupe nucléaire français de "prendre ses responsabilités"
environnementales et sanitaires au Gabon et au Niger.
Dans un rapport d'enquête rendu public mercredi à Paris lors d'une conférence de
presse, l'association de juristes Sherpa, en coopération avec la CRIIRAD, Médecins
du Monde et les associations d'anciens travailleurs gabonais et expatriés du site
pointe "l'existence d'un risque connu",
"l'absence coupable d'information sur ces risques",
"le maintien volontaire dans l'ignorance".
L'enquête, similaire à celle menée à Arlit (Niger) en 2005,
est notamment basée
sur des questionnaires distribués
à 17 anciens expatriés et à 481 anciens salariés gabonais de ce site exploité de
1960 à 1999, dans la région du Haut-Ogooue (sud-est du Gabon).
Les résultats montrent "une sous-estimation généralisée des risques sanitaires et environnementaux liés à l'activité de la Comuf (filiale de la Cogema devenue Areva)qui relève de la négligence fautive",
estime le rapport, tandis qu'Areva assure n'avoir "rien à cacher" et propose la création d'"observatoires de la santé" autour
des sites.
"Dans cette mine, même les expatriés descendaient en short, sans masque,sans casque"
, affirme Michel Brugière, directeur général de MDM. Sur les 17
expatriés, 11 font état de cancers attestés par un médecin de MDM, dont quatre sont
décédés.
Parmi les travailleurs gabonais, 243 (soit 50,5%) disent souffrir de problèmes
pulmonaires, certains avec des pathologies associées (dermatologiques,
ophtalmologiques ou cardiovasculaires).
"Employés et population ont été exposés
-parfois pendant plus de 20 ans à de la radioactivité dans l'air (poussières radioactives ou gaz radon),
- à l'extérieur ou dans des bâtiments construits avec des
résidus radioactifs (habitations, maternité, école, marché couvert),
ingestion" (d'aliments contaminés), a expliqué à l'AFP Bruno Chareyron de la CRIIRAD.
"Nous avons bien enregistré les inquiétudes des travailleurs et proposé l'idée
novatrice d'observatoires de la santé, sous l'égide des autorités nationales, avec
la participation d'organismes scientifiques et d'ONG",
a déclaré mercredi à l'AFP
Yves Dufour, directeur des actions de solidarité et de développement dans les territoires (Activité minière, Areva).
Selon les associations, la très grande majorité des travailleurs gabonais et expatriés interrogés ont dit n'avoir jamais été informés des risques.
Durant la période d'exploitation du site, les employés gabonais bénéficiaient d'un suivi médical dans un "hôpital Comuf"
mais depuis sa fermeture, ils doivent payer
soins et médicaments, la plupart n'en n'ayant pas les moyens.
"Certaines pathologies peuvent se déclarer des dizaines d'années après l'exposition. Il faut que ces gens
soient suivis et indemnisés", insiste le Dr Brugière.
Jean-Pierre Getti, de Sherpa, affirme que
des poursuites sont envisageablesnotamment au pénal pour "blessures et homicides involontaires" et "mise en danger de
la vie d'autrui".
dans les années 60-70:
"des millions de tonnes de résidus d'extraction d'uranium (boues radioactives) étaient simplement versés dans la rivière, souligne M. Chareyron.
Ces déchets sont radioactifs de façon quasi éternelle" (75.000 ans).
Des mesures de contrôles (personnes et sites) avaient bien lieu mais les résultats n'ont jamais été rendus publics
.
Les associations demandent "un état des lieux complet et
indépendant" y compris après le "réaménagement" du site, financé par l'Union européenne.