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La tyrannie la plus redoutable n'est pas celle qui prend figure d'arbitraire, c'est celle qui nous vient couverte du masque de la légalité." Albert Libertad

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le blog du laboratoire anarchiste

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18 novembre 2010 4 18 /11 /novembre /2010 11:09

je vous donne une direction pour réfléchir encore et toujours  sur cette empoisonement dû à l'industrie nucléaire.

voir ici

Le Forum Plutonium est un réseau constitué de personnes et d'associations, qui se sont fixés comme objectif :

« d’analyser et de faire connaître les implications, de la production et l'emploi du plutonium et de ses descendants radioactifs, en particulier, comme source d'énergie nucléaire. Ces implications retentissent sur la société, la santé, l'environnement, l'économie et sur la prolifération des armes nucléaires. Le Forum Plutonium veut aussi aider à la prise de conscience générale des graves responsabilités que représentent ces activités vis-à-vis des générations futures. Il entend enfin analyser et informer sur les options de gestion du plutonium existant, et, en particulier, sur les implications de cette gestion comme déchet ultime. » (Extrait des statuts de l'Association, déposés le 7 juillet
1995).

Il s'est créé en 1994, face au risque que représentent, pour la vie sur notre Planète, la présence diffuse de centaines de tonnes de plutonium déjà produites et la poursuite de cette production, en France, en Grande Bretagne et en Russie principalement.

Aujourd'hui, la filière des surgénérateurs est sur le déclin avec l'échec de Superphénix ; les opérateurs du nucléaire proposent donc d'écouler les stocks de plutonium civils et militaires en remplaçant, dans les réacteurs classiques à eau légère, le combustible standard à l'uranium par du MOX, mélange de plutonium et d'uranium appauvri. Rien n'indique que les avantages économiques, sociaux ou autres d'un tel choix compensent le détriment sanitaire qu'il provoque.

En effet, ce choix stratégique du nucléaire français appliqué aux réacteurs des producteurs européens d'électricité, induit de nombreux transports de plutonium sous différentes formes. Les usines de production de plutonium sont à la pointe du Cotentin, en Ecosse et au nord-ouest de l'Angleterre, les usines de MOX sont dans le sud-est de la France et dans l'est de la Belgique; ces transports (pour l'essentiel, routiers) exposent l'ensemble des habitants aux risques de contamination radioactive par le plutonium et d'actes terroristes, liés, pour certains, à la prolifération de l'arme atomique. Pour cette dernière raison, ces transports de matières nucléaires sont soumis en France au «secret défense», ce qui interdit toute expertise indépendante sur le respect de règles de sécurité et tout contrôle démocratique sur les parcours. Or il s'agit de métaux lourds hautement radiotoxiques, généralement en poudre fine, non détectable au radiomètre; on les retrouve dans les sédiments des rivières ou bien dans les nappes phréatiques. Le plutonium n'existait pratiquement pas avant l'âge atomique. L'extension de l'industrie du MOX va contribuer à sa dispersion dans l'écosystème, où il demeurera, radiotoxique pour des millénaires.

Le Forum Plutonium demande que le plutonium soit considéré comme un déchet, que son extraction du combustible usé cesse, ainsi que la production et l'utilisation du MOX. Il revendique l'application immédiate d'un scénario de sortie rapide du nucléaire, avec, en attendant, l'emploi de l'uranium enrichi comme combustible.

Le Plutonium :

Le plutonium est nocif pour le vivant au niveau du centième de milligramme, par sa radioactivité qui détruit le noyau des cellules vivantes pendant une durée supérieure à sa demi-vie de 24000 ans, causant leucémies, cancers et mutations génétiques héréditaires. Avec plus de 2700 tonnes de plutonium actuellement présentes sur la planète, des milliers de milliards d'êtres vivants sont en danger de mort plus ou moins rapide, D'autant que la contamination par le plutonium suit le cycle de la survie des espèces, des plantes vers les animaux et vers les humains. Ce risque pour la survie sur la planète est en plus décuplé par sa séparation et son recyclage comme combustible nucléaire, qui supposent des manipulations et des transports. S'y ajoute la convoitise des terroristes et des pays désireux de posséder la bombe atomique ou (et) de polluer durablement leurs cibles avec des bombes sales. Ils sont de plus en plus nombreux et impatients.
Ce risque nous a semblé majeur, loin devant les nombreux autres risques dus au nucléaire civil :

  1. la pollution par les autres résidus contenus dans le combustible usé, les actinides et les produits de fission (4% du poids), que l'on stocke sous terre,
  2. le danger d'explosion, spontanée ou provoquée des réacteurs, surtout les plus anciens (durée de vie portée de 25 à 40 ans),
  3. les transports par sol, air, mer des matières nucléaires neuves et usagées,
  4. les rejets solides, liquides et gazeux des installations,
  5. le transport et le stockage des produits chimiques nécessaires à l'industrie nucléaire, le fluor pour l'enrichissement de l'uranium, l'acide nitrique pour le retraitement, le sodium pour les surgénérateurs,
  6. le réchauffement par les réacteurs des rivières et des courants marins côtiers,
  7. le devenir des friches industrielles et des ferrailles contaminées polluées pour des millénaires,
  8. les stériles de mines d'uranium laissées sur place par les exploitants,
    Il est aussi urgent d'arrêter de produire l'électricité avec l’énergie nucléaire que de réduire l'effet de serre dû à la combustion des hydrocarbures.


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18 novembre 2010 4 18 /11 /novembre /2010 10:44

PROCES DU 15 NOVEMBRE A PARIS
Mobilisations de soutien

Lors de la conférence de presse de ce matin à Bayonne, les trois intervenantes ont souligné les différents aspects de cette procédure qui montrent, contrairement à ce que disent les autorités françaises, leur implication directe dans le conflit basque.

En résumé :

Muriel Lucantis, porte-parole d'Askatasuna, a cité différents exemples de mesures montrant la politique de vengeance et de haine directement appliquée aux personnes arrêtées dans ce cadre, loin d'un fonctionnement "normal" de l'appareil judiciaire.

  • liés à la législation anti-terroriste, les délais de préventive (6 ans dans ce cas) et les contrôles judiciaires stricts
  • la torture, utilisée dans ce dossier directement par l'Etat français, la police ayant attendu que Peio Alcantarrilla se rende à son travail dans l'Etat espagnol pour qu'il y soit arrêté. Horriblement torturé, il avait tenté de se suicider pendant sa mise au secret. Il avait été remis quelques mois plus tard à l'Etat français par le biais d'un mandat d'arrêt européen.
  • l'isolement (dans le sens séparation d'avec les autres prisonniers basques), appliqué à la quasi-totalité de ces prisonniers lors de leur incarcération, et qui dure encore aujourd'hui, depuis 6 ans donc, pour Joxe-Ramon Arrano.
  • l'attaque au mouvement de soutien des prisonniers: menaces et chantage lors des garde-à-vue, sur les arrêtés et leur famille, leur interdisant d'entrer en contact avec Askatasuna, arrestation quelques semaines après et en lien avec ce dossier du porte-parole de l'époque Lof Jean-François Lefort, perquisition des locaux d'Askatasuna et convocations d'une quinzaine de militans pour interrogatoire politique (volet de ce dossier qui a été dissocié pour passer en correctionnelle dans lequel Didier Arricau, Maryse Lavie, Robert Arricau, Peio Serbielle et Lof doivent être jugés).

Amaia Rekarte, avocate, a montré au niveau juridique comment ces procédures antiterroristes violent les lois et conventions protégeant les droits de l'Homme en parlant de différents points :

  • la garde-à-vue (le France a déjà été condamnée au niveau européen pour l'absence d'un avocat dès la première heure)
  • la durée des préventives
  • la dispersion et l'isolement
  • la torture
  • les conditions de détention
  • les mesures conservatoires permettant aux juges d'avoir la main mise sur les maisons et les biens des familles en cas d'amendes.

Anaiz Funosas a dénoncé l'attitude des Etats qui, à l'heure où des pas importants sont réalisés par la gauche abertzale, font la pari du prolongement du conflit politique et a souligné que l'implication notamment de l'Etat français est indispensable pour toute résolution politique.

Elle a demandé aux acteurs politiques et sociaux de peser le plus possible dans ce sens.

Elle a exigé la reconnaissance du conflit politique par l'Etat français, la desactivation immédiate des lois et tribunaux d'exception, le respect des droits individuels et collectifs de chacun, y compris des prisonniers politiques basques et a appelé à la mobilisation.

  • Un autobus partira dimanche soir 14 novembre à 20 h de D.Lohitzune (sortie de l'autoroute Carrefour) et à 20h30 de Bayonne (sortie de l'autoroute Mousserolles). Tél: 06 11 36 21 53.
  • Lundi 15 novembre rassemblements à 19h à Bayonne (Saint-Léon) et à Urrugne (Pausu)
  • Vendredi 19 novembre rassemblement à Urrugne suivi d'une soirée débat sur les lois-antiterroristes (Berttoli)
  • Vendredi 3 décembre rassemblement à Bayonne suivi d'une soirée débat sur les lois antiterroristes (Patxoki).

SOUTIEN A AURORE MARTIN

Des rassemblements de soutien à Aurore Martin auront lieu vendredi prochain 12 novembre à 18h à Mauléon et à 19h à D.Garazi sous les slogans :

LIBEREZ AUIRORE !
LA RÉPRESSION N'EST PAS LA SOLUTION !
ÇA SUFFIT, LAISSEZ LE PAYS BASQUE EN PAIX !

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17 novembre 2010 3 17 /11 /novembre /2010 13:27

Départ de la place des Basques, à Bayonne à 4h

Euskaldunen plazatik, 4tan

Venez nombreux exiger le respect des droits civils et politiques pour tous et toutes!

ci-dessous un article de pays basque info sur la situation d'Aurore Martin, suivi d'une pétition et des premiers signataires.
Faites passer le message. Mezua pasarazi.

http://www.paysbasqueinfo.com/component/zine/article/1043-une-ancienne-dirigeante-de-batasuna-incarcre-en-france-pour-ses-activits-publiques.html
 Une ex-dirigeante de Batasuna incarcérée en France pour ses activités publiques
Aurore Martin est incarcérée à la prison de Seysses depuis le mardi 9 novembre, dans l'attente de l'examen, par le tribunal de Pau, du mandat d'arrêt émis à son encontre par la justice espagnole. Une incarcération qui soulève l'indignation de nombreux acteurs politiques et sociaux. D'abord parce que la jeune femme s'est présentée à une convocation de la gendarmerie de Saint-Jean-Pied-de-Port comme elle se présentait, librement, en mai et juin derniers, devant le tribunal de Pau, pour le même motif.
" Elle apporte les mêmes garanties de présentation que par le passé " a précisé son avocate, Amaia Recarte. Le Mandat d'arrêt européen avait d'ailleurs été rejeté pour " manque de motivation, exposé lacunaire et incompréhensible ", indiquait le jugement. Et c'est sur ce point d'incompréhension que porte le second grief fait à cet emprisonnement puisque ce sont bien les activités publiques et politiques de cette ancienne dirigeante de Batasuna qui lui valent les geôles françaises.
La cour d'appel de Pau avait rejeté, le 8 juin dernier, le mandat d'arrêt européen espagnol émis à l'encontre d'Aurore Martin en estimant notamment qu'il manquait des indications sur les faits reprochés et leurs dates. Cette seconde tentative de l'Audience Nationale espagnole est donc plus explicite et concerne l'activité publique et politique d'Aurore Martin entre 2005 et 2008, en particulier au sein du parti indépendantiste basque Batasuna. Dans le jargon espagnol, l'accusation vaut participation à une organisation terroriste, selon le principe de " convergence idéologique " qui établit que toute structure partageant la même finalité que l'ETA (indépendance du Pays Basque et socialisme) soit assimilable à l'organisation armée.

Une construction juridique qui, pour faire débat dans la péninsule avec le procès du leader politique de Batasuna, Arnaldo Otégi, reste exotique passée la barrière des Pyrénées. L'appartenance à un parti politique n'est ici pas répréhensible et si la justice française ne se prononce pas sur le fond des Mandats d'arrêt Européen, se bornant à en étudier la forme et les applications, le cas précis d'Aurore Martin soulève toutefois une question morale. Aurore Martin est de nationalité française et la justice espagnole lui reproche également son activité politique de ce côté de la frontière. Elle risque à ce titre jusqu'à 12 ans de détention en Espagne.

Le tribunal de Pau ne pourra pas cette fois faire l'économie de la réflexion. Lors de l'examen de son premier mandat d'arrêt européen, la jeune femme avait trouvé un soutien bien au-delà des sphères locales, jusqu'au sein du Parlement européen avec les députés Catherine Grèze et José Bové (écologistes). Jusqu'à quel point les États Européens peuvent-ils collaborer sur un plan judiciaire avec de telles dysharmonies ? La France peut-elle décemment remettre aux autorités espagnoles une personne accusée d'activités politiques en France ? La première réponse, donnée par l'avocat général de la cour d'appel de Pau, qui a décidé de l'incarcération préventive d'Aurore Martin, est tout de même un sombre présage.

PETITION



La liberté d'expression et la liberté de défendre des opinions politiques constituent des piliers fondamentaux de la démocratie.

Or, aujourd'hui en Pays Basque, des dizaines et des dizaines de personnes sont incarcérées ou font l'objet de poursuites par la justice espagnole pour le seul motif de participer à des activités politiques, associatives, journalistiques. Après le macro-procès dit "18/98", celui des organisations de jeunes (Haika, Segi), celui de l'organisme de soutien aux prisonniers politiques basques Askatasuna, celui d'Egunkaria (quotidien en langue basque), le procès d'Udalbiltza (association qui regroupe des maires et des conseillers municipaux des sept provinces du Pays Basque) vient de se terminer. Devrait suivre, courant 2011, le procès du parti politique Batasuna. Dans ce contexte, l'attitude des autorités judiciaires françaises elle-même est préoccupante puisqu'elles semblent vouloir emboîter le pas de leurs homologues espagnoles (affaires Kalaka, Askatasuna, comptes bloqués de militants de Batasuna, multiplication des opérations policières contre de jeunes militants...)

