Nous publions ce texte pour approfondir la discussion entamé vendredi 22 janvier
au Laboratoire. pour mesurer l'écart avec les propos ducollectif "Force Autonome Révolutionnaire( émission de radio labo du 25/1). Aujourd'hui l'idéologie anarchiste se traduit
par le fameux " moi je fais ce que je veux , ce qui me plaît[...]Il est temps de renverser la vapeur et de comprendre que toutes ces valeurs surtout sous
la forme radicale "libertaire", revient à reproduire le fonctionement intime du capital "1
(Research Innovation Textile Machinery) et ses salariés passaient
devant le tribunal de Commerce de Romans (Drôme), organisme chargé
de statuer sur les entreprises en détresse par ces temps de crise et de
leur faire connaître la délibération qui scelle leur sort. Il faut savoir que
les juges consulaires sont élus par leurs pairs issus du monde de
l’entreprise et qu’« à ce titre ils ont compétence pour apprécier la
situation économique et financière d’une entreprise et pour préconiser
des solutions adaptées aux entreprises en difficulté ». Les travailleurs de
RITM peuvent être « rassurés » : leur avenir est entre de bonnes mains !
Une heure de délibéré et le verdict tombe : redressement judiciaire, mise
en observation pendant six mois dans l’attente d’éventuels repreneurs. La
Tendance CLAIRE du NPA est venue les assurer de son soutien. Elle a
interviewé des élus du personnel et notamment le secrétaire CGT del’entreprise.
ACDL : Peux-tu présenter ta boîte en tant qu’entité
industrielle, humaine, et syndicale ?
RITM est issue de la reprise, par la société Co-Martin, fin 2006, de l’exusine
de Valence du groupe suisse Rieter. Par la mobilisation de multiples partenaires (trois
actionnaires principaux : la Région, le Département et la Ville), 150 emplois
avaient pu être sauvés. Il faut savoir que RITM est la dernière entreprise
de fabrication de machines textiles européenne, leader mondial sur le
marché du verre, que 80 % des circuits imprimés y sont fabriqués,
que les fils techniques qui équipent les pneus des Formule 1, notamment
Michelin, sont fabriqués à Valence. D’ailleurs à partir de janvier, ils vont
tester notre toute dernière UTW 30. Cela prouve bien que notre boîte est
viable. L’année 2007 a été exceptionnelle, avec un impressionnant contrat asiatique
représentant 50 millions, d’euros soit près de 500 machines de
transformation de fils de verre entrant dans la composition de circuits
électroniques : nous avons réalisé un chiffre d’affaires de 70 millions d’euros
en 2007 avec 150 salariés. Les premières difficultés se manifestent en
2008. En 2009, le chômage partiel est appliqué (7 mois) et 25 salariés sont
« prêtés » à Faun et Reyes, des soustraitants. L’activité est quasiment arrêtée et « nous » accumulons depuis
le début de l’année des dettes auprès des fournisseurs (5 M). RITM est emportée dans la tourmente de la crise économique puisque 85% des produits sont exportés sur le marché
asiatique. Aujourd’hui, elle va être mise en redressement judiciaire et le
dépôt de bilan est probable s’il n’y a pas de repreneurs.
RITM, c’est 140 salariés de grande compétence, relativement
jeunes, mais peu syndiqués puisque seule une vingtaine d’entre eux sont
syndiqués à la CGT (le seul syndicat dans la boîte). De plus ce sont 350
emplois induits sur le bassin qui sont embarqués dans notre galère. Sur un
bassin déjà sinistré, cette nouvelle saignée serait catastrophique.
ACDL : Quand avez-vous été informés de cette situation et
quelle à été la réaction des travailleurs ?
