Lu sur Actu chômage
Habituellement, tout se passe en catimini : un dysfonctionnement de la distribution du courrier, une convocation à un entretien jamais envoyée et on vous coupe les vivres, sans que la procédure d'usage soit respectée (avertissement avant radiation, puis décision officielle).
C'est à la mi-janvier que Thierry Dupain, chômeur de Villeneuve-lès-Béziers, a pris connaissance de son éviction en s'apercevant que l'Assedic ne lui avait pas versé ses allocations (15 € par jour). Il apprend qu'en novembre on lui a soi-disant adressé une convocation qu'il n'a jamais reçue, et que l'ANPE a donc pris la décision de l'amputer de ses droits pour une durée de deux mois sans même l'en avertir.
Depuis la mise en place du suivi mensuel personnalisé, "les cas de radiations abusives se multiplient. Le pire, c'est qu'il revient au chômeur de porter l'affaire devant le tribunal administratif", déplore Jacqueline Balsan, vice-présidente du Mouvement national des chômeurs et précaires. Ce qu'il a fait, soutenu par cette association. S'appuyant sur une décision de la Cour administrative d'appel de Paris qui avait demandé l'annulation d'une radiation dans un cas considéré comme similaire, l'avocat a plaidé pour que l'ANPE apporte la charge de la preuve. Insistant sur le manque de prise en compte de la dignité humaine des demandeurs d'emploi, Me Fernandez a demandé une suspension de provisoire de la radiation auprès du juge des référés, arguant notamment des conséquences d'une telle décision.
Le tribunal administratif de Montpellier, selon la procédure d'urgence du référé-suspension, a rendu son jugement qui fait alors jurisprudence : vendredi 6 avril, il a ordonné à l'ANPE la réinscription d'office du plaignant, et à l'Assedic le versement immédiat des arriérés de ses allocations non versées, estimant que "l’absence à un entretien ne peut pas justifier une radiation".
Et d'autres collectifs en France vont initier la même
procédure"..
on annonce à l'ANPE une grève du personnel le 8 juin
Ce n’est pas une découverte. Le Suivi Mensuel Personnalisé inventé par le gouvernement Villepin n’a rien changé à la solitude et à la stigmatisation qui pèsent sur les demandeurs d’emploi. Bien au contraire. Quantifiés en "stocks", les chômeurs, puisqu’il faut les nommer ainsi, sont confrontés à un marché du travail de plus en plus opaque au sein duquel règne la loi de la présélection. Les agents de l’ANPE, eux-mêmes, ne supportent plus le rôle coercitif qu’on leur assigne. La dépression les gagne tandis qu’on les somme de biaiser les statistiques du chômage via la radiation des listes et le maintien en l’état des "chômeurs invisibles". Implacable réalité brillamment mise en lumière par le collectif ACDC (Autres Chiffres Du Chômage). Il n’en fallait pas davantage à Jean-Jacques Reboux, ancien instituteur-chômeur-postier-chômeur devenu éditeur, pour se lancer à corps perdu dans la réalisation du livre "Chômeurs, qu’attendez-vous pour disparaître ?". Un livre qui donne la parole aux principaux intéressés. Sans langue de bois.
Stage de "remotivation"
Flashback. Tout commence le 13 décembre 2005 lorsque 57 chômeurs touchant l’ASS (Allocation Spécifique de Solidarité) sont convoqués à l’ANPE Saint-Georges (Paris 9ème). Le motif ? Ils sont appelés à suivre dès le lendemain un stage de "remotivation" de 200 heures réparties sur une période de dix semaines. Loin d’être démotivé, Jean-Jacques Reboux échappera finalement à ce qu’il qualifie de "rafle" au profit de la création d’une maison d’édition baptisée Après la lune. Germe alors l’idée de rassembler dans un livre une série de témoignages de chômeurs, agents de l’ANPE, sociologues, syndicalistes et autres citoyens révoltés par le traitement réservé aux demandeurs d’emploi. Anecdotes saugrenues, fictions sarkoziennes, analyse de la perversité du Suivi Mensuel Personnalisé, combines des agences pour l’emploi, bibliographies, adresses de sites Internet...De fil en aiguille s’esquisse un manifeste "sur une société en panne d’humanité" au titre ironiquement explicite : "Chômeurs, qu’attendez-vous pour disparaître ?"
Pour écouter l’interview audio de Jean-Jacques Reboux, coordinateur de "Chômeurs, qu’attendez-vous pour disparaître ?", et Marie-José Beaumont, agent de l’ANPE
Pour lire le manifeste du livre au format pdf cliquer là