    Parmi les dizaines et dizaines de personnes inculpées dans l'ensemble de ces dossiers figurent plusieurs militants d'Iparralde. Trois d'entre eux sont aujourd'hui inculpés par la justice espagnole pour appartenance au bureau national de Batasuna. Il s'agit d'Aurore Martin, Jean Claude Aguerre et Xabi Larralde. L'Audiencia Nacional de Madrid a émis à leur encontre un mandat d'arrêt européen et réclame donc qu'ils soient livrés à la Justice Espagnole. De même, Xarlo Etxezaharreta (ancien conseiller municipal d'Hasparren) fait partie des inculpés dans le procès d'Udalbiltza.

Cela étant :

    1. Nous considérons que les poursuites judiciaires dont font l'objet ces personnes sont inacceptables car tous mouvements politiques, associatifs, culturels doivent pouvoir trouver leur place dans le jeu démocratique. Elles foulent au pied des droits civils et politiques élémentaires. Nous demandons en conséquence que ces poursuites cessent.

    2. Nous nous adressons plus particulièrement aux autorités françaises qui ont, ces dernières années, remis à la justice espagnole des dizaines de personnes poursuivies pour leur seule activité politique. Nous leur demandons de ne pas s'inscrire dans la dynamique de ces procédures en mettant en particulier un terme à l'application des mandats d'arrêts européens contre les militants politiques.

    3. Nous appelons enfin les acteurs de la société civile (notamment les élus) à prendre position contre ces mesures et à se mobiliser afin qu'elles cessent.

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17 novembre 2010 3 17 /11 /novembre /2010 08:37
Nous avons décidé de publier cette article parusur le site article XI bientot en  parution Papier. ces textes sont disponible en brochure papier au LABORATOIRE 8 place ST jean valence
Alèssi Dell’Umbria (part.I) : "Le discours idéologique républicain a anesthésié toute culture de la révolte"

auteurs par: Lémi et JBB


 [1]

La ville qui s’étend, au loin. Petit appartement, dixième étage, lui la surplombe. N’a même plus besoin de la regarder pour la voir, pour la sentir ; il en est. Marseille, c’est sa ville, son théâtre, ses arènes. Pour dire : il en a même écrit L’Histoire universelle [2], une somme de plus de 700 pages, venue de nulle part - Alèssi n’est ni universitaire, ni historien officiel - et unanimement saluée comme l’un des plus ambitieux travaux jamais produits sur la capitale phocéenne. Autodidacte rétif aux étiquettes - disons quand même : un (bon) brin anar, un brin toto - , il en est pourtant une que l’auteur revendique largement : Marseillais. Il l’affiche, l’accent et la gouaille, le vocabulaire et le goût du peuple, et jusqu’à la petite chaîne dorée autour du cou. Historien à la marge, loin des canons du genre - sinon à considérer que l’histoire par en-bas est devenue la norme (malheureusement : non) - , Alèssi Dell’Umbria est tout aussi éloigné de ceux du militantisme ; d’ailleurs, il déteste les "militants". Contempteur féroce de la gauche et de ses familles, même extrêmes, celui qui a été l’un des trublions d’une ultra-gauche activiste dans les années 1980 n’a pas renié grand chose de ses amours de jeunesse. Mort aux vaches, évidemment - même s’il ne le dit pas ainsi. Amour de la révolte, de ce qu’elle dit du surgissement de la vie, aussi. Et puis, refus des institutions mortifères, de la fallacieuse représentation, des chefaillons médiocres et autres intermédiaires auto-proclamés. Pour le reste : rock’n’roll !

Nul besoin d’en dire plus, sinon mentionner le très beau (et percutant) pamphlet publié par lui au lendemain des dites émeutes de 2005, C’est de la Racaille ? Eh bien, j’en suis ! [3]. Sans doute le seul ouvrage sur le sujet ne dépeignant pas les protagonistes pyromanes de ces journées comme des monstres assoiffés de sang et ne respectant rien, juste bons pour le karcher. Précieux.
L’entretien qui suit - d’abord né d’une rencontre en son appartement marseillais en avril dernier, le texte ayant ensuite été enrichi lors de nombreux échanges de mails - est dense, passionnant. Fleuve, aussi. Si fleuve, même, que nous le publions en deux parties : l’acte 2 sera mis en ligne mercredi. En espérant qu’en cette morne rentrée sociale, il vous donne autant envie qu’à nous de secouer-affronter-renverser tous ces satrapes qui ont fait main basse sur nos vies. Ou bien, de vous installer à Marseille. Au choix, hein.

.

La révolte de 2005 était-elle prévisible ?

Une révolte n’est jamais prévisible. Encore heureux ! La réaction des gens de Clichy-sous-Bois à la mort des deux minots n’avait en soi rien de surprenant : c’était la moindre des choses. Mais c’est cette incroyable contagion qui a pris tout le monde par surprise. J’avoue être moi-même resté stupéfait, la première semaine… Ce qui m’a également surpris, c’est la réaction de pas mal de gens de ma génération, au quartier. Je parle là de gens souvent issus des cités des quartiers Nord ou Est, et qui sont descendus vivre en-ville, certains que je connais bien et qui ont connu étant minots ce que vivent les jeunes des banlieues d’aujourd’hui… Ils avaient pourtant une réaction assez négative envers cette révolte, sur un thème récurrent : « N’importe quoi, ils brûlent les voitures des gens qui habitent leur cité et sont aussi pauvres qu’eux », et c’est tout. Venant de gens qui, somme toute, avaient fait pareil étant jeunes, c’était un peu court. De telles réactions révèlent une faille. Elles appelaient, en réponse, à défendre la légitimité d’une telle révolte. C’est ce que j’ai essayé de faire en écrivant C’est de la Racaille ? Eh bien, j’en suis ! [4] (que Agone a réédité récemment sous le titre, que je trouve assez plat, La rage et la révolte, avec une postface sur ce qui s’est passé depuis).

Suivant le point de vue d’où l’on se place, on peut voir simplement dans cette révolte une conséquence d’un système post-colonial appliqué aux immigrés et à leur descendance. Il y a du vrai dans ce point de vue, mais il nous donne une vision partielle. Après tout, la délinquance juvénile, le fameux « malaise des banlieues », étaient déjà dénoncés en 1960, et c’étaient de jeunes blancs qui semaient la terreur dans la France d’alors. À partir de ma propre trajectoire personnelle et des événements auxquels j’ai été mêlé ou que j’ai observés de près, à partir de ma ville, j’avais un autre point de vue. Pour moi, cette révolte prenait tout son sens par rapport à la construction de cette entité qu’est la France. De la même manière que la grande révolte multiraciale de Los Angeles en 1992 a radicalement mis à nu le modèle américain, la révolte de 2005 en a fait autant avec le modèle français. Deux pays qui constituent dans le monde entier des modèles idéologiques très forts - pour faire court, je dirai que dans l’un c’est l’argent qui organise le vide social, dans l’autre c’est l’État. On voit donc l’importance de ces événements.

« [...] La grande révolte multiraciale de Los Angeles en 1992 a radicalement mis à nu le modèle américain, la révolte de 2005 en a fait autant avec le modèle français. »

Même si leur matérialisation a pu varier : cette révolte a par exemple été moins importante à Marseille qu’à d’autres endroits…

Marseille est de toute façon toujours un peu à part. D’abord, il faut bien voir qu’elle a été la première ville de France où les responsables du maintien de l’ordre ont eu affaire à la révolte endémique dans les cités, dès le milieu des années 1970, et ils ont accumulé un vrai savoir-faire en matière de prévention et de répression. Pensez un peu qu’en 1976, un supermarché rue Félix Pyat fermait à cause des pillages répétés commis par les bandes du Parc Bellevue, événement répercuté dans les médias nationaux. Ce n’est pas d’aujourd’hui que les cités marseillaises sont sous observation.
En 2005, les autorités ont donc anticipé. Un exemple, dans les quartiers Est, la cité HLM Air-Bel, qui défraye régulièrement la chronique ; les flics n’avaient pas besoin de réfléchir longtemps pour identifier la seule cible potentielle là-bas, un concessionnaire Peugeot se trouvant sur un boulevard à 300 mètres de la cité : quand les minots ont débarqué un soir pour l’incendier, les CRS et la BAC les attendaient de pied ferme, et scappa via ! C’est arrivé ailleurs, au Carrefour du Merlan : un groupe descendu pour le piller a été précédé par les flics. Il est vrai que ceux-ci commencent à avoir l’habitude : dans les années 1980, il y avait de façon périodique des affrontements dans cet hypermarché, entre les jeunes des cités environnantes d’une part (Busserine, Flamands, Font Vert, Corot), les vigiles et les flics de l’autre. En 2005, enfin, le maire et le préfet se sont mis d’accord dès les premiers incidents pour imposer un black-out médiatique total : Gaudin a déclaré qu’il ne voulait pas que des incendiaires viennent ruiner dix ans de travail voués à donner une autre image de Marseille. Et, quoi qu’on dise, le fait que leurs actions passent à la télé a été un facteur très stimulant pour les incendiaires.

Après, il y a des cas particuliers. La Busserine, dans les années 1980 véritable zone de guerre avec les flics, est devenue depuis dix ans le supermarché du shit : les minots savent que s’ils caillassent une bagnole de flics, ils vont se faire camfrer par les « chefs du charbon » (selon leurs propres dires), parce que c’est mauvais pour le deal. Les petits dealers épisodiques participent eux-aussi aux caillassages des patrouilles de flics – de toute manière, nombreux sont les ados qui dealent un peu aujourd’hui, ne serait-ce que pour se payer leur consommation personnelle – ; mais ceux qui opèrent dans la catégorie au-dessus, les dealers directement connectés sur les arrivages et qui organisent un vrai business, n’ont aucune envie que ça pète avec les condés. A Marseille comme à Paris.

Mais, heureusement, les patrons du charbon ne contrôlent pas tout. Plusieurs fois par semaine, on lit dans la rubrique des faits divers que les CRS ou la BAC se sont fait caillasser dans telle ou telle cité. L’été 2009, une grenade a même été lancée contre le commissariat de la rue Felix Pyat, en plein Parc Bellevue : quatre voitures de la police ont été bousillées… Et, pour prendre l’exemple de la seule journée de hier : une voiture de police a reçu un parpaing sur le toit, cité Corot, tandis qu’à la Porte d’Aix, en-ville donc, une patrouille qui emmerdait un petit vendeur à la sauvette a été attaquée par plusieurs dizaines de personnes…
Il n’est pas rare que ça éclate en-ville, comme au Panier, il y a une dizaine d’années : un groupe de six inspecteurs s’est fait massacrer par les jeunes du quartier, place de Lenche, où ils avaient eu l’imprudence de venir dîner en terrasse une fois leur service terminé ; le vin aidant, ils ont commencé à apostropher des jeunes, et la réaction n’a pas tardé. Les six sont repartis sur des civières, un dans le coma. Les jeunes se les ont pris à coups de U, vous voyez ces U d’acier avec un gros cadenas qu’on met sur les scooters… Un canard parisien a titré alors quelque chose comme « le malaise des banlieues en plein cœur d’une ville française ! ». Même avec l’invasion des cultureux et des bo-bos, il y a toujours au Panier des bandes de jeunes à qui il ne faut vraiment pas aller chercher des embrouilles, ce qu’avaient fait ces flics. D’ailleurs, en ce moment, tous les nouveaux arrivants du quartier se font systématiquement cambrioler et saccager leur appartement, le journal La Provence a même dénoncé «  la bande de la place de Lorette » comme responsable de ces actions… Pour le Parisien branché qui croyait se retrouver dans Plus belle la vie, grosse déconvenue !

On rejoint là ce que tu racontes dans La Racaille…. Marseille a un centre-ville pauvre, plus ouvert aux jeunes des cités…

Et cela crée un sentiment d’appartenance commune – que chacun décline aussi à sa manière, selon ses origines et ses affinités. En 1981, j’étais allé aux Minguettes avec des amis : ça m’avait espanté de découvrir à quel point, quand tu étais aux Minguettes, tu étais au mieux à Vénissieux, la commune sur laquelle la Zup a été bâtie, mais certainement pas à Lyon. Et quand on montait à Lyon avec des jeunes de la Zup, la ville nous faisait sentir qu’on n’était pas les bienvenus : avec cette hostilité feutrée d’un centre-ville fait pour les bourgeois.
À Marseille, les gens qui vivent dans les cités des quartiers Nord ou Est ne sont pas aussi radicalement exclu de la ville – en tout cas de ce qui fait l’essence de la ville, un espace où ça se mélange un tant soit peu, un espace où chacun puisse éprouver l’altérité ; et qui, en cela, est plus que la simple somme des parties périphériques. Bien sûr, quand tu vis à la Savine ou au Parc Kalliste, à l’extrême limite des quartiers Nord (après c’est la garrigue…), tu as rarement l’occasion de descendre en-ville – pour l’OM, ou un concert de rap. Tu descends d’abord à Saint Antoine, ou à Grand Littoral. Mais tu sais que si tu descends en-ville, tu ne seras pas en territoire hostile.
Autre chose : l’immigration actuelle est en grande partie nord-africaine, c’est à dire méditerranéenne. Et tout autour de la Méditerranée, on a des codes communs : le rapport à la parole – la tchatche – mais aussi au silence, la culture du trafic et de l’arrangement, un certain sens de l’honneur et de la pudeur, la solidarité instinctive du groupe, etc. bref, un ensemble de choses qui constituent les éléments d’un langage. Celui-ci est peut-être pauvre et empreint d’archaïsme aux yeux d’un intellectuel parisien, mais il existe. Quand les immigrés arrivent à Marseille, ils découvrent des fonctionnements locaux dans lesquels ils n’ont pas trop de mal à entrer, des fonctionnements assez claniques, qui génèrent à leur tour un fort sentiment d’appartenance local, au quartier ou à la cité, et qui vont de pair avec une identification à la ville tout entière.