C’est le 23 octobre 2009, pendant une AG organisée par la
Direction, qu’on a appris que les banques refusaient tout prêt sauf si
RITM était recapitalisée. C’était impossible, donc il fallait s’acheminer
vers un repreneur, mais la conséquence annoncée est que la
moitié des effectifs serait licenciée. Sous le choc, après un moment
d’expectative, les travailleurs refusaient cette solution et
organisaient trois mouvements de protestation : l’un devant la boîte,
l’autre à la Préfecture et le dernier par une manifestation bien symbolique
entre la BNP et la Banque de France. C’était un signe fort que nous voulions
donner en désignant du doigt les responsables de la situation qui nous
est faite : pouvoirs publics et grandes banques. «Alors que nos machines
sont innovantes, que nous avons sans doute 5 à 10 ans d’avance
technologique, on va nous laisser crever car contrairement aux
banques que Sarkozy a sauvées nous on a rien de rien : ni fonds
stratégique d’investissement, ni médiation du crédit, rien. »
ACDL : Pourtant, vous avezreçu en son temps des fonds publics.
Oui, de la ville de Valence et des assemblées départementale et
régionale, mais dans la majeure partie des cas c’étaient des garanties bancaires cautionnées par le FRERA (Fonds régional de garantie pour l’emploi en Rhône-Alpes).
A défendre leur emploi ou à se battre pour une bonne prime de licenciement ?
Difficile à dire, bien que la mobilisation aujourd’hui soit une
réussite puisque plus de la moitié du personnel a fait le déplacement
malgré des conditions de circulation très difficiles. Pour l’instant, ils sont en
recherche d’informations, espérant un repreneur providentiel qui assurerait
la pérennité de l’entreprise. On va faire une AG pour faire le compte-rendu du
tribunal et évoquer les suites à donner. Bien sûr, il y a des mecs qui veulent se
battre. Nous avons 6 mois au plus pour gagner ce combat. Les
événements peuvent permettre d’aller à cet affrontement, mais rien n’est gagné.
ACDL : Ne penses-tu pas qu’il vous faudrait rencontrer les boîtes en difficulté sur lebassin et essayer de fédérer lesactions, notamment avec les Rhodia/Sétila qui sont dans la même situation ?
Tout à fait d’accord, mais tout en ayant les mêmes revendications
notamment dans la défense de l’emploi, chaque boîte est une
spécificité qui entraîne de la part des salariés un repliement sur leur entité.
Il faut dire aussi que les directions syndicales de bassin n’ont pas
l’habitude de se réunir, de partager leurs expériences, de fédérer leurs
actions. Cette autonomie est bien sûr un handicap mais nous allons
solliciter cette réunion pour essayer deproduire une réaction à la hauteur des
enjeux. Nous pouvons compter sur le soutien de l’UD CGT.
ACDL : Dirais-tu que le capitalisme est responsable de
cette crise qui induit les difficultés que traverse RITM ?
Comme je te le disais précédemment, Sarkozy a trouvé du pognon pour renflouer les banques et les grandes entreprises comme l’automobile, mais par contre rien pour sauvegarder une entreprise . Gouvernement et patronat veulent faire payer la crise aux travailleurs.
. Il est évident que, tant ,que perdura ce système, les travailleurs en feront les frais afin de garantir leurs profits et que donc nos revendications ne seront que patiellement
ou pas satisfaites et le maintien des emploies encore moins pérénisées
ACDL : Dans ce cas, comme tu ne nourris aucune illusion sur ce système, penses-tu qu’un changement de société est souhaitable et envisageable ?
Bien sûr, les conditions sont peut-être là, mais en avons-nous les moyens ?
ACDL : Les travailleurs deRITM ont-ils déjà réfléchi à comment donner un avenir à
leur entreprise ?
Oui certains d’entre nous ont pensé à la création d’une SCOOP,
mais cette réflexion est pour l’instant minoritaire. Pour autant nous avons
pris contact avec les institutions capables de nous aider dans la constitution d’un tel dossier. Pour l’instant c’est une piste que nous soumettrons au personnel.
ACDL : À moins de faire comme les travailleurs de Philips à Dreux qui occupent
leur entreprise et en ont pris le contrôle ?
Je n’ai connaissance ni de leur lutte, ni des dispositions qu’ils ont
prises pour défendre leur emploi, mais évidemment ce serait la solution.
Mais dans l’immédiat les travailleurs de RITM n’en sont pas à ce stade.
Il a été convenu que les militants de la CGT de RITM nous feraient
connaître les suites et actions que le personnel déciderait. Le NPA de
Romans s’est engagé, dans la mesure de ses moyens, à populariser et
participer à leurs luttes.