Pour revenir à votre question… Les éléments qui ont nourri la révolte de 2005 sont présents à Marseille comme ailleurs, mais ils réagissent entre eux selon une alchimie différente.Si la tragédie de Clichy-sous-Bois s’était produite ici, je peux vous garantir que ça aurait explosé. Mais même en ce cas, cela se serait exprimé sans doute un peu différemment ; si un jeune incendie une voiture dans une cité des quartiers Nord, il a vraiment intérêt à bien la cibler parce que tout le monde se connaît…

« Les éléments qui ont nourri la révolte de 2005 sont présents à Marseille comme ailleurs, mais ils réagissent entre eux selon une alchimie différente. »

Ce n’est pas la même chose à Paris ?

Je n’ai pas l’impression. J’ai plusieurs fois entendu des Parisiens descendus ici me dire : « Les jeunes de la banlieue, là-haut, ils sont vraiment durs, impossible de parler avec eux, le moindre problème ça tourne à la violence, alors qu’ici vous arrivez assez bien à gérer tout ça avec la tchatche… » Ce qui ne manquait pas de m’amuser : quand je vivais en France, dans les années 1980, j’entendais régulièrement cette remarque : « Oh, les Marseillais, tout ce qu’ils savent faire, c’est parler… » Au moins, nous, on sait faire ça, parler... Après, ne rêvons pas, il y a ici aussi des situations où la tchatche ne fonctionne plus.
Pour revenir à l’hostilité des jeunes de cités envers les flics… elle s’exprime ici beaucoup autour du football, comme le confirme une série récente d’affrontements en-ville après-match. Le clou, ça a été quand les supporters du PSG sont descendus en-ville en octobre 2009…

Ils se sont jetés dans la gueule du loup, non ?

Je comprends ! L’annulation du match, annoncée deux heures avant, avait créé une situation inédite. Le dispositif policier, désormais bien rodé à chaque match OM-PSG, n’était pas préparé à ça. Tous ces escadrons de CRS, c’est lourd à déplacer… Du coup des centaines de supporters parisiens ont pu descendre en ville. Un groupe est monté aux Allées Gambetta attaquer le bar qui sert de local au Club Central des Supporters – juste eux, le pur club de pères tranquilles qui vont aux tribunes ! Le temps qu’ils cassent un peu par-là, les nôtres arrivaient de tous côtés, en scooter, en courant, et là les Parisiens ont reçu la grosse punition. Une femme leur a même jeté une télévision depuis sa fenêtre… Ensuite les CRS sont arrivés, et ont réussi à isoler les Parisiens en nous arrosant de grenades lacrymo et à les accompagner jusqu’à la gare. Mais même là-haut, à St Charles, certains des nôtres ont continué à les harceler en passant par les voies ferrées… Une fois les Parisiens partis, ça a continué : les voitures de flics se sont faites systématiquement caillasser pendant toute la soirée.
En même temps, au Vieux Port, ceux de Boulogne faisaient le salut nazi : forcément, tout le monde est devenu fou… Les flics les avaient tirés des mains des Marseillais et repoussés contre des immeubles ; les habitants leur jetaient des pots de fleurs, des œufs, des seaux d’eau, ça faisait très émeute médiévale. Il y avait de l’ambiance… une bonne humeur partagée dans les rues du centre. Pendant quelques jours, ça a été un sujet de discussion à l’apéro…

De façon générale, l’après-match d’une victoire importante est une situation assez chaude à Marseille. Quand des dizaines de milliers de gens occupent de façon spontanée le centre d’une ville, l’affrontement avec les flics survient, tôt ou tard. Ce n’est pas nouveau. En 1991, par exemple, quand l’OM a gagné contre le Spartak de Moscou en quart de finale de la coupe d’Europe, les affrontements ont duré des heures : on était sur le Vieux Port, les CRS sur la Canebière, et ça a cartonné, caillasses contre lacrymo… Scénario inverse un mois après, quand on a gagné contre l’AC Milan en demi-finale : là, on tenait la Canebière et eux le Vieux Port. La seule présence des CRS avec leur équipement suffit à faire remonter la haine, après ça part tout seul.

Hors du foot, quand est-ce que les premières révoltes d’importance ont eu lieu à Marseille ?

Ça a explosé en octobre 1980, le jour où un CRS a tué un jeune dans le quartier Nord. Du coup, les quartiers ont déboulé au centre-ville, à la Préfecture, et se sont bastonnés avec les CRS. C’est la première et la seule fois où la banlieue a tapé au cœur d’une ville, indépendamment d’une manif lycéenne ou étudiante. Ça a duré toute une soirée, avec le centre-ville inondé de lacrymos… Le gars est mort le samedi soir, et ça s’est passé le lundi en fin d’après-midi (c’était une marche en l’honneur de la victime, mais qui a fini en baston général). Après, ça a été chaud pendant plusieurs années – jusqu’à ce que la poudre - l’héroïne - ruine toute l’énergie.
À la Cayolle, toujours en 1980, après un déboulé massif et particulièrement brutal des flics dans la cité (lui-même consécutif au caillassage d’une voiture qui coursait un voleur de moto), les gens ont barricadé les accès et ouvert le feu sur le premier car de flics qui s’est présenté ce soir-là. Six mois après, les gars du SAC [5] (parmi lesquels des flics) faisaient sauter une bombe dans un hall d’immeuble de la cité, tuant un gitan de huit ans…

Pour cet affrontement, quand les jeunes des quartiers ont déboulé au centre-ville, on retrouve le même mécanisme qu’en 2005 ? Un assassinat policier qui lance les hostilités ?

Oui. À l’époque, ça se concentrait beaucoup dans les cités de la Zup n°1 (la Busserine, Font-Vert, Corot, les Flamants, d’où était le jeune qui avait été flingué), d’autres aussi comme la Paternelle ou les cités de la Rose, plus à l’est (Frais-Vallon, Le Clos, etc.) ; et le Parc Bellevue, bien sûr, à Saint-Mauront. Et puis la Cayolle, toujours n° 1 au box-office (l’an dernier, les jeunes de cette cité perdue dans les quartiers Sud ont incendié un appartement témoin d’une zone pavillonnaire de luxe en cours de construction, qui va dévorer la pinède derrière la cité : « On veut pas de bourges ici ! », ont expliqué ceux qui ont été arrêtés les jours suivants). Mais, pour revenir à octobre 1980, le lundi en question ce n’était pas seulement les gars de ces cités des quartiers Nord qui étaient descendus en-ville : ça venait aussi de la Belle de Mai ou du Panier, Arabes et Blancs ensemble. Nous, on ne connaissait pas le jeune qui avait été tué, mais on s’est tous identifié à lui.

 [6]

Quant tu dis « nous », c’est qui ?

Une équipe d’en-ville et de la Belle-de-mai avec qui je traînais alors. Une bande composée d’une part d’anciens d’un lycée technique, qui avaient participé aux affrontements de la gare St Charles en 1979, et de l’autre de « rockers ». C’était looké cuir noir, beaucoup de bagarres avec des bandes de mias (les prolos-minets, sapés et qui allaient eux en discothèque), on allait harceler les CRS à l’occasion de concerts où, de toutes façons, on ne pouvait pas rentrer (les Stray Cats, Trust etc.). En ce qui me concerne, j’avais déjà pas mal circulé auparavant et vécu des situations d’affrontements dans la rue, pour parler de 1980/81, c’étaient avec ces gars-là que je marchais à Marseille.
Parfois, je bougeais, aussi. Par exemple, à l’été 1981, je suis monté à Liverpool. Et là-haut, grosse secousse…

Fallait être salement motivé, pour faire le déplacement jusqu’à Liverpool…

Sans doute ; c’était aussi une façon de s’échapper un peu de Marseille… On n’hésitait pas à manger des kilomètres quand on pensait que ça en valait le coup. Une bonne manière de voir le monde, quoi… Liverpool, j’y suis allé avec ma compagne de l’époque et un ami qui venait de sortir de taule.
On avait lu dans un canard français qu’une marche anti-police allait se dérouler le 15 août à Liverpool. On ne voulait pas rater ça : juste avant, au mois de juillet, toute l’Angleterre prolétaire avait explosé, aucune ville n’avait été épargnée, mais c’est à Liverpool que ça avait été le plus puissant. Un destroy incroyable ! Ils avaient même incendié des banques, des bâtiments entiers s’étaient écroulés ! Et donc, on s’est dit que ça allait forcément péter à nouveau pour le 15 août.

« On n’hésitait pas à manger des kilomètres quand on pensait que ça en valait le coup. Une bonne manière de voir le monde, quoi… »

À Liverpool, le jour de la marche, c’était la folie. C’est de suite parti au carton avec les condés. Les bobbys étaient très mal équipés, ils ont été laminés… Des vieux venaient nous encourager, l’ambiance était très sympathique. Et puis, Liverpool, c’était un peu le Marseille de l’Angleterre : ils ont leur propre façon de parler et une identité très portuaire, très ouvrière, et beaucoup ont connu un jour ou l’autre la prison. Les gens nous offraient l’hospitalité sans problème. Et comme à Marseille, presque toutes les usines fermées.
Un gars, rencontré pendant les affrontements du 15 août, nous promène quelques jours après vers le port, et énumère : telle usine, fermée il y a deux ans, telle autre il y a six mois etc. Quand, au bout d’un moment, je lui demande s’il y a encore une usine qui fonctionne à Liverpool, il me répond sans hésiter : « Yes, the cops ! » Lui-même a plongé peu après, pour une vieille histoire de casse, je n’ai jamais réussi à le revoir lorsque je suis repassé plus tard dans sa ville. Dommage, c’était un gars vraiment à la coule, un vrai scouser.

Une anecdote : le samedi, on se trouve dans le centre de Liverpool, une heure avant la marche, plein de condés partout, on va voir un groupe de jeunes, des blancs, tout de jeans vêtus, on leur dit qu’on est venu pour la marche, ils hallucinent (« Hey, they’re coming from France for fighting the riot ! »). On sympathise, et à la fin ils nous demandent si on avait pris des couteaux avec nous en vue de la marche… C’était le samedi, hein, le lundi, dans le canard local, on voit que, parmi les flics blessés, il y en avait un dans le coma après s’être pris un coup de lame…

On a quand même fini par revenir en France, et on s’est aperçu que ça chauffait aussi, spécialement dans la banlieue lyonnaise. Je me faisais peut-être un film, mais entre l’Angleterre d’un côté et la France de l’autre, je voyais s’amorcer un saut qualitatif extraordinaire : tout ce qu’on avait vécu de façon éparse et isolée durant la décennie 70, tout ce qu’on avait connu dans la clandestinité du vécu quotidien, ressortait là de façon collective, une puissance énorme qui prenait corps. Nous, les « délinquants juvéniles », les voleurs de voitures du samedi soir, les chômeurs-à-vie, toute cette jeunesse qui ne s’intégrait pas, on en arrivait là, à occuper la rue, massivement et ouvertement. J’avais l’impression qu’il y avait comme un sujet historique qui déboulait comme ça, sans crier gare, et qui allait tout niquer. Une jeunesse qu’ils ne pourraient pas digérer, pas comme avec les étudiants. On est donc allés voir par là-bas, à la rencontre des gars à Vénissieux, dans la Zup des Minguettes. Après, on a aussi circulé en banlieue parisienne. C’était une période particulière, avec de bonnes énergies. On a rencontré beaucoup de monde, des gens parfois extraordinaires, dont celui à qui j’ai dédicacé le livre, Mustafa Amine, le « sultan noir » de Vitry.
Vers 1980-81 dans les banlieues, les gens cherchaient encore à se rencontrer, ça bouillonnait. Je vous parle là de rencontres informelles, ça ne passait pas par le truchement d’associations ou de structures socio-cul, ni de groupes politiques, juste quelques jeunes qui vont rencontrer leurs semblables dans d’autres banlieues d’autres villes. Dans un esprit très rock’n roll, comme c’était à l’époque. Je crois que ce serait impensable aujourd’hui, de se déplacer comme ça.

« J’avais l’impression qu’il y avait comme un sujet historique qui déboulait comme ça, sans crier gare, et qui allait tout niquer. Une jeunesse qu’ils ne pourraient pas digérer, pas comme avec les étudiants. »

Ça n’a pas duré ?

En 1983, date de la Marche des beurs [7], tout était déjà fini. L’optique s’était inversée : alors que les jeunes des cités se plaçaient en combattants en 1981, ils se posaient en victimes en 1983. Dans la banlieue lyonnaise, des jeunes immigrés se faisaient flinguer, par des flics ou des Français moyens [8] au doigt crispé sur le 22 LR.

Je comprenais la motivation des jeunes qui avaient lancé cette marche, j’en connaissais certains. Je suis resté en dehors, toutefois. J’y voyais un remake peu crédible de la Marche des Noirs américains pour les droits civiques, en 1965 –d’autant que Delorme [9] n’avait certainement pas le charisme de Martin Luther King. Mais, en tant que visage-pâle qui n’a pas à endurer personnellement le racisme, je ne me sentais pas autorisé à aller faire la leçon à des jeunes traumatisés par ces assassinats racistes se multipliant partout dans le pays. D’autant que du racisme, j’en souffrais aussi, d’une certaine manière – quand tu as des amis arabes, berbères, et que tu entends cracher le venin de la haine sur leur compte presque partout où tu vas, c’est insupportable. Mais je ne pensais pas que la Marche y changerait quoi que ce soit.
Ceci dit, même parmi la jeunesse d’origine nord-africaine, l’initiative n’a pas fait l’unanimité. Je me souviens d’une déclaration d’un collectif de jeunes immigrés de Nanterre qui y était hostile, dénonçant le fait que la marche était lancée par un prêtre et reçue à Paris par un ministre. Et ils se refusaient à réduire cela à un problème de droits civiques. C’est aussi ce que disait Mustafa, de Vitry : « Ce qui se passe dans les cités n’est pas une question de races, mais une question de riches et de pauvres. »

L’année 1983 correspond aussi au moment où la gauche abandonnait la social-démocratie pour le libéralisme déclaré. Et pour se différencier de la droite, cette gauche libérale allait s’appuyer sur deux axes : la culture - avec Jack Lang - et les droits de l’homme. Ils ont mis le paquet sur ça, sur du pur discours - la France est sans doute le plus gros producteur de discours au monde… Et puis, ils avaient senti une vraie puissance à l’œuvre dans la révolte des banlieues, et il leur fallait la neutraliser.

Pour toi, la marche de 1983 était une façon de canaliser la révolte ?

Pour ceux qui l’ont inspirée, Delorme, la Ligue des droits de l’homme, etc. clairement. Pour Toumi Djaïdja aussi. Pour les autres jeunes des Minguettes qui y ont participé, c’était différent, et sans doute assez confus.
Il faut rappeler que tout cela a démarré quand, à la suite d’affrontements en mars 1983 aux Minguettes, un jeune de la Zup, Antonio Manunta, a été emprisonné : ses copains ont alors lancé une grève de la faim pour sa libération. C’est là que Christian Delorme, prêtre à Vénissieux, est venu les voir et leur a livré tout un discours à base de pacifisme, de Gandhi… Les anti-racistes professionnels étaient là aussi, des avocats de gauche etc. Ils proposaient aux jeunes des objectifs négociables avec un pouvoir de gauche. Mais quoi ? La reconnaissance explicite par la République des jeunes immigrés « seconde génération » comme Français à part entière. En effet, ça a été le message de Mitterrand quand il a reçu à l’Elysée Toumi Djaïdja. Pensez un peu qu’il était le petit frère d’Amar Djaïdja, alors emprisonné, et pour longtemps, à la suite d’un casse ; ce dernier incarnait tout le contraire, rock’n roll à fond, c’était un des premiers s’étant amusé avec une BMW volée à percuter délibérément un car de flics, en pleine ZUP, en juillet 1981. Après le jeu s’est répandu et est devenu le cauchemar des patrouilles… Mais deux ans plus tard, Amar en prison, et Toumi reçu à l’Élysée !

Ce que j’ai vu alors, c’est comment s’organise le spectacle de la politique. Parce qu’au départ, il y a simplement des jeunes qui mènent une action de soutien à un copain enchristé – lequel était un fils d’immigrés italiens, il y en avait beaucoup aux Minguettes, pour dire que le racisme était d’emblée dépassé dans cette affaire où des jeunes, principalement nord-africains soutiennent leur copain italien sans se poser de questions. Et soudain, déplacement de perspective, il s’agit d’interpeller la France entière sur la question du racisme. Des gens qui mènent une action concrète – soutien public à un gars de la ZUP arrêté après un baston contre les flics - se retrouvent propulsés sur une action spectaculaire, i.e qui s’adresse à un public abstrait, représenté en dernière instance par les institutions, par le gouvernement.

Il y avait quand même un côté plus bienveillant de l’opinion publique dans les années 1980, non ? Quand tu racontes ton dégoût devant les réactions suscitées par la révolte de 2005 chez les anciens, ça correspond à une évolution ?

Plus bienveillant ? Ce n’est pas le souvenir que j’ai. Une évolution ? J’ai des copains de 40-50 ans qui ne parlent pas volontiers de ce qu’ils ont vécu quand ils en avaient 20 : il y a comme une auto-censure, sous-entendu « Ouais, on était jeunes et complètement cramés ». Face à cette nouvelle génération – disons celle de 2005 – , ils se renferment sur eux-mêmes. Ils se plaignent de ce que ces jeunes ne respectent rien ni personne – à commencer par eux, les anciens. C’est vrai qu’il y a un problème de respect, mais je crois qu’il s’agit d’abord d’un manque de confiance entre générations. Après, au niveau de l’adolescence, on observe aussi des comportements chroniques qui sont parfois à la limite de la sociopathie – et là-dessus, jeunes immigrés des banlieues et jeunes de la classe moyenne blanche sont à égalité. La moindre réflexion d’un adulte qui pourrait être interprétée comme une manifestation d’autorité, et la réaction violente advient immédiatement. Ne croyez pas que je me la joue « Ah, les jeunes d’aujourd’hui… » : j’étais comme ça quand j’avais leur âge. Et je sais que ça ne m’a pas toujours aidé… Les anciens dont je parle, ils ont connu ça aussi et ils voient ceux de la nouvelle génération encore plus à cran, encore plus cramés – parce qu’en plus, la cocaïne, le crack, le rohypnol et toutes ces saloperies n’arrangent rien. Bref, en 2005, ces anciens n’arrivaient pas à voir la différence qualitative entre cette violence bornée du quotidien et celle d’un affrontement collectif contre l’État.

Que les « grands frères », qui sont plutôt des pères de famille, maintenant, soient ainsi dans l’incompréhension, c’est terrible. Parce que la transmission de l’expérience, la constitution d’une mémoire, est quelque chose d’essentiel et que son absence explique aussi certaines formes de la révolte actuelle. Quant aux plus anciens, la première génération d’immigrés nord-africains, les pères de famille qui ont 60 ou 70 ans, certains tiennent des propos encore plus durs à l’encontre de cette jeunesse. Dans mon immeuble, je sais par exemple qu’il y a au moins deux pères de famille arabes qui ont voté Sarkozy à la présidentielle (je le sais par d’autres Arabes de l’immeuble, qui en étaient ulcérés). Ce n’est pas difficile de deviner pourquoi : pour eux, Sarkozy incarne le rétablissement de leur autorité de père de famille qui a été bafouée.

« Que les "grands frères", qui sont plutôt des pères de famille, maintenant, soient ainsi dans l’incompréhension, c’est terrible. »

Pourtant, tous n’ont pas eu un regard négatif sur les émeutes spontanées de 2005 ou 2007…

C’est vrai… je cite là des cas limites. Les choses sont plus nuancées, en réalité. Et puis, en 2005, la tranche d’âge des révoltés était plutôt large : ça allait de gamins de 12 ans jusqu’aux grands frères trentenaires. Si les « grand frères » sont supposés calmer les plus jeunes, il peut aussi arriver qu’ils les fassent bénéficier de leur propre expérience dans l’affrontement avec les flics… En tout cas, il serait souhaitable que cela arrive plus souvent, l’immaturité et l’inexpérience ayant parfois des conséquences catastrophiques, comme on l’a vu avec des incendies d’autobus. Les plus âgés sont souvent enfermés dans le rôle des grands frères responsables qui appellent au calme, et en tant que tels ils n’ont que peu de crédibilité auprès des plus jeunes quand la rage explose après la mort d’un des leurs, alors qu’ils peuvent contribuer à ce que la violence soit plus ciblée. On en revient à ce que je disais il y a deux minutes, sur la confiance et le respect. À Clichy-sous-Bois, là oui, des adultes ont participé, surtout après que les CRS aient balancé une grenade lacrymogène à la sortie de la mosquée. À Clichy ça a pris un caractère plus proche de ce que j’avais vu en Angleterre en 1981.

En même temps, c’est aussi quelque chose que Sarkozy a utilisé, dont il s’est servi…

C’est clair qu’il a tiré son épingle du jeu. Et que l’événement a alimenté la surenchère sécuritaire, le discours répressif. Mais il en aurait de toute façon été ainsi. Au téléspectateur-électeur, qu’importait la mort de deux adolescents à Clichy ? « S’ils ont fui, c’est qu’ils avaient quelque chose à se reprocher », je l’ai lu tant de fois, dans les jours suivants cette tragédie, dans les commentaires de sites internet ! Mais les voitures brûlées… La dramatisation médiatique exploite un pur registre affectif, en l’occurrence la réaction de l’électeur-téléspectateur qui est également propriétaire d’un véhicule automobile. Et savoir exploiter ce registre, c’est gouverner la France.

Je veux dire que les discours en bois que j’entends par-ci par-là, genre « les jeunes des banlieues se sont fait manipuler par Sarkozy », me niflent sérieusement. Ce pays est de toutes façons plongé jusqu’au cou dans le sécuritaire, et il sera bientôt difficile de trouver un angle mort pour éviter la vidéosurveillance, pour ne pas être tracé en permanence par les puces RFID et échapper aux techniques d’identification toujours plus affinées. J’évoque dans La Racaille… cette volonté d’aller vers l’état d’exception permanent, en notant qu’elle est de toute façon inhérente au concept de l’État souverain. La gauche, dont tout le discours est basé sur le fantasme idéologique d’un État bienveillant qui redistribuerait les richesses de façon égale, a fini par faire oublier aux classes laborieuses ce qui a longtemps été une évidence.
À savoir que l’essence de l’État, c’est la guerre. Ou du moins la spécialisation de la guerre, la guerre comme activité spécialisée, comme division particulière du travail. Au fondement du système étatique se trouve le fait d’imposer sa protection à des gens qu’on a désarmé. L’État, précisément parce qu’il détient le monopole de la violence, doit élaborer et perfectionner à l’infini des dispositifs de contrôle et de répression, qui se présentent aussi comme dispositifs d’assistance, appliqués aux populations qu’il prétend protéger. A ce stade-là, l’armée n’est plus qu’une composante de l’État, mais le système tout entier fonctionne selon la logique militaire d’une organisation verticale et centralisée.
Cela signifie aussi que cette gigantesque combinaison de dispositifs doit fonctionner de toute façon. Comme l’armée : il faut qu’elle ait régulièrement des occasions d’intervenir, dans un pays d’Afrique, en Afghanistan ou ailleurs, pour rester d’attaque : une armée qui n’a jamais l’occasion de faire la guerre se rouille. Donc, le ministère de l’Intérieur tend de plus en plus à fonctionner comme celui de la Défense. Il lui faut des ennemis, ciblés et isolables, pour éprouver sa puissance.
Dans cette épreuve, l’État trouve la confirmation de sa propre essence. Sans oublier une chose extrêmement importante : tout ce qui est actuellement expérimenté dans les banlieues pauvres pourra servir en cas de soulèvement général, soit en France, soit dans divers pays d’Afrique où la France est présente. Il s’agit là de véritables savoir-faire, qui peuvent être exportés dans le monde entier ; ça a par exemple été fait dans les années 1960 : en matière de tactiques et de stratégie contre-insurrectionnelle, liée à l’expérience des guerres coloniales, la France a apporté une contribution unique, rarement mise en lumière – même la CIA a appris des Français pour ses opérations en Amérique latine.

« Ce pays est de toutes façons plongé jusqu’au cou dans le sécuritaire, et il sera bientôt difficile de trouver un angle mort [...]. »

L’État fondait jadis sa légitimité sur la protection de ses ressortissants face à un ennemi extérieur (ennemi qui n’était autre qu’un État concurrent, bien sûr…). Mais dans les pays riches d’Europe occidentale, qui ont repoussé la guerre au loin, chez les « sous-développés », la protection de l’État doit à présent s’exercer face à un ennemi intérieur. Je pense que la France, de ce point de vue, a été d’avant-garde, parce que c’est le premier pays d’Europe à avoir reçu une immigration étrangère importante. A la fin du XIXe siècle, les immigrés de l’époque furent ainsi désignés à la vindicte des Français ; ce qui est nouveau à cet égard, c’est que l’État désigne maintenant à la même vindicte des gens qui sont eux-mêmes Français – des Français de seconde zone et première génération, sans doute, puisqu’on en vient à envisager la possibilité de leur retirer la nationalité en cas de besoin. Et l’on voit, de façon plus générale, des techniques jusque-là réservées au contre-espionnage appliquées couramment à des citoyens français. La fusion des RG et de la DST dans un service unique confirme bien cette évolution.
À présent, l’essence de l’État est en train de rejoindre son concept : garantir spectaculairement la protection de qui s’est laissé volontairement désarmer, contre qui ne s’est pas encore laissé désarmer. La banlieue pauvre constitue le terrain d’expérimentation privilégié de cette logique.

J’évoquais dans La Racaille… la figure paternelle de l’autorité étatique, qu’incarne le flic en uniforme auquel on ne s’adresse jamais sans un peu de crainte – ou de haine, dans certains endroits. Mais l’État en est arrivé à incarner aussi, en France, la figure maternelle. La majorité des Français ont à présent avec l’État une relation fusionnelle, qui est de même nature que celle d’un nouveau-né avec sa mère – alors que la relation au père implique toujours de la distance. Ils sont en demande permanente de cette protection qui vient d’en haut, de l’État et de ses spécialistes. Lesquels les traitent comme de petits enfants à qui l’on peut raconter ce que l’on veut. Une épidémie de grippe inédite est annoncée ? L’État veille, qui commande des tonnes de vaccin comme il commandera une autre fois des tonnes d’obus, toujours pour vous protéger. Seul problème, l’épidémie était elle-même une invention du ministère de la Santé… Et tout à l’avenant. C’est ce désarmement initial et final des gens qui les rend à présent réceptifs à n’importe quelle manipulation gouvernementale, par exemple les discours sur l’insécurité et les jeunes de banlieue.
C’est en tant que système destiné à faire la guerre que l’État devient une institution politique (ce qu’il est dés le départ). J’ai consacré un gros chapitre à cette transformation, dans mon livre sur Marseille, ce moment historique qu’on appelle la Révolution française. La structure militaire de l’État est imprimée à la sphère politique : ce n’était pas évident, au départ, il existait des formes politiques autres, communautés paysannes, communes citadines, dont on voit ressurgir l’esprit en période de troubles (les sections populaires de 1792, la Commune de 1871). Mais elles sont toutes liquidées au profit de l’État comme unique institution politique. Que le politique soit ainsi modelé par le militaire, c’est l’acte de naissance de l’État moderne, on peut le dater – c’est la grande œuvre des Jacobins. C’est aussi pourquoi, contrairement à ce que l’on croit, l’État n’est finalement pas le lieu de la politique mais celui de sa liquidation. Il est le lieu du spectacle de la politique, qui se déroule sous les yeux de ceux qui ont été dépossédés de cette activité.

À partir de là, ceux que l’on a dépossédés, désarmés, les citoyens à présent terrorisés par la racaille, acceptent parfaitement que des gamins de 15 ans meurent pour rien – même pas pour avoir commis un délit, juste pour éviter un contrôle ou pour s’être amusé avec une mini-bécane. À Villiers comme à Clichy, ce sont des minots qui sont morts, presque des enfants, et la France entière semble trouver ça normal. Récemment, le 19 juillet, une certaine Élisabeth Levy [10] appelait, sur RTL, à envoyer l’armée dans les banlieues en disant « On est en guerre » (qui donc est censé recouvrer ce « on » ? les auditeurs de RTL, ou simplement les gens de son milieu social ?) : si cette radasse sortait un tant soit peu de sa bulle, elle verrait que la militarisation est déjà la réalité quotidienne de nombreuses cités de banlieue pauvre, à Villiers-le-Bel notamment. Les hélicoptères à basse altitude, qui braquent leurs projecteurs jusque dans les appartements en pleine nuit, ça évoque quoi, sinon la guerre ? Et celle-ci ne se mène pas seulement au détriment de quelques centaines de « racailles », mais de tous ceux qui vivent dans les cités. Comme à la Courneuve, le 27 juillet : des gens, expulsés d’une barre d’immeuble destinée à la démolition, occupent la place publique et se font embarquer sans ménagement par les CRS. La Courneuve, c’est là où Sarkozy parlait de passer le Kärcher : il a tenu parole, et ceux qui ont été pénalisés ne sont pas les dealers qui hantaient l’immeuble en question – qui sont sans doute allés installer leur biz ailleurs - mais des familles d’immigrés, des femmes, des enfants, à présent sans logement. Et l’immeuble sera détruit comme il a été construit : sans discussion.

« [...] La militarisation est déjà la réalité quotidienne de nombreuses cités de banlieue pauvre, à Villiers-le-Bel notamment. »

Sarkozy s’est contenté de renforcer cette machine militaire, ce que fait chaque Président, et d’amplifier encore la rhétorique guerrière contre les banlieues, ce que fait tout candidat éligible à chaque élection présidentielle. Ce côté hargneux qu’il affiche en plus, c’est l’image d’une droite à l’américaine, « décomplexée » comme il dit. Ce n’est plus la France des notables, c’est celle des managers. Quant à la gauche, elle a une responsabilité énorme en France parce qu’elle a fait intérioriser par le monde ouvrier le culte et l’idéologie de l’État, à travers le discours républicain – regardez par exemple la genèse d’un des principaux corps de répression, les Compagnies Républicaines de Sécurité. L’esprit d’insubordination à la Loi, qui hantait les mondes ouvriers d’avant la Première Guerre mondiale, a été pacifié par les militants de gauche - la haine du flic était pourtant forte chez les ouvriers si l’on en croit les témoignages de l’époque. Ce qui a contribué aussi à interdire toute connivence des générations : parce que nous voyons bien que la haine des flics persiste chez les jeunes des quartiers pauvres, qu’elle se reproduit d’une génération à l’autre. Des Apaches de 1900 aux « racailles » de l’an 2000…

Ceux qui déplorent et blâment le caractère sauvage des révoltes de 2005 feraient mieux de prendre la question dans l’autre sens : le discours idéologique républicain a anesthésié toute culture de la révolte. Tout est tellement institutionnalisé dans ce putain de pays… Aucun espace n’échappe à l’État et à sa logique, relayée par les partis et les syndicats. Où existe-t-il aujourd’hui un espace public qui ne soit pas configuré par des dispositifs mis en action par l’État, par ses administrations ? Les manifs ne vous laissent que le droit de défiler sur le parcours autorisé – essayez simplement de sortir du cortège pour aller écrire un slogan à la bombe de peinture sur un mur, et la BAC intervient aussitôt, et ce ne sera certainement pas le s.o de la manif qui ira vous en libérer. Le moindre écart est aussitôt puni.
Dans les mouvements de jeunes, il y a plus de fraîcheur et de joie de vivre, ils ne sont pas engoncés dans les institutions politiques et syndicales. Et pourtant, celles-ci sont à l’affût : prenez l’exemple des services d’ordre syndicaux. Dans les manifs lycéennes où on allait, avec mes amis, en 1973, les gros bras de la CGT cherchaient déjà à imposer leur loi, à empêcher tout débordement. On pouvait se demander : qu’est-ce que fichait la CGT dans une manif lycéenne ? Ils nous traitaient d’éléments extérieurs (alors qu’on avait encore la plupart de nos copains dans ces lycées et collèges) ; mais eux, alors ? Depuis, ça n’a pas changé : en 2006, les petites frappes du s.o CGT faisaient la chasse aux jeunes à capuche dans le mouvement anti CPE. Soi-disant pour éviter de nouvelles agressions, comme aux Invalides. Et les lycéens se trouvaient ainsi infantilisés, comme s’ils n’étaient pas capables de s’organiser pour assurer leur propre défense. En réalité, les partis et les syndicats cultivent une telle incapacité : les gars, manifestez gentiment, selon le parcours autorisé, nous on s’occupe de votre sécurité. C’est ainsi qu’on fabrique une génération immature, inapte à la moindre confrontation physique. Et ça, c’est la gauche.

-

Le deuxième volet de l’entretien est à lire ICI.

Notes

[1] Photographie prise depuis le balcon de l’appartement d’Alèssi.

[2] Publiée aux éditions Agone. Il revient sur cet ouvrage dans la deuxième partie de l’entretien.

[3] Aux éditions L’Échappée, réédité très récemment par les éditions Agone, sous le plus fade titre La Rage et la révolte. On parlait de la première édition ici.

[4]

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17 novembre 2010 3 17 /11 /novembre /2010 08:05

De temps en temps, nous recevons le nouvel épisode du feuilleton d’Henri Mora et des Quelques Opposants au Center Parcs dans les Chambarans. Center Parcs ? ... Chambarans ? ... Vous savez, ce projet de destruction touristique d’une splendide forêt de l’Isère, par le groupe Pierre & Vacances soutenu par le Conseil général, l’un des bailleurs de fonds de la FRAPNA (fédération Rhône-Alpes des associations de protection de la nature). Autant dire que l’opposition de la FRAPNA au projet est en raison inverse de la subvention reçue.

 

Mais peut-être n’aimez-vous pas les sous-bois boueux par une belle nuit de brouillard en novembre ? Heureusement, il y a Henri Mora et les Quelques Opposants, .....

 

Ses feuilletons ressemblent-ils à sa forêt ? Il tourne en rond, il n’en finit pas d’entrer en matière, il est question d’Orwell, de Mandrin, on se dit, ça y est, ce coup-ci il s’est perdu, il bat la campagne et - surprise - l’animal retrouve sa trace, arrive où il veut en venir ; il y a bel et bien un chemin nécessaire entre ses longs préliminaires, ses feintes digressions et la promenade du jour. On se dit que, vraiment, il y a des trésors cachés dans cette forêt des Chambarans, et qu’il serait criminel de la laisser raser par une conjuration de technocrates et de marchands de bois.

 

(Pour lire les deux derniers épisodes du feuilleton, "L’arbre qui cache la forêt", et "Une fissure dans le consensus", cliquer sur les icônes ci-dessous.)


L’arbre qui cache la forêt
Version prête à circuler
196.7 ko

Une fissure dans le consensus
Version prête à circuler
153.4 ko
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16 novembre 2010 2 16 /11 /novembre /2010 10:47

quelques questions au sujet de ce sommet de Lisbonne 15 -21 novembre 2010

L’OTAN va faire entériner son « Nouveau Concept Stratégique » lors du prochain sommet des chefs d’Etat de l’Alliance, à Lisbonne, en novembre. 

Les enjeux et les conséquences qui en découlent sont immenses. 

Le concept stratégique défini en 1999 avait déjà permis une transformation radicale de l’OTAN. Alliance militaire défensive à sa création, elle était devenue une organisation de «gestion de crise». S’en sont suivies des interventions offensives massives à « caractère exceptionnel » et sans autorisation préalable de l’ONU qui ont provoqué des milliers de morts. 

« Élargissement des possibilités d’intervention hors zone », « alliance plus réactive sur le plan décisionnel », « sécurité des approvisionnements énergétiques », « club des démocraties », « maintien de la stratégie nucléaire », relance de la « lutte anti-terroriste » au sein des pays membres, sont autant d’exemples de sujets qui seront discutés au sommet de Novembre. 

Autant de sujets qui présagent d’une organisation plus belliqueuse, se positionnant comme gendarme du monde, garante des valeurs de paix et de liberté contre l’obscurantisme des « autres ». 

Ces différentes évolutions de l’OTAN – outre le fait qu’elles ne questionnent jamais le caractère pertinent de cette Alliance depuis 1989 – ne font jamais l’objet de débats démocratiques. Le domaine de la défense étant la chasse gardée du gouvernement (nous ne pouvons même pas savoir quel budget est spécifiquement alloué à l’OTAN au sein du budget total de la défense). A deux mois du prochain Sommet de l’Otan à Lisbonne, le parlement ignore quelle serait la position de la France . 

Est-ce légitime ? Est-ce normal ?

Le complexe  nucléaire militaro industriel  français avance ces  pièces sur l'échiquier international.

déjà au mois d'octobre le président de la république française  a inauguré à Bordeaux:

A l'occasion du 50ème anniversaire de la découverte du Laser, le Président de la République se rendra, jeudi 14 octobre 2010, en Gironde au sein des installations du Commissariat à l'Énergie Atomique et aux Énergies Alternatives (CEA).
Il inaugurera le bâtiment du Laser Mégajoule (LMJ) avant de se rendre à l'Institut du Laser et des Plasmas de l'Université de Bordeaux I.
Le chef de l'Etat prononcera un discours devant les différents acteurs et partenaires du pôle de compétitivité « La Route des Lasers ».
Le Président de la République profitera de ce déplacement pour évoquer les potentialités du LMJ en termes de recherche, d'innovation et de développement économique ainsi que les enjeux de la réforme des universités.

Le chef de l'État sera accompagné par Mme Valérie PECRESSE, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.

Par conséquent nous appelons à une semaine d’actions directes du 17 au 21 novembre.

 

Il y a des gens qui travaillent à l’organisation d’un camp activiste autogéré, avec des endroits pour dormir et une cuisine vegan. Si vous voulez nous aider, merci de nous contacter ou de venir quelques jours avant.

 

Pour d’autres informations sur le camp : lisbonactioncamp@riseup.net

 

tract sud educ:

Contre sommet de l’Otan à Lisbonnedu 15 au 21 novembre
"A l’opposé des objectifs avancés en 2001 (libération du peuple afghan-en particulier des femmes-du joug des Talibans, promotion de la démocratie, …), l’occupation de l’Afghanistan par les troupes de l’Otan, sous commandement US n’apporte que des destructions, des morts par milliers, des réfugiés par dizaines de milliers ; elle n’a en rien amélioré les conditions des Afghans et notamment des femmes et contribue à déstabiliser dangereusement toute la région.
Les troupes françaises participent à cette sale guerre. En 2007, N. Sarkozy a décidé la réintégration de la France à tous les niveaux de commandement de l’Otan, instrument de guerre et de domination, en même temps qu’il envoyait des renforts en Afghanistan.
Nous affirmons que c’est au peuple afghan qu’il revient de prendre son avenir en mains, sans ingérence des grandes puissances.
Nous exigeons :
le retrait de toutes les troupes étrangères, celles de l’Otan et de la France".

extrait d'un tract de sud éducation

Du 19 au 21 novembre 2010, le sommet de l'Otan se tiendra à Lisbonne

L'objectif annoncé du sommet est l'adoption du nouveau Concept stratégique, le septième depuis la création de l'Otan et, du même coup : ratifier les actions de l'Otan au cours des dernières années, particulièrement en Afghanistan et en Somalie ; définir plus précisément les actions de l'Otan pour les années à venir, particulièrement vis à vis de l'Iran ; garantir la cohésion des États membres par une obéissance stricte aux décisions du Pentagone.
Ce nouveau Concept stratégique orchestre, entre autres, la militarisation croissante des États membres de l'Otan ; le renforcement du pouvoir militaire malgré la crise et l'appauvrissement des populations des deux côtés de l'Atlantique ; la banalisation de la guerre comme outil de contrôle des ressources (l'énergie en particulier) et de leur acheminement ; le mépris de l'opinion publique qui défend une solution pacifique aux problèmes internationaux ; un retour à la menace nucléaire ; un élargissement de son espace d'intervention.
Les efforts de guerre mis en oeuvre par les gouvernement des pays de l'Otan n'ont jamais paru aussi inadaptés aux menaces militaires réelles que rencontrent ces pays, mais ils ne sont pas si surprenant au regard des difficultés des populations : chômage, gel des salaires, recul de l'âge de la retraite et réduction de l'accès à la sécurité sociale.
Le gouvernement portugais a menacé tou/te/s celles et ceux remettant en question l'Otan, son action et son existence comme des criminel/le/s et il prépare un réel état de siège avec la suspension des libertés et des portections qui existent dans les sociétés démocratiques.
Une large coalition d'organisation dépassant le cadre des pays de l'Otan a décidé de converger à Lisbonne pendant le sommet pour exprimer leur opposition à ces seigneurs de guerre, et ce malgré les menaces du gourvernement portugais qui ne fait que relayer les ordres venant de Washington et Bruxelles.
Pendant le sommet de l'Otan, aura lieu à Lisbonne :

  • un contre-sommet où seront exposés les dangers et les inconvénients des actions de l'Otan et surtout les dangers inhérents à l'existence même de l'Otan ;
  • une manifestation ouverte à tou/te/s celles et ceux souhaitant montrer pacifiquement la nécesité de la dissolution de l'Otan et d'un monde sans guerre ni menace miltaire ;
  • des actions de désobiénssance civile pour promouvoir la paix et les prises de conscience quant aux politiques de guerre menées par l'Otan, particulièrement en Afghanistan.
  • Tout/te/s à Lisbonne, pour qu'on en finisse avec l'Otran.
  • Tout/te/s à Lisbonne, pour montrer notre rejet de la militarisation.
  • Tout/te/s à Lisbonne, pour obtenir le retrait des troupes d'Afghanistan
  • Tout/te/s à Lisbonne, pour réclamer un monde de paix où les États renoncent au recours à la guerre.
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16 novembre 2010 2 16 /11 /novembre /2010 08:38

L'énormlté des tentatives de récupération de ce frétillement militant qu'on a vécu pendant des mois, nous oblige de publier un extrait de texte tiré de la revue temps critique n°15, pour laquelle on a consacré une discussion  boycottée soigneusement par  tous les groupes politiques "révolutionnaires valentinois"

« La tendance nécessaire du capital est : circulation sans temps de circulation ; cette tendance est la détermination fondamentale du crédit et des inventions de crédit du capital. D’un autre côté, le crédit est donc aussi la forme sous laquelle le capital cherche à se poser différent des capitaux particuliers ou que le capital particulier cherche à se poser en tant que capital à la différence de ses limites quantitatives […] Le plus grand résultat que le crédit apporte dans cette voie c’est le capital fictif ; en outre le crédit apparaît en tant que nouvel élément de concentration, de destruction de capitaux en des capitaux particuliers centralisés. D’un certain côté, le temps de circulation de l’argent est objectivé […] L’antagonisme du temps de travail et du temps de circulation contient toute la théorie du crédit, dans la mesure où l’histoire de la circulation intervient »

Karl Marx,
Fondements, tome II.
Anthropos, p. 171-172.
PARTIE I
Le crédit
cette forme nécessaire du Capital

Dès ses débuts, le capitalisme n’a pu se satisfaire de l’usure pour accumuler les moyens de production et développer la circulation des marchandises qui devenaient nécessaires à son expansion. Il a dû créer un système de crédit qui repose sur une capacité à capter la plus-value produite par le travail salarié. L’intérêt est alors conçu comme la rémunération de l’utilisation du capital-argent prêté à l’emprunteur, c’est-à-dire sur le profit réalisé par le capitaliste. Le système du crédit constitue un circuit monétaire spécifique dont la logique financière n’est pas strictement dépendante de la sphère de la production et de la circulation. Le crédit a pu alors être assimilé à du capital fictif.

Chez Marx, le capital fictif concerne surtout le développement du capital par actions, les traites, etc. autant de catégories qui relèvent plutôt du capital financier, au même titre que la Bourse1. Cette conception ne conduit donc pas à une transformation de l’appréhension du concept de capital lui-même quand la valeur tend à n’être plus qu’une représentation. Pour Marx le capital fictif n’est encore qu’une variable extérieure (dans Le Capital, elle n’apparaît qu’au milieu du livre iii2) et à son époque le système de crédit ne peut vraiment être appelé capital fictif car il repose encore sur la couverture de l’étalon-or. Toutefois, dans le Livre iii, Marx indique que la monnaie de crédit tend à se substituer à la monnaie-or et que son expansion est indépendante des réserves de la banque centrale3. Cela lui permet de mettre l’accent sur la crise qui serait révélée par un défaut de couverture ou par des bulles spéculatives4. Ainsi, la contradiction de la monnaie-crédit est qu’elle nie la monnaie-or. Nous voyons ici que l’analyse de Marx est limitée par sa période historique où une démonétisation de l’or est encore un processus impensable et une autonomisation de la monnaie-crédit par rapport à la monnaie-or pas plus pensable « qu’une émancipation du protestantisme par rapport au catholicisme5 ».

Même s’il est mentionné par Marx, le capital fictif ne peut véritablement être pensé car la valeur n’existe pas encore en dehors de sa substance. Pour Marx, comme pour l’économie classique, la richesse est une grandeur objective qui repose sur la théorie de la valeur travail6. La violence des relations monétaires qui est le propre de la société marchande est donc complètement négligée. Marx ne peut encore penser le capital financier comme la forme-valeur du capital à l’échelle mondiale, comme la forme qui lui permet de se dépasser et se développer au-delà de ses limites productives.

C’est que la science économique en général ne s’interroge pas sur la nature des phénomènes monétaires. Bien plus, elle les évacue de son corpus théorique. Les postulats qui fondent cette évacuation sont justement les théories de la valeur qui contrecarrent une véritable théorie de la monnaie7. L’idée est celle d’une économie pure et rationnelle qui se dégagerait de l’arbitraire, du pouvoir, de la croyance, donc de tout ce qui fonde les rapports sociaux et politiques. Les rapports d’échanges sont vus comme des rapports entre égaux. Pour les deux théories de la valeur, la cohésion des échanges provient d’une qualité commune aux marchandises (le coût de production réduit au temps de travail ou l’utilité du produit). Ce qui est logique pour les classiques et les néo-classiques qui pensent en termes de contrat et d’équilibre devient aberrant pour les marxistes censés penser en termes de déséquilibre obligatoire, de violence de classe et de pouvoir. C’est comme si cette violence de classe ne venait qu’après coup, dans l’exploitation du travail.

Pour Marx, la violence de l’Histoire est toute entière contenue dans la division du travail et c’est du travail que naissent les besoins. D’où la fameuse formule du Manifeste du Parti communiste : « De chacun selon son travail à chacun selon ses besoins », censée exprimer la différence entre la phase socialiste de la révolution et la phase communiste. En naturalisant les besoins, Marx revient en arrière en réhabilitant une valeur d’usage8 qu’il était censé avoir dépassée dans sa définition de la marchandise comme unité indissoluble de la valeur d’usage et de la valeur d’échange9. A partir de là, il ne peut reconnaître aucun espace au désir, au pouvoir, à la puissance. La violence n’existe qu’au sein du rapport de travail.

La monnaie a donc surtout une réalité instrumentale10 et le crédit est vu comme un moyen technique d’anticiper la valeur future. Nous sommes dans un modèle de développement capitaliste qui repose encore sur la prégnance des rapports de propriété et les contraintes régulières que les créanciers font peser sur les débiteurs à travers des institutions financières chargées d’absorber les tensions et de différer les dettes. Il s’agit de résoudre la contradiction entre temps de travail et temps de circulation. Or pour Marx, la théorie du crédit renferme tout l’antagonisme entre temps de travail et temps de circulation. Dans le crédit, il y a bien encore équivalence, mais avec le futur. Toutefois, dans Le Capital, Marx ne parlera plus de capital fictif mais de capital porteur d’intérêt qui exprime un fétichisme du capital, une valeur qui s’engendre elle-même11.

Pour conclure sur cette petite introduction théorique, on peut dire que pour Marx comme pour les classiques la monnaie est neutre et ce ne sont que des chocs aléatoires qui font réapparaître la question de la monnaie. Dans ce cas, toute l’attention va se reporter sur l’État comme nous pouvons le voir dans la situation actuelle.

– Soit pour louer son intervention, facteur d’ordre parce qu’il est le seul acteur global capable de résoudre les conflits d’intérêt et de redonner confiance en la monnaie publique. En effet, le crédit constitue une privatisation partielle de la monnaie. C’est la position actuelle de Sarkozy et des différentes autorités monétaires ralliées d’un coup à une vision politique de l’intervention de l’État comme garant de la reproduction d’ensemble.

– Soit pour le dénoncer comme étant à la racine du parasitage des échanges et de l’activité économique par la création monétaire12 qui serait une façon, pour lui de s’accaparer les richesses alors que l’économie n’aurait vraiment besoin que de monnaies privées (position de Hayek et des conservateurs américains, principaux opposants à l’existence de banques centrales et à une monnaie souveraine).

Alors que pour nous, dans la société marchande, la monnaie est liée à des processus de socialisation et elle ne présuppose pas une substance sociale. Elle est un élément central de la reproduction qui, aujourd’hui que nous sommes arrivés à un stade ultime de sa dématérialisation, exerce son « pouvoir » sous la forme paradoxale de l’évanescence. Pouvoir qui ne s’affirme qu’en réapparaissant comme le signe de la totalité, un signe capable de modifier la réalité13. L’argent, en tant que puissance de reproduction, reproduit à la fois lui-même et le monde de la production qui est sa condition. Ce processus ne peut que s’amplifier dans le contexte d’un marché mondialisé où la circulation se fait circulation productive. L’argent tend à se faire communauté qui ne tolère rien en face d’elle et surtout pas l’ancienne communauté du travail.

On retrouve là une mutation anthropologique produite par une monétisation des rapports sociaux14 qui est à la base de l’individualisme social et démocratique. Quand le capital financier était encore représenté par les petits rentiers, boutiquiers ou usuriers, l’opposition primaire au capital pouvait prendre la forme d’une opposition entre hommes (par exemple dans l’antisémitisme des pogroms). Mais aujourd’hui qu’il prend la figure abstraite du procès de totalisation du capital, il est plus difficile de trouver des leurres qui puissent servir de boucs émissaires. Quelques pdg à salaires exorbitants et quelques bénéficiaires de parachutes dorés ne font pas une cible suffisante et crédible pour tous ceux qui récriminent sans remettre en cause l’ensemble des rapports sociaux. 

La fonction primordiale du capital fictif aujourd’hui

Ces conditions originelles de développement du capital fictif vont changer à la fin du xixe siècle avec la disparition des monnaies dont les pièces représentaient une valeur en or ou en métaux précieux et la création des monnaies-billets et des monnaies écritures bancaires, celles qu’on nomme justement monnaies fiduciaires car il faut que son possesseur fasse confiance à une banque et à l’État qui garantissent sa valeur. En effet, la monnaie fiduciaire est privée de toute valeur intrinsèque et elle circule de façon de plus en plus excédentaire par rapport à son équivalent-or supposé la valider socialement et institutionnellement. Cela reste vrai même dans le cas d’un système monétaire international organisé comme l’était celui du Gold Exchange Standard. En effet, l’argent en circulation a continué à être évalué en référence à l’or parce que l’argent n’est pas essentiellement une chose matérialisé ou du moins matérialisable, mais une représentation de la valeur. Or, dans la tradition marxiste, la définition de l’argent comme forme de la valeur est limitée à la fonction de l’argent comme équivalent général des marchandises, c’est-à-dire qu’il incarne une quantité de travail abstrait. Cela vient du fait que Marx, dans le Livre i du Capital, fait une analyse de la circulation simple des marchandises dans laquelle l’argent médiatise l’échange entre des marchandises qui ont comme point commun d’être des produits du travail abstrait. Cette définition ne correspond pas du tout à la situation réelle qui rend compte de la fonction contemporaine de l’argent : celle de créateur d’argent sans aucun équivalent dans la circulation. Pourtant, dans les Théories de la plus-value, Marx parle bien d’un argent créé à partir de rien dans le rapport capital-travail, parce que le salaire sera établi dès l’instant où la force de travail est commandée par le détenteur du capital. Ce dernier achète et vend avant l’aliénation réelle de son argent parce que le système du salariat lui garantit, à l’avance, le commandement sur la force de travail15.

Avec le capital globalisé d’aujourd’hui, cette fonction de moyen de paiement créée ex nihilo (le capital fictif) devient primordiale alors que décroît la fonction traditionnelle d’équivalent général qui mesure la valeur dans l’échange. C’est seulement dans une crise comme celle de septembre-octobre 2008 que cette dernière fonction reprend de l’importance à partir du moment où des agents économiques cherchent à convertir des titres de richesse en richesse matérielle. Mais cette crise est « normale ». Elle ne vient pas sonner le glas du capitalisme, mais simplement signaler que celui-ci n’est pas capable de tenir tout ce qu’il promet. Ce sont seulement « les excès » du modèle qui peuvent engendrer des résultats pervers et catastrophiques (obligations pourries, junks bonds, maquillage des comptes, bénéfices fictifs, gonflement des chiffres d’affaires, détournements de fonds). L’exemple de la faillite d’Enron (septième société américaine par son chiffre d’affaire) avait déjà montré que les contre-pouvoirs de contrôle (commission officielle de surveillance, agences de notation, grandes banques créditeuses) ne fonctionnaient pas car tous adhèrent au modèle et le couvrent jusqu’à la dernière extrémité.

Sur la base de la théorie de Marx, la crise des années 30 a été analysée comme suit. Le mouvement du capital fixe est forcément pro-cyclique et le capital fictif participe de la valorisation dans la mesure où il ne fait que l’anticiper. L’écart entre prix et valeur est alors normal, mais dès qu’il y a dysfonctionnement, le capital fictif reste pro-cyclique (dit autrement, il épouse toujours le sens du cycle) et donc constitue un facteur aggravant de la surproduction et de la spéculation comme l’a montré la crise de 1929. Cela se termine par une déflation telle que les prix se réalignent sur le niveau des valeurs. Toute l’analyse s’effectue dans les présupposés de l’économie classique et en particulier de Ricardo, c’est-à-dire selon une conception de la monnaie simple voile et moyen de l’échange16. Une conception qui est en grande partie celle du Marx du Capital qui voit la crise monétaire à travers la crise de la fonction d’intermédiation de l’argent et donc de la coupure en deux phases propres à l’acte d’échange.

C’est ce présupposé que Keynes – économiste hétérodoxe qui ne se réfère à aucune théorie de la valeur pour fonder son analyse de la richesse17 – met à mal avec l’idée de la monnaie comme agent actif, de la monnaie comme désirable en elle-même. Il se place résolument du point de vue de la demande (consommation + investissement) et non de l’offre (la production). Le capital fictif devient alors, dans cette perspective, non un élément de la crise mais un élément de sortie de crise, un élément contra-cyclique par injection de l’extérieur du circuit du marché, de liquidités qui autrement n’y seraient pas entrées à cause des anticipations pessimistes des entrepreneurs. C’est ce qui sera appliqué dans le New Deal rooseveltien, mais aussi dans les fascismes, avec les politiques de déficit budgétaire pour financer les grands travaux (Tenessee Valley américaine, assèchement des marais pontins italiens, autoroutes allemandes) puis par tous les pays pendant la période 1945-1975. C’est une dernière tentative du capital pour dominer à travers le travail (cf. les politiques de plein-emploi de l’après Seconde Guerre mondiale). Pendant cette période, le capital industriel reste prédominant, mais déjà le rôle interventionniste et régulateur de l’État18, comme l’action des banques et surtout celle de la banque centrale sont des éléments clés des transformations structurelles de ce secteur.

Dès lors, la création de capital fictif n’est plus conjoncturelle mais structurelle. Elle participe au passage à la domination réelle du capital. Par exemple, en France, la restructuration gaulliste de l’appareil productif, ainsi que son ouverture puis son insertion au sein de la cee, donnent lieu à une refonte complète du système des banques. La nationalisation des quatre grandes banques de dépôt, la fin de la division stricte entre banques de dépôts et banques d’affaires, la mensualisation et le virement automatique des salaires de tous les salariés sur des comptes courants vont permettre de lancer une seconde phase de la « société de consommation ». En effet, le crédit aux ménages, mais aussi aux entreprises, va pouvoir s’adosser aux nouveaux dépôts dont la masse devient sans commune mesure avec la situation antérieure.

Ce qui est étonnant dans la crise actuelle, c’est qu’elle confirme une des affirmations majeures de Keynes, celle de la « préférence pour la liquidité » à travers des produits dérivés qui permettent de faire comme si les biens et services étaient de l’argent comptant19 ; alors qu’elle en contredit, parallèlement, une autre, c’est-à-dire qu’à une augmentation du revenu réel correspond une propension marginale à épargner plus importante en valeur relative que la propension marginale à consommer. Or les salariés américains ont fait exactement le contraire en augmentant leurs revenus réels par une utilisation massive du crédit et une épargne quasi nulle.

En Europe, l’inflation fut l’arme des États pour réduire la pression salariale et le résultat en fut là aussi une insuffisance de l’épargne des ménages. Cette insuffisance de l’épargne va amener une modification des pratiques des banques vis-à-vis de leurs clients. Elles vont leur proposer des produits financiers attractifs (par exemple, les sicav monétaires en France qui permettaient à la fois de maintenir la liquidité des prêts et de déduire des impôts une partie des gains) avant même que le marché financier ne s’impose à l’ancien marché monétaire avec le développement des actions et obligations dans des systèmes de portefeuilles collectifs permettant de créer un actionnariat de salariés. Ce que le gaullisme avait projeté, une association capital-travail par l’actionnariat ouvrier qui rénovait les projets traditionnels autour d’une « troisième voie » ni capitaliste ni communiste, mais qui maintenait la centralité du travail comme condition de l’association a échoué20 en tant que tel, mais s’est imposé sous une forme qui met au centre le revenu disponible indépendamment du rapport salarial. En tout cas, dès les lendemains de 68, un terreau fertile pour une révolution anthropologique est déjà bien préparé…à partir du moment, bien sûr, où on reconnaît notre défaite et qu’on accepte d’en faire le bilan et donc qu’on décide de se pencher sur la transformation des rapports sociaux et ses conséquences du point de vue des antagonismes de classes.

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15 novembre 2010 1 15 /11 /novembre /2010 10:22

L'enjeu des services publics  et la question des  conflits actuels , retraites et  sécurité sociale. mérite un débat approfondi dans les endroits de libertaire. je publie ce texte trouvé dans la revue réfraction N°15. téléchargeable sur internet

Par qui et comment seront faits les services publics dans la nouvelle organisation sociale » : voilà la première question à l’ordre du jour du congrès de l’Internationale fédéraliste tenu à Bruxelles en septembre 18741. Il s’agit d’un bien petit congrès, puisqu’il ne réunit que seize délégués dont une moitié de Belges. Seuls ont préparé sérieusement la discussion les Belges, en rédigeant un rapport long et fouillé, et les Suisses, en donnant des mandats clairs à leur représentant.

La question posée n’est pas rhétorique. Il y a trois ans, le peuple de Paris s’est soulevé pour en finir une fois pour toutes avec la guerre et la dictature ; il a pris son destin en main, il s’est organisé par quartiers et par métiers pour inventer un monde nouveau.

« C’était donc toute une politique nouvelle que la Commune avait à inaugurer, écrit Gustave Lefrançais2, [une] révolution communaliste, restituant aux individus et aux groupes communaux le droit de régler directement leurs intérêts politiques et sociaux, droit jusque-là usurpé par l’action gouvernementale. » La Révolution du 18 mars « n’apportait pas avec elle de simples modifications dans le rouage administratif et politique du pays. Elle n’avait pas seulement pour but de décentraliser le pouvoir. Sous peine de mentir à ses premières affirmations, elle avait pour mission de faire disparaître le Pouvoir lui-même ; de restituer à chaque membre du corps social sa souveraineté effective, en substituant le droit d’initiative directe des intéressés, ou gouvernés, à l’action délétère, corruptrice et désormais impuissante du gouvernement, qu’elle devait réduire au rôle de simple agence administrative ».

Cette administration d’une ville de deux millions d’habitants va donc s’occuper de tâches communes, dans une situation particulière due à la guerre et à la pénurie extrême qui règne dans Paris. Quinze jours après le soulèvement, les délégués des arrondissements, qui forment « la Commune » et son Comité central, se distribuent les tâches en formant dix commissions : exécutive, militaire, finances, justice, sûreté générale, travail et échange, subsistances, relations extérieures, services publics (soit, ici, les travaux publics), enseignement. Ce n’est pas de gaîté de cœur que les délégués assument ces tâches ; ce n’est guère non plus dans l’harmonie : il s’agit là d’une nécessaire réorganisation « au milieu d’une situation de périls de toute nature et […] sous l’empire des préoccupations trop gouvernementales dont une grande partie des membres de la Commune étaient obsédés. […] On oublia trop que le mouvement communaliste devait avoir pour objectif incessant de remettre aux citoyens euxmêmes, au moyen de leurs assemblées de quartiers, le soin de régler leurs intérêts collectifs et locaux, et que l’administration centrale ne devait être que la coordonnatrice et l’exécutive des décisions prises dans les réunions locales, au lieu de rester, comme devant, l’unique juge et directeur des intérêts de tous. » L’ancien instituteur Lefrançais, qui fut notamment membre de la Commission exécutive puis se réfugia en Suisse après la sanglante défaite, décrit son expérience dans les mois qui suivent, tout comme le font d’autres « communards », Prosper Olivier Lissagaray, Elie Reclus, Benoît Malon par exemple3. L’État ou la commune Quant l’Association internationale des travailleurs se divise en deux branches, suite aux exclusions prononcées par Karl Marx et les siens en 1872, Lefrançais rejoint tout naturellement les rangs de la Fédération jurassienne. Il ne se déclarera jamais anarchiste : dans la branche dite fédéraliste ne règne pas une opinion et une seule. En témoignent les débats à Bruxelles sur les services publics, ouverts par un discours interminable de César De Paepe. JPEG - 20.9 ko « Ce qui fait que telle chose plutôt que telle autre doit être considérée comme service public, écrit De Paepe, c’est – en plus du caractère d’utilité générale – un autre caractère encore, mais qui varie selon les cas particuliers. Ainsi, telle chose d’utilité générale est ou doit être constituée en service public, parce qu’elle n’existerait pas si on l’attendait de l’initiative privée, ou parce qu’elle serait détournée de sa vraie destination ; telle autre chose, parce qu’elle constitue un monopole qu’il serait dangereux d’abandonner à des particuliers ; telle autre, parce qu’elle exige un vaste travail d’ensemble nécessitant la combinaison d’un grand nombre de travailleurs et, par suite, une direction unique et suprême, qui ne peut être remise qu’aux mains de l’administration publique […].

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15 novembre 2010 1 15 /11 /novembre /2010 09:15
On peut trouver des textes a propos du center parc sur center parc sur Pièces
et Main d'Oeuvre. Le collectif le laboratoire a été dans son histoire parti
prenante de la lutte avec QOCP.

Bonjour,

Notre époque serait marquée par le fait que les conflits relèvent aussi de la procédure judiciaire substituant à la colère une autre conception de la bataille. Le conflit qui oppose les promoteurs du projet de construction d’un Center Parcs à Roybon dans les Chambarans avec l’association « Pour les Chambaran Sans Center Parcs » s’est traduit par quelques demandes de recours gracieux qui ont poussé la société Pierre & Vacances à annoncer une suspension de 6 à 18 mois de son projet. Suite à ces recours, le Conseil Général qui soutient le projet a confié une médiation impartiale à la très consensuelle Karen Simian (un fois à droite, un autre à gauche), ancienne présidente de l’association qui gérait jusque là l’Office du tourisme Mandrin-Chambaran. Cette médiation devrait malgré tout permettre de faire comprendre aux récalcitrants combien l’idée de développer le tourisme dans les Chambarans est une idée géniale. Nous apprenions, quelques jours plus tard, que l’association présidée par madame Simian devait revoir son activité et devenir un simple comité des fêtes qui continuerait à organiser par exemple la Fête de la forêt et les Cordiales, afin de laisser la gestion de l’Office du tourisme à une Société Publique Locale, ce qui permettra aussi aux communautés de communes Bièvre Toutes Aures et Pays de Chambaran de gérer la taxe de séjour. Comme le disait sans ambages un ancien bénévole de l’Office du tourisme à ceux qui, embarrassés, essayaient d’expliquer pourquoi ce changement de statut : « Vous voulez récupérer la manne financière de Center Parcs. C’est tout ! »

Il est plus rare de voir que parmi ceux qui s’opposeraient à un même projet, on utilise cette manière procédurière afin d’éviter que soient rendues publiques certaines divergences dans la manière d’aborder les problèmes, les débats et les perspectives. L’analyse et le contenu de ce texte ont pris leur forme définitive ici suite à une menace de me poursuivre en justice pour avoir souhaité publier une correspondance qui n’avait à mon avis aucun caractère privé, mais qui selon la justice reste, malgré tout, répréhensible. Me faisait-on quelques révélations et confidences compromettantes ? Chères lectrices et chers lecteurs, vous n’en saurez rien !

Sans jamais dévoiler l’identité de mon correspondant, je livrerai ici avec les quelques contorsions d’usage qui m’éviteraient les désagréments judiciaires, l’analyse qui malgré tout reste la mienne et que je développais aussi dans cet échange de courriels où j’apportais quelques éléments de réflexion sur ce qui m’anime et qui va notamment à l’encontre du rôle que joue la FRAPNA, en m’appuyant uniquement sur des informations déjà publiées.




Merci de faire circuler,

Q.O.C.P@orange.fr

Center Parcs - Une fissure dans le consensus :

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14 novembre 2010 7 14 /11 /novembre /2010 17:58
lu sur article 11 ce texte qui circule actuellement pour armer notre combat  publié par le Kollectif des  chomeurs/euses et précaires du bassin du  valentinois.
David Harvey : "Pour que le système change vraiment, il faut que les travailleurs se fâchent"

Conférence à l’Ecole d’architecture de Belleville / Jeudi 21 octobre

mardi 26 octobre 2010, par Lémi

Longtemps boudé par le champ académico-universitaire français [1], l’anglais David Harvey est pourtant le théoricien marxiste le plus traduit au monde (avec Frederic Jameson). Ce n’est que justice : le penseur - pas forcément très simple d’accès, rien à voir avec Mike Davis ou Slavoj Žižek - est un décrypteur acharné du règne du capital. Surtout, ce théoricien de la Radical Geography a dépoussiéré l’héritage marxiste en lui adjoignant une dimension spatiale, posant l’étude des espaces du Capital comme préalable indispensable à une compréhension globale du monde tel qu’il tourne (mal).

Pour cette conférence donnée à l’École d’architecture de Belleville [2], David Harvey s’est éloigné de la géographie pour se concentrer sur le thème des son dernier livre, encore inédit en français, L’énigme du capital. À partir d’une analyse basique des différentes étapes de la production, se focalisant sur la récente crise généralisée, il pointe les diverses failles du système et les inégalités criantes qu’il engendre. Avec cette interrogation, en toile de fond : puisque ce système est si mauvais, pourquoi ne pas en changer ?


 [3]

« Je vais tenter de vous expliquer rapidement ce que j’ai exposé dans mon dernier livre, L’Enigme du capital, un ouvrage qui se penche sur la récente crise financière en l’analysant dans les termes les plus simples possibles - et ce sont des termes marxistes. Mon analyse se base sur la circulation du capital. Le schéma que je viens de tracer (ci-dessus) est très simple : il part de l’argent, qui est utilisé pour se procurer de la main d’œuvre et des moyens de production. Via la technologie et l’organisation du travail, ces éléments débouchent sur un bien et sur des profits générés par la vente de ce bien. Dans ce processus, il y a deux choses importantes à noter :

- D’abord, à partir du moment où cette circulation s’interrompt, le système s’effondre complètement. Par exemple, j’étais à New York au moment de l’attentat du 11 septembre : tout s’est alors arrêté - il n ’y avait plus de circulation ni de consommation. Au bout de quatre jours de cette situation, le maire s’est invité à la télévision pour exhorter les habitants à sortir leurs cartes bleues, à aller au restaurant ou dans les galeries commerciales. Il était littéralement suppliant. La même chose s’est passée quand les banquiers islandais ont pris leur revanche sur le monde en allumant un volcan...

- Deuxièmement, le système doit être en perpétuelle croissance. Pour survivre, il lui faut sans cesse s’étendre. Le surplus est réinvesti de manière à régénérer l’ensemble. Historiquement, ce système a eu une croissance globale annuelle de 2,25 % depuis 1780. Les économistes considèrent pourtant qu’à moins de 3 % de croissance, il faut s’inquiéter.

Il est aujourd’hui de plus en plus difficile pour le système de trouver des marchés, des débouchés pour les nouveaux produits. On ne peut évidemment comparer ce qui se passait dans le monde occidental en 1780 autour de trois ou quatre villes européennes comme Birmingham ou Manchester à la situation actuelle. Les situations n’ont rien à voir, mais une règle se vérifie dans les deux cas : le taux de croissance annuelle ne doit jamais baisser ; s’il le fait, le système se grippe. Nous en sommes aujourd’hui à 55 trillions de dollars de production annuelle de biens et services, et ce chiffre augmente de manière exponentielle. À ce stade, pour que la machine ne s’enraye pas, il faut y réinjecter 1.5 trillion supplémentaire chaque année.

Il y a depuis peu une évolution notable : les firmes non financières, celles qui produisent biens et services, réinvestissent de plus en plus leur argent dans des produits financiers, comme des swaps, des éléments dématérialisés. Il n’est plus rentable de continuer à produire, ça ne rapporte pas assez pour réalimenter le fonctionnement de la machine. Ce qui amène à se demander si le système n’est pas en fin de course : où se situent ses limites ?

Pour répondre à cette question, il faut savoir d’où vient l’argent et comprendre comment le capital est constitué, comment il est configuré pour soutenir un système de production. Derrière ce fonctionnement, on repère ce que j’appelle la collusion finance/État, une forme de collaboration entre les institutions financières et l’État. L’histoire du capitalisme est marquée par les évolutions dans le fonctionnement de ce lien. Quand il a des ratés, nous nous retrouvons en situation de crise ; on en a un très bon exemple avec la répression financière de la fin des années 1960 et du début des années 1970. Beaucoup de gens se montraient alors très critiques, affirmant qu’on mettait trop de limites aux pouvoirs des financiers et que c’était un frein pour la croissance. À partir de là, la collusion finance/État a été réformée et encouragée : une dérégularisation croissante a été mise en place. Le système est ainsi passé de la répression financière du début des années 1970 à une exubérance financière, avec beaucoup trop de pouvoirs entre les mains des financiers.

Cette collusion finance/État est toujours camouflée, elle reste dans l’ombre. Nous ressentons seulement sa présence en période de crise. Au moment de l’effondrement de Lehman Brothers, le Président des États-Unis a par exemple complètement disparu de la scène : ceux qu’on a vus à la télévision étaient le directeur de la Réserve fédérale (représentant du système bancaire) et le ministre des Finances. Il y avait une absence totale du chef de l’exécutif. À ce moment-là, c’est la finance qui prenait les décisions et les expliquait à la télévision. Alors même que l’État a absorbé les pertes des banques et, donc, de Lehman Brothers.

L’autre limite visible du système est celle de la main d’œuvre. Pendant la crise des années 1970, la main d’œuvre était encore puissante face au patronat, et les syndicats pouvaient fortement peser dans la balance - notamment sur des questions telles que le salaire minimum. De cela découlait ce que l’on a appelé la constriction du capital, une situation où ce dernier restait encadré et limité dans ses agissements. La situation s’est depuis inversée.

À l’époque, le système a réagi en délocalisant tout azimut. Pour mater les travailleurs et les syndicats, la meilleure solution était de s’installer ailleurs, en Chine par exemple. Et pour permettre ces délocalisations, il fallait une réforme du système financier lui-même. En 1985 a ainsi été mis en place un système de circulation permettant ce processus.

Aujourd’hui, le discours a un peu changé. La crise ne serait plus le fait des syndicats, mais conséquence de l’effondrement bancaire et de la nécessité de l’État de les tirer d’affaire. L’État se pose en victime, ce qui permet d’encore réduire le pouvoir des syndicats.

La situation fait écho à ce qui s’est passé en 1982 au Mexique, quand le pays était au bord de la faillite et que les États-Unis l’ont tiré d’affaire - avant de réduire le niveau de vie des mexicains d’environs 25 %. C’est ce qui se déroule actuellement dans de nombreux pays, y compris dans les pays industrialisés : les États imposent des ajustements structuraux de type FMI, lesquels ferment la voie à toute revendication sociale et populaire.

Dans le même temps, les banquiers continuent de s’enrichir. Il y a deux ans, les dirigeants de hedge funds ont engrangé trois milliards de dollars de bénéfice. Je trouvais déjà cela obscène quand ils gagnaient 250 millions, mais là... Ce sont pourtant les mêmes qui ont coulé les banques d’affaire et imposé des mesures d’austérité en conséquence... Ils sont plus riches qu’ils ne l’ont jamais été, alors que les populations s’appauvrissent. Ce qui se passe maintenant en Angleterre, par exemple, est exactement ce qui s’était passé au Mexique à l’époque.

Autre point fondamental : l’accès aux moyens de production, lié à l’environnement et aux ressources naturelles. Il en va ici de même que lorsque les capitalistes extraient de l’argent du système en le faisant tourner à vide ; et nous nous retrouvons face à des problèmes écologiques qui ne peuvent plus être ignorés. La crise écologique est aggravée par une élite propriétaire qui cherche à toujours augmenter sa rente. Face à la crise se développe une chasse à la terre et à la propriété tout autour du monde. Certains pays, comme la Chine (en Afrique) ou les États-Unis (en Amérique latine), vont jusqu’à acheter des portions entières de pays. Cela découle de la même quête de nouveaux profits que celle tournant autour la propriété intellectuelle, autre Eldorado du moment.

Ensuite vient la question de la production, qui recoupe deux éléments. En premier lieu, la production est liée à la technologie et à l’organisation du travail. Historiquement, le capitalisme a fait preuve d’un grand dynamisme dans ces deux domaines. En ce qui concerne le deuxième, ce dynamisme s’illustre aujourd’hui avec des firmes comme Ikea, Wall Mart ou Carrefour, où tout est mis en place pour toujours plus de profit. Il y a eu des périodes où les évolutions dans la technologie et l’organisation ont joué un rôle central dans les périodes de crise. Mais lors de la dernière crise, elles ont eu leur importance sans pour autant se montrer déterminantes : marchés financiers fantômes, ordinateurs boursiers qui fonctionnent à la nano-seconde et échappent au contrôle du système lui-même...
Cette question de la production recoupe un deuxième élément : la situation du travail lui-même et la discipline imposée au travailleurs. Dans les années 1960 et 1970, je l’ai dit, les syndicats avaient du poids dans l’économie. Mais depuis les années 1980, le capital a aussi gagné sur ce point : il n’y a plus de syndicats pour les mettre au pied du mur.

Autre point important, celui concernant l’argent et le surplus d’argent, donc le bénéfice. Pour se maintenir en vie, le système doit croitre continuellement. Et cette croissance requiert une augmentation de la demande effective.
Deux éléments importants à ce niveau. De un, le système doit créer de nouveaux désirs et besoins pour se maintenir. De deux, les gens doivent avoir assez d’argent pour répondre à ces désirs par la consommation. Si on compare de nouveau avec la fin des années 1960 et le début des années 1970 - l’époque où on pouvait parler de constriction du profit -, on remarque qu’on est depuis passé à l’exact inverse : nous faisons désormais face à une répression salariale. Cette répression implique que la population a moins d’argent pour acheter les produits, ce qui débouche sur une baisse de la demande effective.
La solution proposée ? Donner à tout le monde une carte de crédit et leur conseiller d’en faire bon usage. La dette des ménages a ainsi triplé depuis les années 1980, alors que les salaires stagnent. Le fossé s’élargit. Le collusion finance/État a délibérément distribué de plus en plus de crédits à des gens qui avaient de moins en moins de revenus. Voilà ce qui a amené à la crise des subprimes.

À beaucoup d’égards, les subprimes ont constitué la clé et le déclencheur de la dernière crise. Mais il est important de souligner que ce que l’on a désigné comme une crise mondiale n’a concerné que certains pays, pas du tout la planète entière. il y a eu une réel inégalité géographique.
Ici, nous faisons face à des politiques d’austérité ; mais ce n’est pas du tout le cas, par exemple, de la Chine, lancée dans un programme keynésien de développement, avec de gros projets et des banques qui investissent. La Chine a une croissance qui explose, autour de 10 %. Les gens qui traitent avec des partenaires chinois et évoquent la crise déclenchent chez eux une certaine incrédulité : de quelle crise parlez-vous ? L’Australie non plus n’a pas connu de crise, parce qu’elle exporte beaucoup de matières premières vers la Chine. L’Amérique latine a connu une crise très brève, notamment parce qu’elle devient une espèce de grand jardin de soja, avec des conséquences écologiques désastreuses.
Bref, il y a là deux situations aux antipodes : d’un côté l’austérité, de l’autre le keynésianisme redécouvert.

Nous assistons ainsi à une réorganisation totale du pouvoir géo-économique - Giovanni Arrighi parle à ce sujet de glissement hégémonique -, avec l’émergence d’une nouvelle puissance en Asie du Sud Est, qui fait concurrence aux États-Unis et - dans une certaine mesure - à l’Europe. Si nous nous focalisons sur cette dernière, nous constatons que le plus gros exportateur vers la Chine est l’Allemagne - qui ne se sort pas trop mal de la crise. En retour, La Chine s’intéresse à l’Europe comme débouché : elle est d’ailleurs en train d’acheter le port d’Athènes, pour organiser l’importation de ses produits en Europe.

La raison pour laquelle j’aime raisonner en me basant sur des schémas de ce type [4], c’est qu’ils permettent de mettre précisément le doigt sur l’étape du processus qui fait obstacle au capital et provoque la crise.
Les crises des années 1970 étaient très différentes car elles prenaient place dans une époque de répression financière, où les ouvriers étaient encore bien organisés. Ce n’était pas un problème de demande effective. Aujourd’hui, la crise est provoquée par le trop grand pouvoir de la collusion finance/État. D’où une situation de surexploitation : le système ne parvient plus à écouler sa propre production. Reste à savoir quelle solution va être choisie pour y remédier.

La conclusion centrale que je tire est celle-ci : le système capitaliste ne parvient jamais à résoudre les problèmes qui provoquent les crises. Il se contente de les déplacer. De deux manières différentes : soit en les exportant dans un autre point du processus de production, soit en les déplaçant géographiquement. Si vous étiez en Asie en 1997 ou 1998, vous teniez un discours catastrophé ; au même moment, le monde occidental demandait de quelle crise il s’agissait. En 2001, c’était le tour de l’Argentine, mais nous restions à l’abri. Aujourd’hui, nous disons : il y a une crise. Mais le reste du monde répond : quelle crise ?
Ces crises circulent, elles passent de la Californie à la côte Est, à l’Islande, puis au Portugal, à l’Irlande... Il serait d’ailleurs intéressant de savoir où la prochaine crise va éclater ; probablement à Shanghai, où le marché de l’immobilier est en train de s’emballer, avec création d’une bulle spéculative.

Pour que le système change vraiment, il faudrait que les travailleurs, en Europe par exemple, se fâchent, qu’ils décident que, puisque ce système ne fonctionne pas, il est temps de mener un combat de classe pour s’en débarrasser. Et le remplacer par quelque chose d’autre [5]. »

Question en fin de conférence

Dans un de vos récents livres, vous dites : "Après le capitalisme, l’espace urbain : une utopie nécessaire". Qu’entendez-vous par là ?

 [6]

« Une des anecdotes que je raconte dans ce livre s’est déroulé alors que je présidais un jury en Corée du Sud. La discussion était dominée par deux architectes qui discutaient avec emphase : ils comparaient le pouvoir du carré et du cube, qu’ils opposaient à celui du cercle et de la boule.

Au bout d’un moment, je suis intervenu pour dire qu’on devrait peut-être s’intéresser à d’autres questions. Qu’il fallait concevoir la ville en prenant en compte d’autres éléments que cette question de carré et de cercle. Par exemple : quelle sorte de relation à la nature proposaient ces constructions ? Quelles technologies étaient utilisées ? Quelles formes d’organisation ? Et puis, quelles sortes de relations sociales étaient mises en avant ? Quels systèmes de production ? Quel rapport à l’espace ? Quelle vie quotidienne ? Quelles conceptions mentales ?
J’ai tenté d’insister sur le fait qu’aucun de ces éléments n’était indépendant. Que chacun influait sur l’autre. La ville ne devrait pas être vue comme un produit fini mais comme un processus.

À la fin de la discussion, l’un des deux architectes est intervenu pour dire qu’il trouvait tout ça vraiment intéressant. Et que - pour lui - il y avait un point primordial, celui des conceptions mentales, parce qu’il permettait de revenir sur l’opposition du cercle et du carré... Que voulez vous faire face à ça ? J’ai des amis architectes, et parfois ils me rendent fous...
Bref, cet architecte m’a ensuite demandé d’où était issu le schéma utilisé [7], si j’en étais le concepteur. Je lui ai répondu qu’il était tiré du Capital de Marx...

Cette interdépendance des éléments ne concerne évidemment pas que les conditions d’urbanisme. Par exemple, on ne peut imaginer résoudre le problème du changement climatique sans agir à tous les niveaux, du mode de production à la vie quotidienne, du rapport à la nature aux conceptions mentales. C’est une forme d’utopisme dialectique. Pour résoudre un problème, il faut parcourir absolument tous ces aspects, n’en négliger aucun. La transition du capitalisme au socialisme implique cette approche ; ça a déjà été le cas au moment du passage du féodalisme au capitalisme.

Cette conception peut servir de cadre dans un projet de changement urbanistique. Par exemple, si je veux changer les conceptions mentales liées à la ville, je dois solliciter tous les autres domaines, les parcourir scrupuleusement.

Pour conclure, il est certain que la conception mentale que vous avez tous dans cet amphithéâtre n’a absolument rien à voir avec celle qu’avaient le gens dans les années 1960 et 1970. À l’époque, on croyait encore à la possibilité d’une révolution, d’un cadre différent. Aujourd’hui, ce cadre mental a changé. Et il peut encore changer, dans l’autre sens. À vous de le prouver ! »

Notes

[1] Peu enclin à accepter qu’un penseur issu du monde anglo-saxon puisse rivaliser avec les Lumières hexagonales.

[2] Et organisée par l’excellente librairie Le Genre Urbain (30 rue de Belleville, 19e), à l’occasion de la parution de deux livres de David Harvey en français, Le Nouvel impérialisme (Les Prairies Ordinaires) et Géographie et Capital (Syllepses).

[3] Ce schéma, dessiné par David Harvey - comme celui reproduit plus bas -, a été photographié à la fin de la conférence.

A noter : la retranscription écrite de l’entretien ne fait pas totalement justice à la limpidité du propos de David Harvey. D’abord en raison du filtre de la traduction, ensuite parce que sa conférence était pensée comme exercice oral.

[4] Il s’agit par exemple de celui placé au début du compte-rendu.

[5] Applaudissements nourris et enthousiastes.

[6] La conférence ayant empiété sur le temps du débat, une seule question a pu être posée à David Harvey, celle-ci.

[7] Celui photographié ci-dessus.

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